Baharav-Miara fustige la loi renforçant l’autorité de Ben Gvir sur la police
Si la procureure-générale ne réclamera pas son abrogation, elle a précisé que le texte pourrait politiser les forces de l'ordre et nuire aux libertés publiques
La procureure-générale Gali Baharav-Miara a déclaré, mercredi, qu’une loi adoptée par la coalition qui a élargi l’autorité du ministre d’extrême-droite de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, sur la police israélienne risquait de politiser les forces de l’ordre et de porter atteinte aux libertés publiques. Elle n’a toutefois pas recommandé à la Haute-cour d’invalider la législation.
« L’amendement à la loi se référant aux pouvoirs du ministre est formulé en termes vagues et il n’établit pas clairement l’équilibre des pouvoirs qui pourrait garantir que la police conservera son indépendance. Il y a de réelles inquiétudes concernant d’éventuelles influences étrangères sur les actions des forces de police et sur une possible politisation de ces dernières », a écrit Baharav-Miara dans sa réponse officielle à une requête déposée auprès de la Haute-cour qui visait une législation adoptée au mois de décembre. Le texte accordait à Ben Gvir un pouvoir sans précédent sur les forces de l’ordre dans le cadre de son ministère de la Sécurité nationale, ex-ministère de la Sécurité intérieure.
Baharav-Miara a réaffirmé que le projet de loi avait été approuvé trop rapidement, de manière déséquilibrée, et qu’il ne précisait pas clairement que les opérations de la police continueraient à avoir lieu sans aucune influence politique à l’avenir.
Mais si la procureure-générale a recommandé que la législation soit clarifiée, elle a indiqué qu’elle ne méritait pas d’être rejetée et elle a recommandé que la Haute-cour se prononce en défaveur des requêtes soumises contre la loi, dans la mesure où cette dernière pouvait encore être interprétée comme s’opposant à toute politisation des forces de police.
Des requêtes contre le texte de loi de la coalition avaient été déposées au début de l’année par des groupes issus de la société civile, notamment par le Mouvement pour un gouvernement de qualité en Israël et par l’Association de défense des droits civils en Israël, qui avaient affirmé qu’accorder à Ben Gvir le contrôle « des politiques de la police et des principes généraux de ses activités entrave, de manière inconstitutionnelle, la liberté de manifester et la liberté d’expression, et inféode les forces de l’ordre à une entité politique ».
Ben Gvir et Baharav-Miara se sont querellés de manière répétée depuis la fin de l’année 2022, et le ministre a appelé ouvertement à son renvoi à plusieurs reprises.
Au mois de décembre, elle avait appelé la Haute-cour de justice à rejeter la requête, selon elle « prématurée », qui avait été soumise par l’organisation Tag Meir, un groupe qui défend la coexistence, appelant ce que la nomination de Ben Gvir au poste de ministre de la Sécurité nationale soit invalidée.
Au mois de mars, Baharav-Miara avait apporté son soutien à un jugement de la Haute-cour qui disait qu’il serait interdit à Ben Gvir de donner des ordres de type opérationnels à la police concernant sa prise en charge des manifestations et son utilisation de la force, pendant le mouvement de protestation contre la réforme du système judiciaire israélien avancée par le gouvernement.
Un soutien apporté après que le blocage, par la procureure-générale, d’une initiative controversée prise par Ben Gvir qui avait voulu limoger le commandant de la police du district de Tel Aviv, Amichai Eshed, de son poste. Elle avait alors estimé que Ben Gvir avait pu « franchir les limites » dans ses interventions dans les affaires des forces de l’ordre et dans leurs opérations, et qu’il devrait dorénavant s’abstenir de donner des instructions opérationnelles aux agents « sous couvert de directives politiques présumées ».
Ben Gvir avait commencé à demander à Baharav-Miara qu’elle l’autorise à faire appel aux services d’un avocat privé – ou à le laisser se représenter lui-même – dans les procédures lancées à son encontre devant la Haute cour, des procédures relatives à son statut de ministre. Il avait affirmé que les positionnements que la procureure-générale avait pu adopter contre une législation qui avait été avancée par sa faction d’extrême-droite, Otzma Yehudit, étaient la preuve qu’il ne pouvait pas lui faire confiance s’agissant de le défendre devant les juges. Ses appels à renvoyer Baharav-Miara s’étaient alors intensifiés.
Répondant à l’avis juridique rendu mercredi par la procureure-générale, Ben Gvir a accusé cette dernière de tenter de vider la législation de la coalition de tout sens concernant son autorité sur les forces de l’ordre.
« C’est une nouvelle preuve claire de la nécessité d’une réforme profonde et minutieuse du système judiciaire, en particulier en ce qui concerne le rôle de la procureure-générale », a-t-il dit.