Israël en guerre - Jour 465

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Dans les ruines du régime Assad, des millions de pilules de captagon

Assad avait utilisé le trafic de captagon, juteuse manne financière, pour faire pression sur les Etats du Golfe, en particulier l'Arabie saoudite, pour réintégrer la Syrie dans le monde arabe

Un combattant rebelle syrien avec un sac contenant des pilules de captagon trouvé à l’aéroport militaire de Mazzeh, à l’ouest de Damas, le 12 décembre 2024. (Aris Messinis/AFP)
Un combattant rebelle syrien avec un sac contenant des pilules de captagon trouvé à l’aéroport militaire de Mazzeh, à l’ouest de Damas, le 12 décembre 2024. (Aris Messinis/AFP)

L’effondrement du régime de Bachar al-Assad a laissé s’échapper ses millions de pilules. Chaque jour, dans des hangars ou des bases militaires, les rebelles découvrent plus de captagon, la drogue qui a transformé la Syrie en narco-Etat.

« Après une fouille, on a compris que c’était une usine de Maher al-Assad (le frère de l’ex-président, NDLR) et de son associé Amer Khiti », explique à l’AFP Abou Malek al-Chami, un combattant de la coalition emmenée par les rebelles islamistes de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), qui a surpris le monde entier en prenant la Syrie en une douzaine de jours.

Emporté par la vague, Bachar al-Assad a fui à Moscou chez son grand allié. Son frère Maher, lui, est introuvable.

Très redouté chef de la Quatrième division, l’unité d’élite de l’armée syrienne, il passe pour l’une des têtes du réseau de captagon syrien, une industrie d’au moins 10 milliards de dollars.

Quant au député Amer Khiti, il est sous sanctions de Washington et de Londres, cette dernière l’accusant de « faciliter la production et le trafic de drogue ».

Caché dans des boîtiers électriques

Dans les hangars d’une carrière bordant Damas, Abou Malek al-Chami – un nom de guerre – poursuit la visite.

Les rampes du garage souterrain servaient jusqu’à récemment à charger des millions de pilules beige sale savamment cachées dans les bobines de cuivre de boîtiers électriques vendus dans le commerce.

Un combattant anti-régime arrache une affiche de l’ex-président syrien Bachar el-Assad (à gauche) et son frère Maher à l’aéroport de la ville d’Alep, au nord de la Syrie, le 2 décembre 2024. (Omar Haj Kadour/AFP)

« C’est impossible à décrire tellement il y avait de machines bourrées de captagon prêt à l’exportation », poursuit Abou Malek.

Dans le hangar, les cartons qui servaient à maquiller le contenu des cargaisons des camions de drogue sont toujours là; comme les sacs de soude caustique – en provenance d’Arabie saoudite selon les étiquettes -, l’ingrédient principal de la méthamphétamine, un stimulant comme le captagon.

Ces drogues étaient devenues, de loin, le premier produit d’exportation de la Syrie de Bachar al-Assad, paria international après 14 ans de répression dans le sang d’une révolte devenue guerre civile ayant fait plus d’un demi-million de morts.

« Pression sur le Golfe »

Outre une juteuse manne financière, le captagon assurait aussi un levier de pression diplomatique au président un temps incapable de sortir de Syrie tant il était persona non grata dans la majeure partie des capitales du monde.

M. Assad a « utilisé le trafic de captagon pour faire pression sur les Etats du Golfe, en particulier l’Arabie saoudite, pour réintégrer la Syrie dans le monde arabe », assure le chercheur Hesham Alghannam du Carnegie Middle East Center.

Car dans le chaos de la guerre, cette drogue s’est répandue bien au-delà des frontières syriennes.

Au Moyen-Orient, l’Arabie saoudite constitue le plus grand marché. Là, le captagon est à la fois la drogue des fêtes de l’élite aisée mais aussi celle, discrète et moins taboue que l’alcool dans ce pays conservateur, des travailleurs modestes en quête de stimulants pour tenir les cadences infernales de leurs employeurs.

Des pilules de captagon brûlées dans le but de les détruire, suite à leur découverte à l’aéroport militaire de Mazzeh, à l’ouest de Damas, le 12 décembre 2024. (Aris Messinis/AFP)

Pour M. Alghannam, c’est en exploitant ces addictions que le régime a réintégré en 2023 la Ligue arabe. Peu avant sa chute, le président – élu en 2000 par référendum pour succéder à son père Hafez al-Assad – était même de nouveau reçu en grandes pompes à Abou Dhabi ou Ryad.

« Tout brûlé »

Malgré tout, la Syrie continuait de produire à la chaîne des millions de comprimés de captagon, une amphétamine dérivée d’un médicament censé traiter la narcolepsie ou les troubles du déficit de l’attention.

La preuve ? A l’aéroport militaire de Mazzeh, aux portes de Damas, des combattants de HTS brûlaient récemment sous un hangar des milliers de comprimés de captagon.

Dans un autre bâtiment de l’armée de l’air, au milieu de tablettes contrefaites de viagra et de mauvaises imitations de billets de cent dollars, des sacs de pilules beige sale s’empilent.

Tous ces bâtiments sont liés à un homme: le tout-puissant frère du président déchu.

« En entrant, on a découvert une quantité énorme de captagon. On a tout brûlé », affirme un combattant de HTS qui se fait appeler Khattab.

Des insurgés islamistes syriens inspectent des composants électriques de stockage utilisés pour cacher des pilules de captagon, dans l’entrepôt d’une usine de fabrication de drogues à Douma, dans la région de la Ghouta orientale, dans la périphérie est de Damas, le 12 décembre 2024. (Aris Messinis/AFP)

HTS, qui entend gérer la Syrie post-Assad avec son gouvernement intérimaire, cessera, assure-t-il, production et exportation de captagon – un business dont les revenus dépassait pourtant toutes les exportations légales de la Syrie réunies.

Une gageure dans un pays à l’industrie à genoux, à la monnaie en chute libre et jusqu’ici encore exclu du commerce international par les sanctions contre le clan Assad et ses affidés.

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