USA: Les groupes juifs libéraux fustigent les propos de McCarthy sur Ilhan Omar
Le républicain de Californie dont la formation a remporté la majorité à la Chambre, a promis d'exclure la démocrate du Minnesota, pour des déclarations qualifiées d'antisémites
WASHINGTON (JTA) — Plusieurs groupes juifs, et notamment la branche activiste du mouvement Réformé, ont dénoncé les propos tenus par le probable futur président républicain de la Chambre, Kevin McCarthy, qui a promis d’exclure Ilhan Omar, représentante démocrate du Minnesota, pour des déclarations passées qu’il a qualifiées d’antisémites.
Le ton du courrier qui a été diffusé lundi est inhabituellement combatif pour des ONGs juives et il laisse entendre que McCarthy lui-même a davantage flirté avec l’antisémitisme que cela n’a été le cas d’Omar.
McCarthy, républicain de Californie dont la formation a remporté de justesse la majorité à la Chambre des Représentants lors des élections du mois dernier, a promis de faire exclure Omar en raison de paroles qu’elle avait pu prononcer et qui, selon les critiques, reprenaient des tropes anti-juifs sur le pouvoir caché et excessif des Juifs. Elle s’est depuis excusée pour une partie des propos tenus, mais pas pour tous.
En plus du Religious Action Center du mouvement réformé, le communiqué a été signé par les groupes Americans for Peace Now, J Street et Ameinu, trois organisations juives, libérales et politiques dont les activités sont consacrées au Moyen-Orient ; par le mouvement Habonim Dror ; par le New Israel Fund qui travaille à collecter des fonds pour les groupes issus de la société civile en Israël et par Truah, un groupe de défense des droits de l’Homme rabbinique.
« En tant qu’organisations juives américaines, nous nous opposons à la promesse faite par Kevin Mc Carthy de priver la représentante Ilhan Omar de son siège à la Commission des affaires étrangères de la Chambre sur la base d’accusations mensongères qui ont laissé entendre qu’elle serait antisémite ou anti-israélienne », a noté la missive. « Nous pouvons nous-mêmes être en désaccord avec les opinions de la membre du Congrès Omar, mais nous rejetons de manière catégorique l’idée que ses positionnements ou ses déclarations politiques quelles qu’elles soient justifient que sa présence au sein de la commission soit disqualifiée ».
McCarthy a aussi indiqué qu’il exclurait de la Commission des renseignements Adam Schiff et Eric Swalwell, des représentants démocrates de Californie. Les deux hommes ont dirigé les investigations lancées sur les irrégularités présumées dont l’ex-président américain Donald Trump se serait rendu coupable. Schiff, qui est Juif, est actuellement à la tête de la Commission des renseignements et il assume un rôle important dans l’enquête ouverte sur la prise d’assaut du Capitole qui avait eu lieu le 6 janvier 2021, qui avait été entraînée par les mensonges proférés par Trump suite aux résultats des élections de 2020.
McCarthy a expliqué que les démocrates avaient établi un précédent en 2021 quand ils avaient voté l’exclusion des Commissions de la représentante républicaine de Géorgie, Marjorie Taylor Greene. Lors d’une initiative rare, en 2021, les Démocrates, qui contrôlaient la chambre, avaient écarté Greene des Commissions où elle siégeait en partie parce qu’elle avait soutenu, dans le passé, QAnon, un mouvement complotiste qui a entraîné des violences.
Le courrier émis par les groupes juifs a estimé que McCarthy s’en prenait à Omar, à Swalwell et à Schiff pour détourner l’attention de la haine antijuive qu’il y a au sein du parti républicain.
« La promesse faite par le président McCarthy semble être particulièrement abusive au vu de la promotion endémique des tropes antisémites et des théories du complot qui est faite par lui-même et par les plus importants députés du parti républicain, dans un contexte de recrudescence d’une haine antijuive dangereuse à la droite de l’échiquier politique », a-t-il continué.
« Il a lui-même posté (et supprimé plus tard) une publication, sur Twitter, qui accusait George Soros et d’autres milliardaires d’origine juive de chercher à ‘acheter’ une élection. Son nouveau président Tom Emmer [du Minnesota] a déclaré que ces mêmes personnalités ‘ont, en fait, acheté le contrôle du congrès’. Pendant ce temps, la présidente de la Conférence républicaine Elise Stefanik [de New York] a promu la théorie du complot meurtrière et antisémite ‘du grand remplacement’. »
Cette lettre a été écrite à l’initiative de J Street et d’Americans for Peace Now. L’APN, Ameinu et le mouvement réformé font tous partie de la CoP (Conference of Presidents of Major American Jewish Organizations).
L’élection de McCarthy au poste de président n’est pas encore garantie. En effet, un groupe de membres d’extrême-droite de son caucus a annoncé qu’il s’opposerait à lui. Si ce groupe est d’une taille modeste, il compte pourtant suffisamment de membres pour l’empêcher de prendre la présidence d’une Chambre qui n’est dirigée par les républicains qu’avec cinq votes d’avance.
Omar a réclamé que le Congrès puisse davantage superviser la relation entre les États-Unis et Israël. Elle s’en est pris à certains groupes du lobby pro-israélien, semblant parfois reprendre à son compte des tropes antisémites portant sur le contrôle juif, et elle a été accusée de haine antijuive par certaines organisations juives, par les républicains et par certains démocrates (Omar a ensuite présenté ses excuses pour certains des propos qu’elle avait tenus, mais pas tous). Elle soutient le mouvement de boycott d’Israël.
Dans l’un des tweets les plus controversés, Omar avait ainsi dit que le soutien apporté par McCarthy à l’État juif « est une histoire de Benjamins » – un mot en argot désignant les billets de cent dollars. Elle avait présenté ultérieurement ses excuses. Omar avait aussi dit que McCarthy était « un menteur et un lâche », l’année dernière, quand il s’était refusé à sanctionner Lauren Boebert, membre républicaine du Congrès représentant le Colorado, qui avait estimé qu’Omar faisait partie « d’un commando djihadiste » et qui avait ajouté en plaisantant qu’elle craignait qu’Omar, musulmane d’origine somalienne, ne transporte sur elle une bombe.
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.