Israël en guerre - Jour 490

Rechercher

Abe Foxman critique la réponse molle de l’ADL suite au meeting de Trump au Madison Square Garden

Suite à la déclaration "étrange" de l'ADL qui se garde bien de nommer Trump, Foxman estime que des organisations juives américaines craignent de froisser l'ex-président

L'ex-président américain Donald Trump s'exprime lors d'un meeting de campagne au Madison Square Garden, le 27 octobre 2024, à New York. (Crédit : AP Photo/Julia Demaree Nikhinson)
L'ex-président américain Donald Trump s'exprime lors d'un meeting de campagne au Madison Square Garden, le 27 octobre 2024, à New York. (Crédit : AP Photo/Julia Demaree Nikhinson)

JTA – Lorsque Jonathan Greenblatt a utilisé son statut de PDG de l’Anti-Defamation League, lundi, pour dénoncer le sectarisme, son prédécesseur de longue date à la tête de l’ADL, Abe Foxman, en a pris bonne note – de ce qu’il avait dit, mais surtout de ce qu’il n’avait pas dit.

Sur X, Greenblatt s’est joint aux voix qui ont condamné un commentateur conservateur ayant laissé entendre à l’antenne qu’un autre invité d’une émission de CNN était membre du Hezbollah.

Greenblatt n’a en revanche rien dit du sujet qui a largement occupé la journée, à savoir le meeting de campagne de Donald Trump au Madison Square Garden, que beaucoup, Foxman le premier, ont qualifié d’antisémite, raciste, xénophobe et misogyne.

« J’hésite à critiquer mon successeur, mais il s’en est pris à ce type sur CNN hier et n’a pas dit un mot sur Trump, c’est un peu bizarre », a déclaré à la Jewish Telegraphic Agency celui qui a dirigé l’ADL pendant des dizaines d’années et soutient la candidate démocrate Kamala Harris.

Foxman a comparé Greenblatt à Jeff Bezos, patron d’Amazon et propriétaire du Washington Post, lequel a annoncé la semaine dernière qu’il ne prendrait pas position pour cette élection présidentielle.

La décision, prise par Bezos, est en rupture avec un précédent vieux de plusieurs dizaines d’années : elle a été interprétée par beaucoup comme motivée par la peur de contrarier Trump.

« C’est le même syndrome, il n’y a pas que le syndrome de Stockholm – appelez-le syndrome du Washington Post », a dit Foxman.

Abraham Foxman, directeur national émérite de l’Anti-Defamation League, s’exprimant lors du 8e sommet annuel de l’Israeli American Council à Austin, au Texas, le 20 janvier 2023. (Crédit : David Finkel)

Foxman a étendu sa critique à plusieurs grandes organisations juives américaines qui, selon lui, ont manqué à leur devoir en s’abstenant de parler du meeting de Trump.

« Il n’y a aucun doute là-dessus : pour l’American Jewish Committee, l’ADL, la Conférence des présidents, les fédérations, toutes ces institutions. Si cela s’était passé il y a six mois, elles auraient toutes condamné le racisme, l’antisémitisme et les discours de haine », a-t-il déclaré.

« Je ne peux pas m’empêcher de me sentir troublé. »

Foxman a ainsi mis le doigt sur le difficile équilibre à trouver par les organisations juives apolitiques au moment de chaque élection. Si les missions sont inchangées, la montée des tensions fait que certaines actions ou déclarations peuvent paraître partisanes.

Par ailleurs, cette année, se trouve en lice un ex-président qui ne passe rien à ses détracteurs et s’est même promis d’utiliser sa présidence, s’il gagne, pour se venger d’eux. Il a en outre ajouté que, s’il perdait les élections, les Juifs qui n’auraient pas voté pour lui en seraient responsables.

L’ADL a donc réagi au meeting de Trump par une déclaration publiée sur le compte officiel de l’organisation qui ne cite ni Trump ni le Parti républicain.

« Les meetings politiques devraient porter sur la politique, rien que la politique, pas sur des blagues blessantes qui dénigrent les Juifs, les Palestiniens, les Portoricains ou d’autres groupes marginalisés », a déclaré l’ADL dans un message lundi matin.

