Des députés de droite tentent à nouveau d’éviter l’évacuation d’Amona
Un nouveau projet de loi pour sauver l’avant-poste “résout tous les problèmes juridiques soulevés” par une ancienne version, jugée “inconstitutionnelle” par le procureur général
Marissa Newman est la correspondante politique du Times of Israël

Des députés de droite du parti HaBayit HaYehudi et du Likud ont proposé mercredi un projet de loi pour reconnaitre les avant-postes non autorisés de Cisjordanie et les constructions illégales. Cette législation a pour objet d’éviter le démantèlement ordonné par la Cour suprême de l’avant-poste d’Amona, qui doit être effectif avant la fin de l’année.
Après des années de retards et de luttes judiciaires, la cour a estimé en 2014 que l’avant-poste d’Amona, qui se trouve à l’est de Ramallah, a été construit sur des terrains palestiniens privés, et doit être démoli avant le 25 décembre 2016. L’évacuation imminente menace de déstabiliser la coalition très à droite du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
L’Etat a demandé lundi à la cour de lui accorder sept mois supplémentaires pour mener l’évacuation d’Amona.
Les réponses à la demande de l’Etat aurait dû être remises jeudi après-midi, mais la Cour suprême a accordé jeudi un délai aux propriétaires palestiniens et aux associations de défense des droits de l’Homme pour répondre à la demande de l’Etat.
Les demandeurs ont à présent jusqu’à dimanche pour présenter leur réponse à la demande de l’Etat, a décidé la cour jeudi.
Des députés de droite ont cherché une faille juridique pour empêcher l’évacuation, avec un projet de loi qui reconnaitrait officiellement les avant-postes de Cisjordanie. Une version précédente du projet, proposée par la députée de HaBayit HaYehudi Shuli Moalem-Refaeli, avait cependant été jugée inconstitutionnelle par le procureur général, Avichai Mandelblit.
« La proposition cherche à annuler de manière rétroactive un jugement final et définitif de la Cour suprême sur un cas particulier, ce qui n’a pas de précédent et porterait un coup fatal à l’Etat de droit », avait déclaré Mandelblit en septembre, ajoutant que cela serait également contraire au droit international.

Mercredi, un porte-parole de Bezalel Smotrich, député de HaBayit HaYehudi, qui a soumis le projet de loi, a affirmé que ce nouveau projet répondait aux préoccupations légales soulevées par la version précédente. Les députés du Likud David Bitan, qui préside la coalition, et Yoav Kisch, ont également signé ce projet de loi.
« Il résout tous les problèmes juridiques qui ont été soulevées [par la version précédente] », a déclaré le porte-parole.
Le procureur général n’a pas répondu immédiatement et il n’est pas certain que la nouvelle mesure rassemblera le soutien nécessaire pour éviter l’évacuation.
Dans le cadre du nouveau projet de loi, les constructions non autorisées sur des terrains palestiniens privés seront légalisées uniquement si les habitants « peuvent prouver une implication du gouvernement », a déclaré le porte-parole de Smotrich. « La loi ne s’applique qu’aux [endroits] où le gouvernement a construit », a-t-il déclaré.
De plus, alors que le projet de loi de Moalem-Refaeli autorisait le gouvernement à s’approprier des terres, celui de Smotrich ne donne que le droit d’utiliser les terrains, et laisse leur propriété aux noms des propriétaires, a-t-il déclaré.
L’Etat dédommagera les propriétaires financièrement ou avec d’autres terrains, selon leurs souhaits, stipule le projet de loi. L’Etat mettra également en place une autorité israélienne juridique pour gérer les poursuites légales, a-t-il déclaré.
Yuli Edelstein, le président de la Knesset, a annoncé mercredi qu’il soutiendrait la version adoucie du projet de loi.
« Nous ne pouvons pas permettre qu’Amona et Ofra, sur lesquels plane le danger de l’évacuation après les instructions de la Cour, deviennent un précédent pour détruire des implantations en Judée et en Samarie », a déclaré dans un communiqué Edelstein, qui vit dans une implantation du sud de Jérusalem.
« J’espère une solution négociée, et parallèlement, nous proposerons la ‘loi de régulation’, dans sa version modérée, qui a été soumise aujourd’hui. »
Le projet de loi a également été déposé par Kisch, député du Likud, qui a concédé mardi qu’Amona pourrait devoir être évacué d’ici le 25 décembre.

