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Des Israéliennes donnent leurs cheveux pour une association contre le cancer

Une société de soins capillaires et l'association contre le cancer Zichron Menachem encouragent le don de cheveux pour en faire des perruques pour les patients en chimiothérapie

Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »

Eden a fait mesurer sa tresse pour voir si elle était assez longue pour faire un don au salon d'Ophir Hashmonai à Jérusalem. (Jessica Steinberg/Times of Israel)
Eden a fait mesurer sa tresse pour voir si elle était assez longue pour faire un don au salon d'Ophir Hashmonai à Jérusalem. (Jessica Steinberg/Times of Israel)

Eden, huit ans, arbore une longue tresse auburn. Debout devant le miroir du coiffeur, elle tient d’une main ses cheveux et regarde sa mère par-dessus son épaule.

« Je ne suis pas sûre qu’elle soit prête à les couper », souffle sa mère à Ophir Hashmonai, le propriétaire du salon, prêt à couper la masse de cheveux. Même si Eden se laisse pousser les cheveux dans un but précis depuis près d’un an, elle hésite encore.

« Je suis prêt quand tu l’es », annonce Ophir Hashmonai à Eden.

Ce coiffeur du quartier de Baka à Jérusalem coupe des cheveux pour en faire des dons quasi-quotidiennement, principalement ceux de jeunes filles et de fillettes.

Dons de cheveux pour des perruques destinées à des enfants souffrant d’un cancer pendant un évènement organisé par Zichron Menachem, l’association israélienne pour le soutien des enfants atteints de cancer et de leurs familles. Illustration. (Crédit : Meital Cohen/Flash90)

Elles arrivent chez lui par le biais du site de Zichron Menachem, une organisation de soutien aux patients du cancer qui fabrique des perruques, entre autres services pour les malades et leur famille.

Son salon fait partie des 480 en Israël qui proposent une coupe gratuite.

« J’appelle cela le ‘réseau d’Israël le magnifique », a expliqué Chaim Ehrental, qui a fondé, avec sa femme Miri, l’organisation Zichron Menachem. Elle porte le nom de leur fils Menachem, qui a succombé à une leucémie à l’âge de 15 ans, 13 ans après le diagnostic.

« Il y a beaucoup de personnes, qui passent leur journée debout », commente Chaim Ehrental, en référence aux coiffeurs. « Et des milliers de filles qui se laissent pousser les cheveux et en font don. »

Noam and Inbal donated their hair to make wigs for cancer patients. What a beautiful act of kindness ❤

Posted by Israel Defense Forces on Saturday, November 9, 2019

Des Israéliennes de tous âges, et parfois même des hommes, qui font don de leurs cheveux à Zichron Menachem publient des photos de leur ancienne chevelure, pour parler de leur expérience dans le fauteuil du coiffeur. Il y a des écoles, et même des unités de cadettes de l’armée, qui organisent des journées spéciales pour toutes celles qui laissaient pousser leurs cheveux dans ce but précis.

Ils le font pour la mitsva, pour la bonne action. Concrètement, cette année a été marquée par une augmentation significative du nombre de dons de queues de cheval et de tresses, selon un porte-parole du programme de dons de cheveux.

Mais ce que ces personnes ne réalisent pas, c’est tous les cheveux récoltés par Zichron Menachem ne finissent pas en perruques.

Selon le site en hébreu de Zichron Menachem vous pouvez faire don de cheveux teints, mais tout cheveu qui a subi un soin chimique, ou qui mesure moins de 30 centimètres une fois tressé, ne peut pas servir à faire une perruque. Le site précise que les cheveux qui ne peuvent pas servir à faire des perruques sont vendus, et les bénéfices de la vente permettent de fabriquer d’autres perruques.

Ces précisions ne sont pas aussi claires dans la version française du site.

Zichron Menachem tente d’être précis et d’indiquer que les tresses doivent mesurer au minimum 30 centimètres dans ses publicités en hébreu.

Lors de la campagne de janvier 2020 pour les dons de cheveux, quand le camion de coiffure de Zichron Menachem a parcouru le pays, la longueur et la qualité des cheveux étaient meilleures que celles des années précédentes, a déclaré le porte-parole du programme.

Dee Shottland travaillant sur une perruque dans son salon du centre-ville de Jérusalem (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)

Cela semble logique que tous les cheveux ne peuvent pas être utilisés pour fabriquer des perruques, explique Dee Shottland, perruquière de Jérusalem et survivante du cancer. A la tête de sa propre organisation, Wigs for a Cause, dans son échoppe de la rue Jaffa, elle collecte des perruques, neuves ou usagées, qu’elle retape et offre aux femmes qui suivent une chimiothérapie.