« Au moment où la haine est partout et les tensions on ne peut plus vives, il n’y a pas de place pour le sectarisme ou l’intolérance durant la campagne électorale, un point c’est tout. Nous attendons plus et espérons mieux en ces derniers jours avant les élections », a-t-il ajouté.

Un haut responsable de l’administration Biden s’est dit surpris que l’ADL se contente d’un tweet qui ne cite pas nommément Trump.

« Ceux qui, au sein de l’administration Biden, comprennent que des organisations comme l’ADL ne souhaitent pas soutenir ouvertement des candidats, pensent que, face au genre d’événement qui a eu lieu il y a de cela quelques jours, une respectable organisation comme l’ADL aurait dû faire un commentaire », confie ce responsable, qui a demandé à rester anonyme afin de parler avec franchise.

« Ils font mine d’ignorer qu’il ne s’agit pas d’un événement lambda de faible ampleur mais d’un meeting de campagne de Trump au Madison Square Garden devant des milliers de personnes », ajoute-t-il. « La pire chose qu’ait fait l’ADL – pire que son absence de réaction – c’est la teneur de ses propos. »

A quoi sert l’ADL si ce n’est à condamner ce qui est condamnable quand cela arrive ?

Selon le porte-parole de l’ADL, la cible du tweet est on ne peut plus claire, ce dernier pointant sur un article du Washington Post consacré au meeting.

« L’ADL a clairement condamné le meeting de Trump au Madison Square Garden ainsi que les propos antisémites, racistes et sectaires qui l’ont émaillé », a expliqué le porte-parole à la JTA.

La décision de l’ADL de ne pas citer nommément Trump s’est attirée la dérision d’organisations juives et de personnalités de gauche.

« Eh l’ADL – c’était un meeting de Trump », a réagi Randi Weingarten, présidente de la Fédération américaine des enseignants qui a occupé des postes de direction laïcs dans un certain nombre d’organisations juives libérales.

« Chers ADL et @JGreenblattADL, nous sommes prêts à vous aider, pour 100 millions de dollars, à identifier ‘la campagne’ », a offert Bend the Arc : Jewish Action, organisation dédiée à la justice sociale qui soutient Harris.

Elon Musk et l’ex-Première dame des États-Unis, Melania Trump, écoutent le candidat républicain à la présidence, l’ex-président américain Donald Trump, lors d’un meeting de campagne au Madison Square Garden, le 27 octobre 2024, à New York. (Crédit : AP Photo/Alex Brandon)

Ces réactions à l’ADL soulignent la manière dont son attitude envers Trump et le sectarisme de droite a évolué ces toutes dernières années.

Avant et pendant la présidence de Trump, l’ADL avait été l’une des voix les plus promptes à le défier, ce qu’elle avait fait en demandant sa destitution suite aux émeutes du Capitole américain le 6 janvier 2021, destinées à s’opposer à sa défaite électorale.

La relation de l’ADL avec Elon Musk, personne la plus riche au monde, propriétaire de la plate-forme de réseaux sociaux X et aujourd’hui l’un des plus importants bienfaiteurs et partisans de Trump, a également changé.

L’organisation continue malgré tout de se montrer critique envers Tucker Carlson, l’ex-animateur de Fox News qui a récemment invité un négationniste de la Shoah lors de son talk-show sur X et a pris la parole lors du meeting au Madison Square Garden, sans lui non plus être nommé par l’ADL.

Ces changements ont eu lieu au moment où s’est confirmée l’hypothèse d’un retour de Trump, suite à sa défaite de 2020 et aux émeutes de 2021, moment auquel Greenblatt a lui-même opéré un repositionnement lors de ses prises de parole publiques au sujet des menaces pesant sur les Juifs. Greenblatt a ainsi dit en 2022 que l’opposition anti-Israël de la « gauche radicale » était le « négatif » de l’antisémitisme d’extrême droite.

Ces changements se aussi fait jour au moment où certains Juifs américains se sentaient rejetés par la gauche, suite à l’attaque du 7 octobre 2023 contre Israël et à la guerre qui s’en est suivie à Gaza, qui s’est accompagnée d’une forte résurgence de l’antisémitisme un peu partout dans le monde.

