A New York, des lycéens, soutenus par Susan Sarandon, manifestent contre Israël
Des centaines d'élèves et d'adultes ont scandé : "Il n'y a qu'une seule solution, la révolution de l'Intifada" ; L'actrice a déclaré que "tellement de gens ne comprennent pas le contexte dans lequel cet assaut du 7 octobre est survenu"
Luke Tress est le vidéojournaliste et spécialiste des technologies du Times of Israël
New York Jewish Week via JTA — Des centaines de lycéens et d’adultes se sont rassemblés aux abords de Bryant Park, répondant à l’appel lancé par une coalition de groupes pro-palestiniens qui ont appelé les élèves à se mettre en grève pour protester contre la guerre à Gaza, qui oppose Israël et le groupe terroriste palestinien Hamas.
La foule a scandé « Intifada », appelant à un cessez-le-feu, accusant Israël de génocide et saluant ce qu’ils appellent « la résistance » [nom que se donnent les groupes terroristes islamistes anti-Israël palestinienne. L’actrice Susan Sarandon, critique de longue date de l’État juif, a fait une apparition inattendue lors de la manifestation.
Les organisateurs avaient diffusé un guide détaillé pour aider les lycéens à programmer leur participation, à l’organiser et à obtenir le consentement des responsables des écoles pour pouvoir assister à ce rassemblement. Mais la majorité des personnes présentes semblaient toutefois plus âgées et un intervenant a déclaré au public que « plus de 150 élèves » avaient renoncé à aller en cours pour venir afficher leur mécontentement – il y a des centaines de milliers de lycéens dans la ville. Des adolescents sont arrivés plus tard, après la fin de la journée scolaire.
La foule, installée sur les marches de la bibliothèque publique de New York, a scandé différents slogans – « Du fleuve jusqu’à la mer, la Palestine sera libre », « Israël est un État raciste » et « Il n’y a qu’une seule solution, la révolution de l’Intifada ». Des panneaux tenus à bout de bras affirmaient par ailleurs : « La résistance contre l’occupation est un droit de l’Homme » ou réclamaient la libération « de tous les prisonniers politiques palestiniens ».
Les activistes, pour leur part, avaient installé sur le bâtiment des autocollants où était inscrit « Stop à l’holocauste à Gaza » et mettant en garde « les donateurs sionistes » en les décourageant d’intervenir dans les établissements d’enseignement supérieur.
La guerre a commencé le 7 octobre quand le Hamas avait envahi Israël, tuant environ 1 200 personnes et enlevant au moins 240 personnes qui sont depuis retenues en otage dans la bande de Gaza. Israël a depuis procédé à d’importantes frappes aériennes au sein de l’enclave côtière et lancé une incursion terrestre dans le but d’écarter le groupe terroriste du pouvoir. Selon des chiffres qui ne peuvent pas être vérifiés et qui ont été transmis par le ministère de la Santé à Gaza, placé sous l’autorité du Hamas, plus de 11 000 Gazaouis auraient été tués – même s’il est difficile de dire le nombre exact de civils ayant perdu la vie et le nombre de ceux qui sont morts suite à des tirs de roquette manqués des factions terroristes palestiniennes de la bande.
Sarandon a déclaré que « tellement de gens ne comprennent pas le contexte dans lequel cet assaut du 7 octobre est survenu. Tellement de gens ne comprennent pas ce qui est arrivé au peuple palestinien dans l’Histoire ».
Elle a ajouté : « Il est temps d’ouvrir nos cœurs. Il est temps d’être fort et il est temps que la Palestine devienne libre ».
Les intervenants qui ont pris la parole lors du rassemblement ont dénoncé le nombre de victimes à Gaza et ils ont estimé que la guerre était le point central de la lutte, dans le monde, contre l’impérialisme occidental, à la recherche du profit – soulevant les sujets des syndicats américains, des sans-abri de New York City, des taxes américaines et des politiques mises en œuvre par les firmes d’investissement de New York.
« La situation à Gaza est inimaginable », a dit une intervenante du Palestinian Youth Movement, l’un des groupes organisateurs, à la foule. « Chaque jour, nous avons des nouvelles de notre peuple à Gaza qui nous dit ‘Aujourd’hui, ça a été pire que jamais’. »
« Du fleuve jusqu’à la mer, le combat pour la libération palestinienne devient plus fort face aux bombes et face aux balles du monde impérialiste et des sionistes oppresseurs », a continué la femme, qui n’a pas donné son nom. « La nature génocidaire et expansionniste de la colonisation sioniste n’est jamais apparue de manière aussi claire ».
Un lycéen a déclaré aux personnes qui s’étaient rassemblées que « nous montrons au peuple de Gaza qu’il est écouté ».
« Nous sommes les combattants de la résistance de l’Occident », a-t-il ajouté. « Et nous ne nous tairons pas avant que la Palestine soit libre ».
Les organisations à l’origine du mouvement de protestation ont demandé un cessez-le-feu immédiat et « la fin du soutien américain au génocide » dans des documents distribués aux lycéens, à leurs enseignants et à leurs parents avant la manifestation.
L’événement, appelé « Journée d’action », a été parrainé par un certain nombre de groupes propalestiniens et enseignants, notamment par le Palestinian Youth Movement, par l’organisation Teachers Unite et par le Movement of Rank and File Educators, le caucus progressiste du syndicat des enseignants de la ville.
