Abu Ghosh, ville arabe connue pour ses relations chaleureuses au sionisme, accueillera le centre Yasser Arafat
La première pierre sera posée mercredi ; Munib al-Masri, milliardaire palestinien pro-paix et ancien ministre d’Arafat, serait à l'origine de l’initiative
Dov Lieber est le correspondant aux Affaires arabes du Times of Israël

La ville arabe israélienne d’Abu Ghosh, connue pour son histoire de relations amicales avec les juifs et le sionisme, va commencer mercredi la construction d’un centre culturel en l’honneur d’une figure palestinienne révérée par les arabes mais très impopulaire chez la plupart des juifs, Yasser Arafat.
Située à 10 kilomètres à l’ouest de Jérusalem, comptant environ 7 000 habitants, Abu Ghosh est bien connue pour ses belles églises, ses festivals de musique classique, ses restaurants de houmous, sa toute nouvelle et immense mosquée, et ses relations amicales uniques avec la population majoritaire juive de ses environs.
Mercredi, une grande cérémonie est prévue dans la ville pour célébrer la pose de la première pierre d’un centre culturel en l’honneur d’Arafat, le défunt chef de l’OLP [Organisation de libération de la Palestine] et lauréat du prix Nobel de la Paix.
Arafat, mort en 2004, reste un personnage vénéré par les Palestiniens, mais est vu par beaucoup en Israël comme un terroriste non repenti qui a condamné la tentative de paix de Camp David en 2000, orchestré les attentats-suicides de la Deuxième Intifada qui s’en est suivie, et disséminé un narratif toujours prévalent chez les Palestiniens, qui nie l’histoire et la légitimité juives en Terre Sainte.
Le communiqué de presse pour l’évènement de mercredi, envoyé par le Fonds de dotation de Jérusalem, une organisation qui dit travailler au renforcement des domaines économiques et pédagogiques pour les Palestiniens de Jérusalem, et de l’identité arabe de la ville, affirme qu’Abu Ghosh a été choisie pour commémorer l’héritage d’Arafat en raison de sa constance contre « l’occupation » israélienne.
« Abu Ghosh est une ville qui a survécu à la Nakba [catastrophe] », est-il écrit dans le communiqué de presse, faisait référence à la défaite puis aux déplacements de centaines de milliers d’arabes de la guerre de 1948 dans laquelle Israël a gagné son indépendance.
Abu Ghosh, qui a choisi de rester neutre pendant la guerre de 1948 et n’a par conséquent pas été touchée par l’armée d’Israël, est décrite dans le communiqué de presse comme un symbole d’unité et de fermeté pour le mouvement national palestinien et sa future capitale désirée, Jérusalem.
Le centre culturel est apparemment une initiative du milliardaire palestinien et magnat de l’énergie Munib al-Masri, qui est le président du Fonds de dotation de Jérusalem. Selon un reportage diffusé le 1er mai par la Dixième chaîne israélienne, le centre devrait servir comme « centre de l’héritage culturel d’Arafat ».
Masri a été un fervent défenseur d’une solution à deux états, a dénoncé la violence et a été très critiqué par le mouvement de boycott palestinien pour essayer d’améliorer les relations entre les deux parties, notamment en rencontrant l’homme d’affaires israélien Rami Levy dans l’un des supermarchés de ce dernier en Cisjordanie pour discuter de l’Initiative de paix arabe en août 2012.
Et pourtant Masri, connu sous le surnom de Duc de Naplouse, reste un admirateur indéfectible d’Arafat, qu’il a servi comme ministre et confident proche.
Dans une colonne publiée par le Times of Israël en 2014, intitulée
« Comme Arafat, je reconnais la relation juive à Israël », il décrivait la relation de l’ancien chef de l’OLP aux Israéliens et au peuple juif comme « complexe », mais disait qu’il était d’accord « de tout son cœur » avec l’approche d’Arafat.
Quand Masri a été interrogé au sujet du centre culturel par le Times of Israël, il a déclaré que ce n’était « pas vos affaires l’endroit où je construis », et a refusé de répondre aux questions à ce sujet par téléphone.
Samedi, l’homme d’affaires palestinien a visité Abu Ghosh et a rencontré un certain nombre d’officiels locaux. La rencontre a été documentée par un post Facebook publié par une source locale d’informations.
La veille, le Fonds de dotation de Jérusalem de Masri avait parrainé une rencontre dans la capitale sur le renforcement de la coopération entre Arabes en Israël et Arabes dans les Territoires palestiniens, à laquelle assistait Masri lui-même, le maire d’Abu Ghosh Issa Abu Ghosh, des dirigeants palestiniens et arabes israéliens et des dignitaires étrangers.
Selon le site d’informations palestinien Knooznet.com, le directeur du Haut Comité de suivi pour les Arabes en Israël Mohammad Barakeh ; le député de la Liste arabe unie Ossama Saadi ; l’ancien maire de Nazareth Ramez Jaraisy ; le président de la Chambre du commerce et de l’industrie dans les Territoires palestiniens Omer Saleh ; le Consul général de France Hervé Magro et le vice-consul général de Turquie Hossam El Din Arslan étaient présents à cette réunion.
Dans un entretien avec Knooznet.com, Barakeh a déclaré que l’objectif de la rencontre était de « trouver des moyens d’approfondir le travail entre Palestiniens au sein d’Israël et la ville de Jérusalem dans les domaines économique, culturel, social et pédagogique, la préservation des lieux saints, et le développement de projets pratiques pour l’avancement du statut de Jérusalem, à l’ombre de la prévention par Israël pour notre peuple d’atteindre la ville depuis la Cisjordanie ou la bande de Gaza. »
Abu Ghosh n’est pas étranger aux grands projets financés par des donateurs extérieurs et qui défient le statu quo.
La petite ville, où la religion ne jouait qu’un rôle public mineur jusqu’à une période relativement récente, accueille à présent la deuxième plus grande mosquée d’Israël, connue comme la « mosquée de la Paix ».
La mosquée, qui a été inaugurée en mars 2014, a été principalement payée par le gouvernement de Tchétchénie, qui a contribué à hauteur de six millions de dollars pour un coût total de dix millions.
Seule la mosquée Al-Aqsa de Jérusalem est plus grande. Les 3 480 m² de terrain sur lesquels a été construit le bâtiment de prières ont été donnés par l’Administration des terrains d’Israël.
Les quatre clans qui dominent la population d’Abu Ghosh sont originaires du Caucase, dont ils affirment avoir émigré au 16e siècle.
* Cet article a été mis à jour le 2 mai, une phrase précédente sur l’objectif du centre a été remplacée par une référence à un reportage de la Dixième chaîne sur cet objectif.
Elhanan Miller a contribué à cet article.