Jonathan Greenblatt, directeur général de l’Anti-Defamation League, lors de la conférence « Never is Now », à New York, le 5 mars 2024. (Crédit : Autorisation)

Le milliardaire Daniel Lubetzky, un des 22 membres du conseil d’administration de l’ADL, est un parfait témoin de ces changements. En 2020, peu de temps après avoir rejoint le conseil d’administration, il avait invité les modérés politiques à soutenir, comme lui, le démocrate Joe Biden. Mardi, en pleine tourmente médiatique autour de l’ADL, il a déclaré qu’il ne soutenait aucun des candidats et a publié une vidéo de Batya Ungar-Sargon, expert juif et opposant autoproclamé au « mouvement woke », expliquant en quoi Trump était le meilleur choix pour les Juifs et les critiques de son discours, malavisées.

D’autres membres du conseil d’administration de l’ADL soutiennent publiquement Harris.

Foxman et les organisations auxquelles il reproche de ne pas oser critiquer Trump se trouvent de part et d’autre de l’échiquier politique, autour d’un débat qui agite les dirigeants d’organisations juives. À l’approche des élections, nombre d’organisations juives communautaires se montrent traditionnellement réticentes à faire quoi que ce soit qui puisse paraître partisan.

Le porte-parole des Jewish Federations of Northern America, organisation représentant 400 organisations communautaires juives, ne pourrait pas se montrer plus prudent dans son commentaire à la JTA.

« Il est extrêmement important pour la communauté juive de travailler de manière bipartisane et d’entretenir de bonnes relations avec tous, quel que soit le parti qui contrôle la Maison Blanche, le Sénat ou la Chambre », a expliqué le porte-parole.

« À l’approche de l’élection, nous pensons qu’il est important de ne pas donner le sentiment d’appuyer l’un ou l’autre candidat et de laisser les gens faire leur choix dans les urnes. »

Interrogée, l’AJC a déclaré qu’il lui était impossible, en sa qualité d’organisation à but non lucratif, de soutenir des candidats ou des partis politiques et a publié une phrase pour dire que Trump et d’autres dirigeants républicains s’étaient désolidarisés des propos injurieux tenus lors du meeting.

« Il est important que l’équipe de campagne de Trump et de nombreux membres de la direction du Parti républicain aient désavoué le discours offensant et clivant de certains des orateurs du meeting de ce dimanche », a déclaré un porte-parole de l’AJC.

Certains organisations juives apolitiques, mais de sensibilité de gauche, font un calcul différent et affirment qu’il est de leur devoir de dénoncer l’antisémitisme et qu’il n’est pas souhaitable de renoncer à s’exprimer, fût-ce au risque d’être perçu comme d’un bord ou de l’autre de l’échiquier politique.

Figurent parmi les dirigeants communautaires juifs qui ont publiquement condamné le discours de campagne de Trump Jill Jacobs, PDG de Truah, Jeremy Ben-Ami, président de J Street, Jonah Pesner, directeur du Centre d’action religieuse du judaïsme réformé ou encore Amy Spitalnick, directrice générale du Conseil juif pour les affaires publiques.

« Il nous faut dénoncer l’antisémitisme, la haine et l’extrémisme, là où ils se trouvent et d’où qu’ils viennent », a déclaré Spitalnick à la JTA.

« Si un candidat démocrate à la présidence faisait la même chose, nous le dénoncerions de la même manière. »

En savoir plus sur :
S'inscrire ou se connecter
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
Se connecter avec
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation
S'inscrire pour continuer
Se connecter avec
Se connecter pour continuer
S'inscrire ou se connecter
Se connecter avec
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un email à gal@rgbmedia.org.
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.
image
Inscrivez-vous gratuitement
et continuez votre lecture
L'inscription vous permet également de commenter les articles et nous aide à améliorer votre expérience. Cela ne prend que quelques secondes.
Déjà inscrit ? Entrez votre email pour vous connecter.
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
SE CONNECTER AVEC
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation. Une fois inscrit, vous recevrez gratuitement notre Une du Jour.
Register to continue
SE CONNECTER AVEC
Log in to continue
Connectez-vous ou inscrivez-vous
SE CONNECTER AVEC
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un e-mail à .
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.