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Comment une poignée de décrypteurs juifs ont aidé à gagner les Grandes Guerres

Une nouvelle exposition à Bletchley Park examine le rôle qu'a joué les décrypteurs pour ouvrir la voie à la victoire des Alliés

Une reproduction d'un appareil sans fil de l'exposition : « La route de Bletchley Park » le 29 juillet 2015 (Crédit : Shaun Armstrong)
Une reproduction d'un appareil sans fil de l'exposition : « La route de Bletchley Park » le 29 juillet 2015 (Crédit : Shaun Armstrong)

Buckinghamshire, Angleterre – En 1929, le secrétaire d’Etat américain, Henry Stimson, a inventé l’expression, qui est devenue immortelle, « Les gentlemen ne lisent pas le courrier des autres gentlemen ». Suivant ses propres préceptes, Stimson a fermé le bureau de cryptanalyse du Département d’Etat, le légendaire Black Chamber [chambre noire].

Heureusement pour l’issue de la Seconde Guerre mondiale, pour laquelle la cryptanalyse – le décryptage – a joué un rôle majeur, Stimson, qui a servi sous le président Herbert Hoover jusqu’en 1933, est plus tard revenu sur sa position.

Dans une nouvelle exposition fascinante, « The Road to Bletchley Park », qui a ouvert ses portes la semaine dernière par le prince Edward, le duc de Kent, au siège du décryptage de Grande-Bretagne, la route de la victoire des Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale est clairement montrée comme étant le résultat du travail effectué en Grande-Bretagne et en Amérique pendant la guerre de 1914-1918 au cours de laquelle les Juifs ont joué un rôle de précurseur.

Bletchley Park, en plein été, est magnifique, avec des pelouses vertes à perte de vue et son manoir, situé dans le Buckinghamshire à seulement 80 kilomètres au nord de Londres.

Le domaine de 581 hectares a été acheté par le baronnet juif, Sir Herbert Samuel Leon, en 1883.

Leon, qui faisait partie de la famille Montefiore, était un homme politique du Parti libéral qui a vécu à Bletchley avec sa famille jusqu’à sa mort en 1926. son épouse, Fanny, est restée sur jusqu’en 1938, quand une partie du site a été achetée par le Government Code and Cypher School (GCCS) et le Secret Intelligence Service britannique (SIS).

Bletchley est devenu le QG du décryptage en temps de guerre, et les estimations actuelles révèlent que le travail effectué là-bas a raccourci la Seconde Guerre mondiale d’au moins deux ans.

Grâce à 8 millions de livres de subvention, un énorme projet de restauration est en cours à Bletchley et il est possible pour les visiteurs de se promener autour de certaines des cabanes restaurées où le décodage et le décryptage ont eu lieu. Ils pourront aussi revoir les images et les sons que les habitants des années 1940 ont connu.

Prince-Édouard, le duc de Kent (deuxième à gauche) ouvre officiellement "The Road to Bletchley Park" escorté par l'ancien officier de renseignement Sir John Scarlett (extrême gauche), président du Bletchley Park Trust, le 29 juillet 2015. Vu ici , le bain dans lequel on décryptait ses meilleures idées (Crédit : Autorisation)
Prince-Édouard, le duc de Kent (deuxième à gauche) ouvre officiellement « The Road to Bletchley Park » escorté par l’ancien officier de renseignement Sir John Scarlett (extrême gauche), président du Bletchley Park Trust, le 29 juillet 2015. Vu ici , le bain dans lequel on décryptait ses meilleures idées (Crédit : Autorisation)

Un paysage sonore a été installé : lorsque l’on travers l’une des pelouses, il y a les acclamations et les résultats d’un match de baseball qui a eu lieu pendant la guerre – les Britanniques contre les Américains – lorsqu’un contingent américain est arrivé à Bletchley alors que les Etats-Unis entraient en guerre en 1941. « Allez, Yank ! » lance l’une des voix cachées dans les arbres.

Sur le panneau d’explication dans la Cabane 12, autrefois le fief personnel du décrypteur le plus célèbre des années 1940 de Bletchley, Alan Turing, quelques très rares « Feuilles Banbury », sont exposées. C’est une sorte de pochoir sur des cartes que la Cabane 8 utilisait pour s’aider à décrypter les messages chiffrés navals allemands sur des machines Enigma.

Lorsque deux cartes ont été superposées et que la lumière brillait à travers les trous pré-percés, les cryptographes savaient qu’il y avait une lettre qui était répétée dans le message.

L’équipe de restauration, qui a travaillé de 2013 à 2014, a trouvé les feuilles Banbury – nommée ainsi d’après la ville d’Oxford où elles étaient imprimées – coincées dans le toit de la hutte, probablement utilisées comme isolant une fois que les codes avaient été décryptés.

Le commandant Alastair Denniston en 1918 (Crédit : Bletchley Park Trust)
Le commandant Alastair Denniston en 1918 (Crédit : Bletchley Park Trust)

Comme le Dr Joel Greenberg, le biographe de deux précurseurs de Bletchley, Gordon Welchman et Alastair Denniston, l’a expliqué, le décryptage pendant la Seconde Guerre mondiale n’aurait pas été possible sans le travail effectué sur deux sites distincts à Londres pendant le premier conflit mondial.

Welchman est décrit comme l’architecte de l’ « Ultra Intelligence », tandis que Denniston était le commandant de Bletchley Park de 1940 à 1942. Ultra est la désignation donnée à l’information reçue en pénétrant les communications radio et téléimprimeur cryptées ennemies.

« Le décryptage avait commencé au 17e siècle mais le véritable changement est intervenu avant la Première Guerre mondiale avec l’utilisation de la radio pour transmettre des messages », a précisé Greenberg.

