Chikli s’en prend à nouveau à Soros malgré une rhétorique qualifiée d’antisémite
Le ministère des Affaires étrangères serait intervenu avant la visite au Canada du ministre de la Diaspora, Ottawa ayant déploré que Chikli ne verrait que des extrémistes de droite
Le ministre de la Diaspora Amichai Chikli a redoublé de critiques à l’égard de George Soros lundi, affirmant que le milliardaire juif avait largement nui à Israël – malgré de récentes critiques qui dénonçaient l’usage de cette rhétorique qui recourt à des tropes antisémites.
Des propos qui ont été tenus alors que, selon des informations, le ministère des Affaires étrangères a dû intervenir avant le déplacement de Chikli au Canada, la semaine prochaine, Ottawa ayant déploré de ne rencontrer que des représentants de l’extrême-droite israélienne pendant le séjour du ministre.
Chikli, dont le portefeuille ministériel englobe la lutte contre l’antisémitisme à l’étranger, a posté sur Twitter, lundi, la capture d’écran d’une Opinion écrite par Alan Dershowitz, un fervent soutien d’Israël, dans le Wall Street Journal, qui était intitulée « Elon Musk a raison au sujet de George Soros et il n’est pas antisémite ».
« Personne n’a fait plus pour nuire à l’image d’Israël dans le monde, et en particulier dans le mouvement dit progressiste, que George Soros. Merci au professeur Dershowitz qui n’a pas peur de dire cette vérité simple », a écrit Chikli sur le réseau social.
Chikli doit partir au Canada dans une semaine. Le ministre a été invité par le Caucus des Alliés d’Israël, une instance chrétienne dont le représentant au parlement est un député conservateur, Leslyn Lewis. Lewis est considéré comme une personnalité d’extrême-droite sur la scène politique canadienne.
Zman Yisrael, le site hébréophone du Times of Israel, a fait savoir lundi que des parlementaires canadiens étaient entrés en contact avec les diplomates israéliens pour exprimer leur mécontentement face au séjour prévu par le ministre de la Diaspora.
Ils ont déploré une visite qui n’a pas été organisée « conformément au protocole, sans invitation officielle de la part du ministre concerné et qui vient de surcroît en réponse à un événement lancé par une organisation de droite perçue comme extrémiste à nos yeux », dit un document interne qui a été envoyé à David Rott, directeur-général adjoint du bureau d’Amérique du nord au sein du ministère des Affaires étrangères.
Après cette intervention, Chikli a modifié son programme et il s’entretiendra avec des représentants canadiens mainstream également.
Musk avait créé la controverse la semaine dernière en écrivant dans un post que Soros « me rappelle Magneto », personnage malveillant de bande dessinée apparaissant dans la série X-Men de Marvel. Le personnage, comme Soros, est un survivant de la Shoah.
Il avait ajouté dans une autre publication : « Il veut éroder le tissu même de la civilisation. Soros hait l’humanité. »
L’ADL, d’autres organisations juives et le ministère des Affaires étrangères israélien avaient tous dénoncé une rhétorique susceptible d’attiser l’antisémitisme – même si le chef de la diplomatie israélienne, Eli Cohen, avait ultérieurement pris ses distances avec le jugement émis par le ministère. « Il n’y aura plus de publications sur Twitter telles que celle-ci », avait déclaré Cohen devant les caméras de la Quatorzième chaîne dans un rare exemple de ministre réfutant un communiqué de son propre ministère.
Chikli, membre du parti du Likud de droite du Premier ministre Benjamin Netanyahu, avait alors pris la défense de Musk en disant que « en tant que ministre d’Israël chargé de la lutte contre l’antisémitisme, je voudrais établir clairement que le gouvernement et que la vaste majorité des Israéliens considèrent Elon Musk comme un entrepreneur au talent époustouflant et comme un modèle ».
« Critiquer Soros – qui finance les organisations les plus hostiles au peuple juif et à l’État d’Israël – est tout sauf de l’antisémitisme, bien au contraire ! » avait écrit Chikli sur Twitter.
Cela fait longtemps que Soros, 92 ans, est la cible des conservateurs qui soutiennent des causes et des hommes politiques progressistes aux États-Unis et dans le monde entier. Depuis une dizaine d’années, certaines des attaques ont fait écho à des théories du complot antisémites, dépeignant Soros comme satanique, l’accusant de chercher à contrôler le monde et l’accusant à tort d’avoir aidé à perpétrer la Shoah plutôt que d’y avoir survécu dans son enfance.
L’envoyée spéciale américaine chargée de la lutte contre l’antisémitisme, Deborah Lipstadt, était intervenue dans le débat, vendredi, écrivant sur Twitter que « Indépendamment de ce que l’on pense de ce que fait ou pense George Soros, il est malhonnête de nier que de nombreuses attaques ad hominem contre lui reposent sur des tropes et un discours antisémites classiques ».
« Par le passé, les antisémites invoquaient la famille Rothschild pour justifier leur haine des Juifs. Aujourd’hui, c’est Soros qui sert de repoussoir », avait-elle déclaré.