Au Congrès, Ilhan Omar expulsée d’une importante commission
Kevin McCarthy avait promis d'exclure la démocrate controversée après les expulsions de Marjorie Taylor Greene et Paul Gosar
La Chambre américaine des représentants a adopté jeudi une motion pour expulser l’élue démocrate controversée Ilhan Omar d’une puissante commission, les républicains l’accusant d’avoir proféré des remarques antisémites par le passé, tandis que les démocrates estiment que la décision intervient en représailles à d’autres expulsions lors de la précédente législature.
Ilhan Omar est la troisième élue démocrate à être dépouillée de son siège dans une commission parlementaire par les républicains cette année. Dépossédée de son rôle à la commission des Affaires étrangères, cette ancienne réfugiée provenant de Somalie est accusée d’avoir émis plusieurs commentaires critiques d’Israël depuis 2012 – des propos condamnés au sein des deux partis, mais pas par la Brigade, dont fait partie Omar.
« Je suis musulmane, je suis une immigrée et, comme par hasard, je viens d’Afrique », a déclaré l’élue de l’aile progressiste controversée du parti, lors d’un discours dans l’hémicycle du Congrès, avant le vote, demandant si « quiconque était surpris » qu’elle soit prise pour cible.
L’expulsion de certains élus démocrates de commissions parlementaires était une promesse de Kevin McCarthy lors de sa campagne pour devenir le nouveau « speaker » de la Chambre des représentants.
Selon le républicain, les démocrates ont créé une « nouvelle norme » lorsqu’ils avaient le contrôle du Congrès en expulsant les très controversés Marjorie Taylor Greene et Paul Gosar de certaines commissions, les accusant d’avoir appelé à la violence contre leurs opposants politiques.
Or plusieurs groupes juifs, et notamment la branche activiste du mouvement Réformé, avaient dénoncé des propos tenus par McCarthy sur Omar. Le ton du courrier qui avait été diffusé en décembre dernier était inhabituellement combatif pour des ONGs juives et il laissait entendre que McCarthy lui-même a davantage flirté avec l’antisémitisme que cela n’a été le cas d’Omar.
« En tant qu’organisations juives américaines, nous nous opposons à la promesse faite par Kevin Mc Carthy de priver la représentante Ilhan Omar de son siège à la Commission des affaires étrangères de la Chambre sur la base d’accusations mensongères qui ont laissé entendre qu’elle serait antisémite ou anti-israélienne », notait la missive. « Nous pouvons nous-mêmes être en désaccord avec les opinions de la membre du Congrès Omar, mais nous rejetons de manière catégorique l’idée que ses positionnements ou ses déclarations politiques quelles qu’elles soient justifient que sa présence au sein de la commission soit disqualifiée ».
« La promesse faite par le président McCarthy [d’écarter Omar] semble être particulièrement abusive au vu de la promotion endémique des tropes antisémites et des théories du complot qui est faite par lui-même et par les plus importants députés du parti républicain, dans un contexte de recrudescence d’une haine antijuive dangereuse à la droite de l’échiquier politique, » poursuivait la lettre.
« Il a lui-même posté (et supprimé plus tard) une publication, sur Twitter, qui accusait George Soros et d’autres milliardaires d’origine juive de chercher à ‘acheter’ une élection. Son nouveau président Tom Emmer [du Minnesota] a déclaré que ces mêmes personnalités ‘ont, en fait, acheté le contrôle du congrès’. Pendant ce temps, la présidente de la Conférence républicaine Elise Stefanik [de New York] a promu la théorie du complot meurtrière et antisémite ‘du grand remplacement’. », lisait-on dans la note.
Omar a réclamé que le Congrès puisse davantage superviser la relation entre les États-Unis et Israël. Elle s’en est prise à certains groupes du lobby pro-israélien, semblant parfois reprendre à son compte des tropes antisémites portant sur le contrôle juif, et elle a été accusée de haine anti-juive par certaines organisations juives, par les républicains et par certains démocrates (Omar a ensuite présenté ses excuses pour certains des propos qu’elle avait tenus, mais pas tous). Elle soutient le mouvement de boycott d’Israël. Elle avait affirmé qu’Israël avait « hypnotisé le monde », et demandé à ce que les gens ouvrent les yeux sur les « méfaits » de l’allié des Etats-Unis.
L’élue du Minnesota (nord des Etats-Unis) a depuis assuré qu’elle n’était pas au courant à l’époque que ses remarques jouaient sur des stéréotypes antisémites, notamment ceux liant les Juifs à l’argent.
Selon le chef des démocrates à la Chambre, Hakeem Jeffries, les remarques d’Ilhan Omar avaient déjà fait l’objet des procédures disciplinaires appropriées. « C’est une vengeance politique », a-t-il affirmé.
Dans l’un des tweets les plus controversés, Omar avait ainsi dit que le soutien apporté par McCarthy à l’État juif « est une histoire de Benjamins » – un mot en argot désignant les billets de cent dollars. Elle avait présenté ultérieurement ses excuses. Omar avait aussi dit que McCarthy était « un menteur et un lâche », l’année dernière, quand il s’était refusé à sanctionner Lauren Boebert, membre républicaine du Congrès représentant le Colorado, qui avait estimé qu’Omar faisait partie « d’un commando djihadiste » et qui avait ajouté en plaisantant qu’elle craignait qu’Omar, musulmane d’origine somalienne, ne transporte sur elle une bombe.