Dans les premiers jours de la Première Guerre mondiale, la Grande-Bretagne coupait tous les câbles sous-marins viables utilisés par les Allemands. Au lieu de cela, les deux parties se sont tournées vers la radio sans fil – et le cryptage des messages codés.

« Au début », a décrit Greenberg, « tout le monde utilisait des dictionnaires. Des machines [telles que la machine à renommée mondiale, Enigma] ne sont arrivées que plus tard ».

Le décryptage à Londres a été scindé en deux entreprises distinctes, l’une soutenue par l’armée qui est devenue connue sous le nom de MI1 (b), mise en place par le ministère de la Guerre, et la Chambre 40, établie par la marine.

William Friedman (Crédit : National Cryptology Museum US)
William Friedman (Crédit : National Cryptology Museum US)

Deux des cryptographes centraux de la Première Guerre mondiale étaient des Juifs : l’Américain William Friedman et le russe Ernst Fetterlein. Friedman est devenu célèbre en étant le doyen de la cryptologie américaine dans la Seconde Guerre mondiale, mais il a commencé son travail pendant le premier conflit mondial.

Friedman, né Wolf Friedman à Kishinev, a commencé à travailler sur le décryptage en 1915 et est devenu le décrypteur personnel du général John Joseph Pershing en France après que l’Amérique est entrée en guerre en 1917.

Entre les deux guerres Friedman était l’homme à consulter dans le domaine du décryptage. Il a réuni une équipe de cryptanalyse de quatre hommes (trois d’entre eux étaient Juifs) au sein de l’US Signals Intelligence Service, constituée d’Abraham Sinkov, Solomon Kullback, Leo Rosen et Frank Rowlett. En avril 1943, Friedman a passé du temps à Bletchley Park et son travail a été reconnu comme étant crucial pour l’effort de guerre.

Ernst Fetterlein, qui était autrefois le cryptographe du tsar Nicolas de la Russie, a fui le pays pendant la Révolution russe de 1917 et a fini par travailler dans le décryptage en Grande-Bretagne. Quelques mois avant la fin de la Première Guerre mondiale, Fetterlein était l’un des rares qui a travaillé dans la Chambre 40, l’installation de décryptage de la Marine.

Bien qu’il ait pris sa retraite en 1938, Ernst sorti de sa retraite au cours de la Seconde Guerre mondiale pour travailler avec les décrypteurs de Bletchley Park, avec son frère Paul, notamment.

« Ernst Fetterlein travaillait à Londres pour intercepter le trafic, y compris ce qui venait de la Russie », a déclaré le biographe Greenberg. « Cette section était censée avoir été fermée – mais en réalité ils ont continué à travailler, dans le secret ».

Sir John Scarlett, ancien chef du service secret des renseignements (MI6) de la Grande-Bretagne, est actuellement le président du Bletchley Park Trust. Il a escorté le duc de Kent pendant l’ouverture de l’exposition.

Deux anciens combattants assistent le 29 juillet 2015 à l'ouverture de l'exposition  sur la Première Guerre mondiale  « The Road to Bletchley Park » (Crédit : Shaun Armstrong)
Deux anciens combattants assistent le 29 juillet 2015 à l’ouverture de l’exposition sur la Première Guerre mondiale « The Road to Bletchley Park » (Crédit : Shaun Armstrong)

« Cette exposition raconte une partie essentielle de l’histoire de Bletchley Park. La Grande Guerre a eu lieu à un moment de changement et d’innovation technologique rapide. Les câbles, les télégrammes, les codes et le décryptage sont au cœur de cette révolution. Les travaux d’interception et de décryptage britannique ont obtenu un succès remarquable. Comme pendant la Deuxième Guerre mondiale, notre pays a été à la pointe de la technologie, où il a toujours besoin d’être. Dans la Grande Guerre, les fondations ont été posées, et la direction préparée, par les triomphes de Bletchley Park », a déclaré Scarlett.

Peut-être la partie la plus étonnante de l’exposition est à quel point peu de gens ont travaillé sur le décryptage des codes – et pas seulement sur le front de l’Allemagne mais aussi sur les autres fronts sur lesquels la Grande-Bretagne a été pendant le combat, y compris le Moyen-Orient.

Dans la liste de la Chambre 40 de la marine, il y a environ 12 « traductrices » dans l’ensemble du groupe pour à peu près une trentaine de personnes. Le groupe de l’armée parallèle en comptait environ 50.

En revanche, on pense qu’il y a eu quelques 8 000 hommes et femmes qui travaillent à Bletchley Park pendant la Seconde Guerre mondiale et beaucoup n’ont toujours pas été identifiés.

Un nombre important de décrypteurs de la Seconde Guerre mondiale étaient des Juifs – suffisamment nombreux pour avoir mis en place une société pendant la guerre : Zionist Society – qui a été lancée par Walter Ettinghausen, qui a fini par devenir, sous le nom de Walter Eytan, le directeur général du ministère israélien des Affaires étrangères entre 1948 et 1959, et plus tard l’ambassadeur d’Israël en France.

D’autres anciens décrypteurs comprennent Peter Benenson, le fondateur d’Amnesty International, et Dame Miriam Rothschild, le botaniste de renommée internationale.

En marchant à travers Bletchley Park, les visiteurs peuvent être clairement divisés en deux groupes : des anciens combattants enthousiastes, et un grand nombre de jeunes, accompagnant souvent leurs grands-parents, s’essayant au décryptage interactif.

Les gadgets du 21e sicle sont mis de côté pendant que les jeunes visiteurs se mettent dans la peau des guerriers du bureau Bletchley Park comme William Friedman, qui a aidé à gagner la guerre avec de la simple déduction, de l’intuition et de l’intelligence

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