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Des villageois polonais organisent un mariage juif … sans juifs

Un groupe culturel a organisé l'événement avec des volontaires non juifs habillés en costumes traditionnels et de fausses barbes

Des villageois polonais assistant à un faux mariage juif dans le village polonais de Radzanow, en Pologne, le 5 août 2017 (Crédit : Jonny Daniels / From the Depths)
Des villageois polonais assistant à un faux mariage juif dans le village polonais de Radzanow, en Pologne, le 5 août 2017 (Crédit : Jonny Daniels / From the Depths)

JTA – La nostalgie de la présence juive est un phénomène bien documenté en Europe de l’Est, avec des aspects commerciaux et même culturels importants.

En Ukraine, les restaurants dits à thème juif avec des menus pleins de porc se livrent à une concurrence acharnée pour attirer les touristes, tandis que les figurines de Juifs sont vendues sur les marchés comme des porte-bonheurs. En Pologne, les graffitis qui disent : «  vous nous manquez, les Juifs  » sont devenus chose courante.

Au-delà du côté kitsch, les festivals culturels juifs attirent de larges publics non juifs à Cracovie, à Varsovie et à Budapest.

Certains affirment que cette tendance trouve son origine dans un sentiment de perte provoqué par la quasi-disparition des communautés juives, qui furent à une époque dynamiques. D’autres attribuent cette tendance à un désir de se reconnecter au passé pré-soviétique.

Mais même dans ce contexte, le faux mariage juif qui a eu lieu samedi dans le village de Radzanów, à 128 km au nord-est de Varsovie, se distingue comme un événement remarquable.

Les faux mariages juifs – un événement éducatif ordinaire en Espagne et au Portugal, où la nostalgie des communautés juives presque éteintes est également très répandue – sont rares en Pologne. (Les habitants du village de Bobowa en ont organisé un en 2013). Encore plus rares sont les événements comme les faux mariages comme celui de Radzanow.

Organisé par l’Association Radzanovia, un groupe culturel dont le but est de promouvoir le patrimoine polonais, l’événement a présenté quelques dizaines de volontaires non-juifs, hommes et femmes, habillés en costumes traditionnels haredi [juifs ultra-orthodoxes]. Certains hommes portaient de fausses barbes et des péot [mèches de cheveux qui tombent au niveau des tempes] – dont certaines qui ne correspondaient pas à la couleur naturelle de leurs cheveux.

Le rôle du marié était joué par Piotr Czaplicki, un journaliste de la station de radio Radia dla Ciebie. Czaplicki, qui n’est pas Juif, il est allé sous une houpa – le dais nuptial dans les mariages juifs traditionnels – avec sa mariée, Julia Brzezińska, une résidente locale. Ils ont été « mariés » par un faux rabbin devant les villageois, à qui les organisateurs de l’événement ont cherché à enseigner les traditions juives.

Pour Jonny Daniels, le fondateur londonien de l’ONG From the Depths, qui promeut la commémoration de l’Holocauste en Pologne, des événements comme celui de Radzanów sont « une sorte de thérapie qui a lieu partout dans le pays ».

Mais pour la productrice de l’événement, Agnieszka Rychcik-Nowakowska, elle considère cet événement comme un moyen de commémorer les centaines de Juifs qui représentaient environ la moitié de la population de son village avant l’Holocauste.

« Nous voulons nous rappeler de toutes les maisons de tous les Juifs d’avant-guerre, qui ont vécu une vie paisible ponctuée par le rythme de leurs fêtes religieuses, des fêtes de famille et des événements plus banaux », a-t-elle déclaré au site d’information Nasza Mlawa.

Les Juifs se sont installés pour la première fois à Radzanów en 1710 et, à leur apogée, ils formaient une communauté d’environ 500 personnes. En septembre 1939, lorsque les Allemands ont annexé la Pologne, le nombre de Juifs est tombé en dessous de 300. Presque tous ceux qui sont restés ont été envoyés au ghetto de Mlawa pour ne plus revenir.

« Nous nous souvenons de ceux qui ont vécu ici avant nous et sont entrés dans la mémoire de nos grands-mères et grands-parents. C’était si récent », a déclaré Rychcik-Nowakowska.

En Europe, les festivals à thème juif sont plus fréquents, rassemblant des centaines de participants. Là-bas aussi, les événements à thème juif se déroulent en l’absence d’une communauté juive vivante en raison de la nostalgie et au désir de générer des revenus touristiques.

Mais en Espagne et au Portugal, par exemple, où des centaines de milliers de Juifs ont été opprimés il y a 500 ans pendant l’Inquisition, le passage du temps a été rempli de gestes de bonne volonté envers les Juifs qui ont été moins compliqués à faire que dans l’Est.

En 2013, l’Espagne et le Portugal ont même adopté des lois accordant la citoyenneté aux descendants de Juifs sépharades – une décision pleine de générosité qui contraste fortement avec le refus de la Pologne et d’autres pays d’Europe de l’Est de proposer ne serait-ce qu’une restitution partielle des biens qui ont été volés aux communautés juives.

Au faux mariage de Radzanów, les organisateurs se sont tournés vers Teresa Wrońska, une actrice du Théâtre juif de Varsovie, pour s’assurer de l’authenticité du mariage. Elle a chorégraphié toute la représentation – de la signature du ketubah (le contrat de mariage juif) à la musique traditionnelle juive jouée par un groupe de locaux et des musiciens de la capitale.

Même le musée d’histoire des Juifs de Pologne, POLIN, à Varsovie a été consulté lors de l’organisation de l’événement, selon Nasza Mlawa.

Le mariage n’est pas la seule tentative des habitants de Radzanów de se reconnecter à l’héritage juif perdu de leur village. L’année dernière, un étudiant du secondaire de la région, Cuba Balinski, a lancé un projet visant à re-consacrer et à rouvrir la synagogue abandonnée du village – un petit mais beau bâtiment de style maure qui a survécu miraculeusement à l’occupation nazie.

Balinski, qui s’est assuré d’avoir la coopération de la Fondation pour la préservation du patrimoine juif en Pologne pour son projet, cherche toujours des investisseurs. Il est catégorique et souhaite restaurer la synagogue pour qu’elle redevienne une maison de culte plutôt que de la transformer en musée.

« S’il n’y a pas de Torah dans la synagogue, il ne s’agit plus que d’un simple bâtiment », a-t-il déclaré au site d’information Gosc Plocki. « Mais si nous ramenons le livre sacré, elle reviendra à la vie ».

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