« Ils ne cachent rien », explique Dee Shottland au sujet de Zichron Menachem. « Mais les gens doivent comprendre que quand on a 1 000 queues de cheval, on n’a pas besoin de ces 1 000. Si [ce qu’ils font des cheveux] vous importe, ne donnez pas, mais si cela vous indiffère, sachez qu’ils en font d’autres choses. »

Zichron Menachem propose des activités extra-scolaires, des thérapies pour les enfants et les parents, des salons de coiffure, des salles de sport et des consultations spéciales avec des oncologues, et une pharmacie de cannabis pour ceux qui y ont recours afin de soulager les effets de la chimiothérapie.

Une centaine d’enfants fréquentent quotidiennement le centre à Jérusalem, qui propose des services à 300 familles chaque année, et ce depuis 15 ans, détaille Chaim Ehrental.

Nombre de ces visiteurs viennent essayer des perruques pendant la chimiothérapie, pour contrer la perte de cheveux qui accompagne généralement le traitement.

Une affiche pour la récente campagne de don de cheveux de Pantene en Israël. (Autorisation : Zichron Menachem)

Il y a cinq ans, l’organisation s’est associée avec les bureaux israéliens de Pantene, la marque de shampooing de la multinationale Procter & Gamble.

L’équipe locale de Procter & Gamble avait lu une interview d’un journal israélien au sujet de Zichron Menachem et de ses services de perruques, et sur le peu de dons de cheveux permettant de fabriquer des perruques pour les patients.

A l’époque, Zichron Menachem ne fabriquait des perruques que pour les patients de moins de 25 ans, parce qu’ils ne disposaient pas des fonds nécessaires ni d’assez de cheveux pour fournir tous ceux qui en avaient besoin.

Les deux organisations ont combiné leurs forces, a expliqué un porte-parole de Procter & Gamble, et en trois ans, il y avait assez de cheveux pour fabriquer des perruques pour tous les patients de Zichron Menachem, quel que soit leur âge.

Le groupe Procter & Gamble en Israël a été surpris que cela fonctionne, et en a été ravi. Si la branche américaine dispose de son propre programme de dons de cheveux, Beautiful Hair, sa filiale israélienne n’avait aucun lien avec ce groupe caritatif.

En réalité, Pantene et Procter & Gamble ont mis fin aux activités de Beautiful Hair en 2018, après avoir conclu que les perruques synthétiques étaient une meilleure option pour les malades du cancer.

Aucun arrêt du programme israélien n’est prévu, a assuré le porte-parole du géant américain.

« C’est très émouvant pour nous de savoir qu’année après année, nous réussissons à changer les vies de tant de femmes, de filles et d’enfants », a-t-elle dit. « C’est aussi émouvant pour nous de savoir que nous faisons partie d’une nation qui montre qu’elle a un grand cœur, qu’elle est solidaire de ceux qui ont besoin de notre aide. Nous croyons en cette campagne et continuerons à y investir des ressources, des idées et de l’amour. »

Chaim Ehrental tenant une perruque en cours au salon Zichron Menachem (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)

La multinationale donne beaucoup d’argent, indique Chaim Ehrental, notamment en couvrant toute la publicité pour les campagnes de don de cheveux. En janvier, il a envoyé une camionnette-salon de coiffure dans sept endroits du pays afin de couper des queues de cheval.

« Beaucoup de gens font des dons grâce à la campagne Pantene », commente-t-il.

Zichron Menachem possède sa propre équipe de perruquiers qui traitent les dons de cheveux et les transforment minutieusement en perruques.

Il y a des dizaines de dons de cheveux chaque mois et des centaines en un an, fait savoir Bosmat Braitman, la perruquière en chef de l’organisation, qui travaille dans un petit salon de perruques bien adapté au siège de Kyriat Moshe.

Bosmat Braitman, comme Dee Shottland et beaucoup d’autres perruquiers en Israël, est religieuse pratiquante et porte une perruque pour couvrir ses cheveux. Elle a d’abord commencé à en fabriquer pour d’autres femmes religieuses, et comprend exactement comment une bonne perruque doit se sentir et être bien ajustée.

Les cheveux donnés sont lavés, triés par longueur et par couleur, puis lissés. Le travail est fait à la main, explique Bosmat Braitman.

« C’est ça ce qui entoure le cancer », dit Chaim Ehrental. « La première question que pose une personne atteinte de la maladie est : ‘À quoi vais-je ressembler ?’ C’est de là qu’est venue l’idée de la perruque ».

« Nous voulions aider les gens avec toutes nos connaissances », ajoute-t-il.

À Zichron Menachem, on demande aux patients si leur assurance médicale couvre une perruque, ce qui est souvent le cas, et cet argent est utilisé pour fabriquer ou fournir celle-ci. Mais on ne demande jamais aux patients de payer quoi que ce soit de leur poche, assure un porte-parole de Zichron Menachem.

Les perruques pour les filles jusqu’à 25 ans sont fabriquées en fonction de la taille de leur tête, qui peut encore changer à cet âge. Pour les plus de 25 ans, Bosmat Braitman prend souvent des perruques existantes et les adapte aux clientes.