« C’est l’évaluation actuelle », a écrit le député sur Twitter mardi. « Mise à jour : je mène, avec Smotrich, une procédure légale pour empêcher l’évacuation. C’est un processus spectaculaire, et il est difficile d’évaluer ses chances [de réussite]. »
Le projet de loi devrait être débattu par la commission des lois ce dimanche ou le dimanche suivant, selon le porte-parole de Smotrich.
Dimanche dernier, la commission ministérielle a annoncé qu’elle repoussait d’une semaine un vote sur la version précédente du projet de loi. Selon le site d’informations Ynet, le report de dimanche a été causé par la recommandation de Mandelblit, qui a demandé à la commission de rejeter la législation.
Le report avait été annoncé après que Netanyahu a rencontré les dirigeants de la coalition, ainsi que la ministre de la Justice Ayelet Shaked, qui comptait présenter le projet de loi au vote de la commission.
Dimanche également, un ministre du Likud avait déclaré à la radio militaire que si un consensus sur le report du vote n’était pas atteint, le cabinet de Netanyahu soutiendrait la législation controversée.

D’autre part, la ministre de l’Egalité sociale Gila Gamliel (Likud), membre de la commission, a annoncé dimanche qu’elle soutiendrait le projet de loi de Moalem-Refaeli.
Amona, fondé en 1995, accueille une quarantaine de familles. Il est le plus grand de la centaine d’avant-postes illégaux, construits sans permission mais généralement tolérés par le gouvernement, qui parsème la Cisjordanie. Une évacuation partielle il y a dix ans avait déclenchée de violents affrontements entre habitants et forces de sécurité, et une nouvelle évacuation pourrait entraîner une autre confrontation.
En 2008, un groupe de Palestiniens représentés par l’association israélienne de défense des droits de l’Homme Yesh Din avait saisi la Cour suprême, affirmant que des habitants d’Amona avaient empiété sur leurs terrains, et demandant le démantèlement de tout l’avant-poste.
Cette saisie avait lancé une longue bataille juridique, pendant laquelle plusieurs dates d’évacuation avaient été dépassées et reportées à plusieurs reprises avant un jugement final de 2014, qui a ordonné à l’Etat de démanteler l’avant-poste avant le 25 décembre 2016. L’Etat avait également accepté de dédommager les propriétaires à hauteur de 75 000 dollars.
En conséquence de ce jugement, les politiques avaient présenté plusieurs alternatives, dont le projet de loi dit de régulation de Moalem-Refaeli, qui propose que les propriétaires palestiniens dont les terrains ont été utilisés pour y construire des implantations ou des avant-postes reçoivent d’autres terrains en Cisjordanie, en plus de compensations financières équivalentes à 50 % de la valeur du terrain.
Un projet de loi similaire pour reconnaître les avant-postes avait été abandonné en première lecture à la Knesset en 2012, après l’opposition de Netanyahu, qui avait menacé de renvoyer chaque ministre ou vice ministre qui voterait en sa faveur.
Néanmoins, le projet de loi a été ravivé par une pétition pour le soutenir, signée par 35 des 30 députés du Likud, dont d’importants ministres.
D’autres alternatives à l’évacuation d’Amona ont été proposées par le gouvernement, dont la réplication de l’avant-poste sur des terrains voisins dont les propriétaires sont inconnus.
Le gouvernement a également approuvé la construction de presque 100 logements dans l’implantation de Shilo, en Cisjordanie, pour les propriétaires d’Amona, ce qui avait déclenché une réponse furieuse de Washington.
L’équipe du Times of Israël et des agences ont contribué à cet article.