Le Community Education Council du District 14 de Brooklyn, une instance élue de la structure chargée d’administrer les établissements scolaires de New York City, a aussi apporté son soutien à la manifestation. Ce Conseil d’éducation communautaire et plusieurs autres organisateurs n’ont pas répondu à nos demandes de commentaire.
Le « kit » distribué par les groupes organisateurs comprenait un guide visant à interpeller les membres du congrès, les plans de ce débrayage des lycéens, des instructions pour les enseignants, des projets de résolutions anti-israéliennes à destination des associations des parents d’élèves et des éléments de langage reprenant les messages délivrés lors du rassemblement.
Une note suggère ainsi aux éducateurs de soutenir les lycéens manifestants en annulant des examens ou autres échéances, prônant également l’organisation de mouvements de protestation dans l’enceinte des écoles s’ils sont réticents à laisser les élèves quitter les campus.
Ces documents semblent par ailleurs justifier l’attaque du 7 octobre, disant que « les Palestiniens ont abattu les murs en ciment qui les emprisonnent dans la bande de Gaza ».
Israël est aussi accusé, sur l’un des documents, d’avoir tué 900 personnes dans un bombardement effectué sur un hôpital, le mois dernier – une accusation qui a été largement réfutée par de nombreuses évaluations faites par des agences de renseignement différentes et par d’autres publications. Il est affirmé, par ailleurs, que l’État juif a délibérément tué des civils qui fuyaient les combats, ce qu’Israël nie avec force. Le pays a ouvert des couloirs humanitaires protégés pour permettre l’évacuation des civils et institué des pauses, de manière à ce que les Gazaouis puissent fuir ou accéder aux aides humanitaires qui sont distribuées dans la bande.
Mercredi, le chancelier David Banks a mis en garde les enseignants en leur demandant de ne pas faire entrer la politique dans les salles de cours. Dans un courriel que le département d’Éducation a partagé avec le New York Jewish Week, il a précisé qu’il avait prévu de transmettre son message avant l’annonce de l’organisation de ce mouvement de protestation.
« Les directeurs des écoles, les enseignants et autres employés des établissements scolaires ne doivent pas exprimer leurs points de vue personnels sur des questions politiques dans l’enceinte des établissements », disait le courriel. « Notre mission, en tant d’éducateurs, est de présenter à nos élèves des faits objectifs et des perspectives multiples pour leur permettre de se faire leur propre jugement et de devenir, à terme, des esprits indépendants et critiques ».
A la fin du mois dernier, Banks avait fait part de son inquiétude profonde au sujet « de la rhétorique haineuse des institutions d’éducation » au sujet de la guerre. Quelques jours après l’attaque du Hamas, Banks avait condamné « les actes horribles de violence » et annoncé que le système scolaire fournirait des ressources visant à faciliter le débat sur le conflit.
Les règlements du département d’éducation de New York City stipulent que « les établissements scolaires ne sont pas des tribunes publiques qui peuvent être utilisées à des fins d’expression communautaire ou politique ». Elles précisent également que les employés ne peuvent pas mener d’activités politiques pendant les heures de travail.
Les mouvements de protestation contre les violences par arme à feu – en particulier dans le sillage de la fusillade survenue à Parkland, dans une école de Floride – ont établi, ces dernières années, un précédent concernant les manifestations en milieu scolaire. Les mesures disciplinaires venant sanctionner des activités illégales doivent être conséquentes et, jusqu’à présent, elles ont été plutôt modérées, explique David Bloomfield, professeur d’éducation, de leadership, de droit et de politique au Brooklyn College et au CUNY Graduate Center.
« Si l’administration des écoles n’a pas sanctionné les enseignants ayant participé aux rassemblements contre les armes à feu, alors ils ne peuvent pas soudainement changer de cap et se montrer plus rigoureux dans le cas d’un mouvement pro-palestinien », dit-il.
Bloomfield ajoute que les enseignants peuvent, en toute légalité, encourager une journée d’action – mais que les activités entreprises dans ce cadre peuvent, pour leur part, être hors-la-loi si elles ont lieu pendant les heures de travail. Élèves et professeurs, note-t-il, « doivent faire attention à ce que leur discours ne dégénère pas en incitation à la haine ou en menace de violence ». La participation du Conseil d’éducation communautaire a été légale, elle aussi, continue-t-il.
Les enseignants doivent se concentrer sur la sécurité des élèves pendant les rassemblements, poursuit-il, ajoutant que les professeurs qui ont manifesté pendant les heures de cours sont passibles de mesure disciplinaires. Il est difficile de dire si des éducateurs du secteur public ont participé au mouvement de protestation.
Le rabbin Yossi Schwartz, directeur de la Jewish Student Union, un mouvement de jeunesse qui est rattaché à l’Orthodox Union, à New York, a indiqué que l’organisation était aux prises avec l’antisémitisme qui sévit dans les lycées depuis le 7 octobre. Le groupe gère des clubs dont l’objectif est de renforcer l’identité juive et le lien entretenu avec Israël dans environ 30 écoles publiques de New York City et de Long Island, et il a une branche également à Westchester.
« Je pense que tout le monde savait ce qui était en train de se passer dans les universités mais le fait de retrouver l’antisémitisme jusque dans les couloirs des lycées, je pense que c’est choquant », commente Schwartz, qui déclare que l’organisation a enregistré cinq incidents antijuifs dans des écoles publiques de New York City, la semaine dernière.