Canada : une nouvelle loi fait du vandalisme contre les bâtiments juifs un crime de haine
La communauté juive a joué un rôle de premier plan dans la rédaction et l’adoption de cet amendement du code pénal

La Chambre des communes du Canada a adopté mercredi une loi qui élargit la définition des crimes de haine pour y inclure les actes de vandalisme contre toute propriété communautaire juive. Au Canada, ces crimes sont passibles de dix ans de prison.
Selon un récent rapport publié par B’nai Brith Canada, 2016 a été une année de record, avec une hausse de 26 % des actes antisémites par rapport à 2015.
Sur les 1 728 actes antisémites enregistrés en 2016, 158 (9 %) sont des actes de vandalisme, définis comme des graffitis, des croix gammées, des emblèmes ou des slogans racistes, ainsi que des dégâts causés à des objets religieux comme des mezouzahs, la profanation de cimetières et de synagogues, et des incendies volontaires.
La nouvelle loi amende le code pénal canadien en incluant la définition de « propriété religieuse » pour les centres communautaires juifs, les écoles juives, ou tout autre bâtiment ou institution associé de manière identifiable à la communauté juive.
Le code pénal affirmait précédemment que les « méfaits motivés par la haine » liés aux propriétés religieuses ne s’appliquaient qu’aux lieux de culte comme les synagogues, les églises, les temples et les mosquées. La nouvelle loi étend la définition de propriété religieuse pour inclure toutes les institutions associées avec une communauté identifiable et qui est principalement utilisée comme institution scolaire, pour des évènements administratifs, sociaux, culturels ou sportifs, ou comme résidence pour des personnes âgées.
Sur les 1 728 actes antisémites enregistrés en 2016, 158 (9 %) sont des actes de vandalisme
La loi protège les victimes de crimes liés à la propriété motivés par la haine fondée non seulement sur la religion, mais aussi sur la race, la couleur, l’origine ethnique ou nationale, le sexe, l’orientation sexuelle, et le handicap mental ou physique.
Un rapport de 2015 a cependant conclu que les Juifs canadiens étaient plus visés par des actes racistes que toutes les autres minorités religieuses du pays.
Selon le rapport sur l’antisémitisme publié par B’nai Brith Canada en 2016, 57 % des actes de vandalisme de 2016 ont été commis dans la province de l’Ontario, dont la plus grande ville, Toronto, accueille la plus grande communauté juive du Canada.
Steven Shulman, conseiller et directeur de campagne de la Fédération UJA du Grand Toronto, a dit au Times of Israël qu’il voit l’adoption de la nouvelle loi comme la prise d’une mesure proactive « pour préserver et promouvoir ce qui est spécial au Canada », à un moment où le racisme est en hausse dans le monde entier.
« C’est un symbole de l’importance que le pays accorde à l’harmonie et au respect mutuel »
Steven Shulman
« C’est un symbole de l’importance que le pays accorde à l’harmonie et au respect mutuel », a-t-il dit.
Le Centre pour Israël et les Affaires juives (CIJA), une branche des Fédérations juives du Canada, a beaucoup travaillé avec les députés de tous les partis et différents partenaires d’autres communautés pour promouvoir l’introduction et l’adoption de cette législation, pour combler une faille du code pénal.
Le projet de loi a été adopté mercredi à l’unanimité. Il avait initialement été rédigé par le député libéral Chandra Arya, Hindou né en Inde. Une version précédente de cette législation avait cependant été rédigée en 2005 par Richard Marceau, conseiller général du CIJA et conseiller du gouvernement, qui était alors député.

Plus récemment, le CIJA a mobilisé plus de 20 organisations religieuses et ethniques de toutes les communautés, et représentant notamment les chrétiens, les musulmans et les Sikhs, pour soutenir Arya. Le CIJA a également créé une action d’alerte, mobilisant les membres de la communauté juive et de plusieurs autres communautés pour qu’ils écrivent à leurs députés pour les encourager à soutenir le projet de loi.
« Cette action s’est faite avec le temps, et maintenant, nous en récoltons les fruits », a dit Marceau.
Cette loi vient trop tard pour s’appliquer au cas d’un adolescent qui a été jugé coupable de plusieurs graffitis retrouvés en novembre dernier à Ottawa. Pendant une semaine, l’adolescent avait peint croix gammées et messages antisémites sur deux synagogues et les murs de la maison d’un rabbin, qui sert également de centre de prière. Il a aussi vandalisé une mosquée, et une église dont le pasteur est noir.
Andrea Freedman, présidente et directrice exécutive de la Fédération juive d’Ottawa, a suivi de près l’affaire qui a secoué la communauté locale.
« La nouvelle loi est importante et est un progrès pratique, et cette affaire est un exemple de sa nécessité », a-t-elle dit.