Elle travaille en étroite collaboration avec les patientes, en utilisant des photos de leur chevelure avant le traitement.

« C’est un lien très étroit que j’ai avec elles », révèle-t-elle. « J’ai tout vu. Il y a des gens qui ont un rapport très pratique avec elle, et il y a des femmes qui s’effondrent, et je deviens leur assistante sociale ».

Elle a calculé que près de 70 % de ses donatrices ont déjà donné leurs cheveux ou suivent les traces de leurs mères, tantes ou cousines.

Une série de queues de cheval données à Zichron Menachem. (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)

Pourtant, certaines donneuses ont eu peur parce que Zichron Menachem n’utilise pas tous les cheveux offerts.

Shira Pasternak Beeri, une blogueuse du Times of Israel, a écrit sur son processus de don de cheveux, qui a pris quatre ans.

Elle voulait être sûre que ses cheveux ne serviraient qu’à la fabrication d’une perruque et non à des frais de fonctionnement. Elle a fini par faire un don à Shottland’s Wigs for a Cause, où ses cheveux se sont avérés assez longs pour fabriquer plusieurs perruques.

Les dons de cheveux ne sont pas faciles à traiter, explique Dee Shottland. Chaque queue de cheval contient de nombreuses longueurs de cheveux différentes et certaines peuvent être inutilisables ou présenter des pointes fourchues.

Elle achète ses propres longueurs de cheveux de perruque à quelques agents différents, s’en tenant aux cheveux russes et ouzbeks qui sont généralement abondants et brillants. Elle a fait remarquer qu’on ne sait jamais ce qu’ils obtiennent avec les dons de cheveux, c’est pourquoi elle dépense considérablement pour ses écheveaux de cheveux.

« Imaginez que ces cheveux viennent d’une femme qui a mangé des côtelettes d’agneau dans les montagnes et que ses cheveux sont magnifiques et forts », dit-elle en passant ses doigts sur un écheveau.

Cela coûte plus cher de s’occuper d’une queue de cheval donnée, explique Dee Shottland. Les cheveux offerts sont considérés comme une matière première, car ils doivent être séparés en différentes longueurs, ce pour quoi elle paie d’autres personnes pour le faire à sa place. Ils sont ensuite enfilés dans un bonnet selon un processus qui peut prendre six à huit semaines pour une perruque sur mesure.

Elle a tendance à fabriquer des perruques pour les patientes atteintes de cancer à partir de perruques offertes ou, à l’occasion, de queues de cheval offertes.

Les dons de cheveux font souvent partie d’un projet de bat mitzvah, réalisé avec des amies, parfois plusieurs fois pendant les années d’école.

Dons de cheveux pour des perruques destinées à des enfants souffrant d’un cancer pendant un évènement organisé par Zichron Menachem, l’association israélienne pour le soutien des enfants atteints de cancer et de leurs familles. Illustration. (Crédit : Meital Cohen/Flash90)

Elah Frank, 15 ans, révèle qu’il lui a fallu environ huit mois pour faire pousser ses cheveux bruns ondulés, mais qu’elle n’est pas encore prête à s’en séparer.

« Je ne voulais pas, c’était bizarre de les couper », a-t-elle dit. « Mais je pensais le faire depuis longtemps, et je voulais faire une grande mitzvah et j’ai décidé que c’était bien d’avoir quelque chose de nouveau et de changer quelque chose ».

Quand elle l’a finalement fait, Elah Frank a dit qu’elle a ressenti un sentiment de liberté par rapport au poids de tous ces longs cheveux.

Maintenant, elle attend que ses cheveux repoussent pour recommencer. Et beaucoup de ses amis ont suivi son exemple.

Shaked Gojman, 30 ans, du kibboutz Sde Boker, a récemment coupé sa longue queue de cheval, après l’avoir fait pousser pendant six ans après son service militaire.

Shaked Gojman a fait don de sa queue de cheval pour la deuxième fois à la campagne de Pantene et Zichron Menachem, en janvier 2020. (Autorisation : Shaked Gojman)

C’était la deuxième fois qu’il faisait don de ses cheveux, après l’avoir fait avant de s’engager dans l’armée. Il a dit qu’il donnerait volontiers sa barbe aussi, s’ils la prenaient.

« Que puis-je faire d’autre avec tous ces cheveux ? », commente Shaked Gojman, qui a eu l’idée du don après avoir vu les publicités de Pantene et Zichron Menachem.

Chaim Ehrental aime raconter des histoires sur d’autres dons de cheveux, dont une femme âgée qui en a récemment fait un troisième. Sa première fois, c’était en l’honneur de son 70e anniversaire, et elle s’est rendue sans le savoir à sa fête d’anniversaire surprise juste après s’être coupé les cheveux.

« Ce n’est pas simple de se couper les cheveux », reconnaît Chaim Ehrental. « C’est la couronne de gloire de votre tête, et quand vous la coupez, vous avez l’air différent ».

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