Bordeaux : La communauté juive commémore les 80 ans de la rafle du 10 janvier 1944
Un hommage aura lieu, ce mercredi à 18h, dans la synagogue de la ville, à ceux raflés au même endroit
Ce 10 janvier 2024 marque les 80 ans de la rafle des Juifs de Bordeaux. La communauté juive de la ville rendra ainsi hommage, ce mercredi à 18h, dans la synagogue de la ville, à ceux raflés au même endroit, et les noms des 365 personnes arrêtées les 10 et 11 janvier 1944 puis emmenées à Drancy seront lus.
La cérémonie sera suivie, à 19h30, d’une conférence publique à l’Espace Brets (36, cours Pasteur) avec Jean-Marie Matisson, l’un des premiers plaignants dans le procès Papon, qui présentera son livre Le procès Papon : quand la République juge l’État français.
Après plus de 500 arrestations dans toute la région Aquitaine le 10 janvier 1944 au soir et le lendemain matin, plus de 360 Juifs ont été enfermés dans la synagogue de Bordeaux puis envoyés au camp de Drancy avant d’être emmenés à Auschwitz.
Organisée par la préfecture de Gironde, son préfet Maurice Sabatier et son secrétaire général Maurice Papon, avec les forces de l’occupation nazie, la rafle a surtout touché des familles françaises, implantées depuis longtemps dans le territoire, alors que les Juifs étrangers avaient été déportés dès 1942.
La synagogue de la ville avait ainsi été transformée en prison pendant quelques jours, tandis que d’autres Juifs raflés ont été détenus à la prison de Libourne. D’autres personnes arrêtées ont été conduites directement à la gare, pour prendre le train pour Drancy.
Parmi la cinquantaine d’enfants présents enfermés dans la synagogue, se trouvait Boris Cyrulnik, alors âgé de six ans, qui deviendra auteur, neuropsychiatre et psychanalyste et qui sera présent à la cérémonie de ce mercredi – il avait déjà assisté à la cérémonie l’année dernière. Il a survécu à la rafle en se cachant dans l’édifice.
La synagogue avait été pillée par les nazis l’année précédent cette rafle. Ils avaient notamment volé des rouleaux de la Torah, abîmé le grand chandelier et détruit l’orgue – qui vient d’être rénové à l’identique et réinstallé en décembre 2023.
Après cette rafle, des politiques et des résistants ont à nouveau été enfermés dans la synagogue en juillet 1944, avant d’être emmenés dans les camps.
Sur les 1 665 Juifs déportés dans l’un des dix convois Bordeaux-Drancy pendant l’occupation, très peu ont survécu.
« On n’est pas à l’abri que ce genre d’événement se renouvelle. Ces gens étaient complètement intégrés, ils étaient dans nos écoles, occupaient des emplois similaires aux nôtres. Et ils ont disparu du jour au lendemain », a expliqué Erick Aouizerate, président du Consistoire de Bordeaux, à France 3 Régions. « Outre l’importance de transmettre la mémoire, il y a un rappel nécessaire au vu de la situation actuelle très particulière : il y a à la fois l’exportation d’un conflit qui entraîne des amalgames et un fond antisémite dont la recrudescence des actes connotés ne peuvent qu’attester de sa présence », a-t-il ajouté.
Avant la cérémonie ce mercredi à 18h dans la synagogue de Bordeaux, Boris Cyrulnik rencontrera des écoliers et participera à la pose de Stolpersteine rue de la Rousselle, en mémoire à ses parents.
La ville compte déjà 15 de ces pavés mémoriels en hommage à des victimes de la Shoah qui vivaient dans la ville.