Vienne restitue 2 dessins de Schiele à l’héritière d’un collectionneur juif spolié
Ayant-droit du collectionneur juif viennois Karl Mayländer, Eva Zirkl réclamait depuis plus de 15 ans la restitution de cinq dessins d'Egon Schiele
Le gouvernement autrichien a annoncé jeudi la restitution de deux dessins de Schiele à l’héritière d’un collectionneur juif spolié par les nazis, mettant fin à un long contentieux opposant celle-ci au musée Leopold de Vienne, qui les détenait.
« C’est un jour très heureux qui met fin à plusieurs années de conflit en permettant à chacune des parties de sauver la face », a déclaré le ministre de la Culture, Josef Ostermayer, lors d’une conférence de presse.
Les dessins rehaussés d’aquarelle « Garçon assis avec les mains croisées » et « Autoportrait aux coudières » d’Egon Schiele (1890-1918) doivent partir pour les Etats-Unis, où réside l’héritière, Eva Zirkl, a-t-il été précisé.
Ayant-droit du collectionneur juif viennois Karl Mayländer, Mme Zirkl réclamait depuis plus de 15 ans la restitution de cinq dessins d’Egon Schiele, une des principales figures de l’art viennois du début du 20e siècle, qu’avait acquises après-guerre le collectionneur autrichien Rudolf Leopold.
En 2010, une commission de restitution avait validé cette demande, soulignant que les oeuvres avaient été spoliées par les nazis. Mais en tant qu’institution privée, le musée Léopold n’était pas légalement tenu de se plier à cette recommandation.
Le dossier est longtemps resté dans l’impasse, le musée souhaitant éviter une restitution via un dédommagement financier, tandis que l’héritière, âgée de 95 ans, demandait à recouvrer la possession physique des oeuvres.
La médiation de gouvernement a finalement permis d’aboutir à un compromis permettant de clore le dossier: deux oeuvres, choisies par Mme Zirkl, sont restituées et trois demeurent la propriété du musée Leopold.
« Ce jugement de Salomon permet de lever l’ombre qui planait sur le musée Leopold’, s’est félicité M. Ostermayer.
La représentante de la Communauté juive d’Autriche, Erika Jakubovits, qui défendait les intérêts de Mme Zirkl, a salué « une solution formidable ». « Je suis très heureuse que l’héritière puisse encore jouir de ces oeuvres. L’argent ne l’intéressait pas », a-t-elle souligné.
Ce compromis clôt le dernier contentieux majeur concernant des restitutions en Autriche, ont relevé M. Ostermayer et Mme Jakubovits auprès de l’AFP.
Adoptée en 1998, une loi a permis la restitution progressive par l’Autriche de toutes les oeuvres intégrées à des collections publiques et identifiées comme volées sous le Troisième Reich, dont d’autres oeuvres issues de la collection Mayländer et plusieurs tableaux majeurs de Klimt.
Le musée Leopold, qui n’est pas soumis à cette législation, avait déboursé 19 millions de dollars en 2010 pour récupérer « Portrait de Wally » de Schiele, une autre oeuvre spoliée, qui avait été saisie douze ans plus tôt à New York où le tableau se trouvait pour un prêt.