Dina Zilber sous le feu des critiques pour ses propos sur Netanyahu
Daniel Hershkowitz en appelle au procureur général après que son adjointe a accusé le Premier ministre de faire écho au Protocole des sages de Sion
Le commissaire à la fonction publique Daniel Hershkowitz a vivement réprimandé la vice-procureure générale israélienne Dina Zilber, demandant qu’elle soit sanctionnée en raison de ses propos cinglants à l’encontre du Premier ministre Benjamin Netanyahu cette semaine.
Zilber avait critiqué le gouvernement et Netanyahu dans la journée de dimanche, comparant les offensives du Premier ministre contre le système judiciaire et ses autres opposants au Protocole des sages de Sion, un texte antisémite célèbre, fabriqué de toutes pièces, qui prétend décrire le complot ourdi par une cabale juive pour dominer le monde.
Dans un long discours qui avait été diffusé par l’Institut israélien de la démocratie dans le cadre d’une conférence en ligne, Zilber avait dénoncé les accusations lancées par le chef du gouvernement et ses alliés qui n’ont cessé de répéter que les mises en examen pour corruption du Premier ministre relevaient d’un « coup d’État judiciaire » mené par un réseau de personnalités non élues dont l’objectif était de renverser le gouvernement.
Hershkowitz a qualifié de « graves » les propos de la magistrate et a vivement recommandé au procureur général Avichai Mandelblit de la sanctionner.
Il a pointé que celle-ci avait déjà, dans le passé, été réprimandée pour des comportements similaires. Il a demandé à ce dernier de s’occuper de l’incident « conformément à sa gravité et aux écarts de conduite déjà dénoncés dans le passé ».
Mandelblit aurait convoqué l’intéressée et a émis un communiqué disant qu’il écouterait ce qu’elle avait à dire et qu’il déciderait lui-même de la réponse qu’il apporterait à Hershkowitz et à d’autres, qui ont porté plainte suite à ces propos.
Zilber a fait l’objet de nombreuses attaques, ces dernières années, de la part des alliés de Netanyahu qui ont critiqué des décisions qu’elle avait prises, qu’ils avaient qualifiées de « gauchistes ».
Toutefois, au mois de septembre, le Premier ministre avait discrètement prolongé son mandat de trois mois, entraînant la fureur du parti Yamina, à la droite du Likud. Celui-ci devrait s’achever à la fin du mois de décembre.
Netanyahu est accusé de corruption dans trois affaires et notamment de pots-de-vin dans l’un d’eux. Il n’a cessé de clamer son innocence, dénonçant une « chasse aux sorcières » politique lancée à son encontre par la police, les procureurs, les médias, la gauche et les tribunaux. Il n’a jamais apporté aucune preuve de ces allégations.
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Pour les critiques du Premier ministre, ses attaques contre le système judiciaire et contre les mouvements de protestation hebdomadaires qui réclame sa démission sont les causes majeures d’une forte atmosphère de division qui s’est emparée de tout Israël, en plus des effets déstabilisants du coronavirus. Ils craignent que cette polarisation n’entraîne des violences meurtrières.
Netanyahu a aussi de nombreux désaccords avec le patron de Zilber, le procureur général Avichai Mandelblit. Il affirme que ce dernier a procédé à ses inculpations en cédant à la volonté d’un maître-chanteur opposé au chef du gouvernement. Ces derniers temps, le Premier ministre a rejeté de manière répétée un avis juridique formulé par le magistrat qui lui interdit d’intervenir dans les processus de nomination des hauts fonctionnaires judiciaires liés, d’une manière ou d’une autre, aux enquêtes qui avaient été ouvertes sur les dossiers qui le concernaient, ou à son procès devant la cour de district de Jérusalem. De son côté, le procureur général a fait savoir que sa décision était légalement contraignante.
Dans son discours de dimanche, Zilber avait dit : « Parfois, pour ne pas admettre la réalité d’un manque de leadership, alors on renvoie les responsabilités dans toutes les directions. Et au lieu de regarder en soi, on regarde ailleurs et… on crée la réalité fictive d’un système judiciaire au cœur même du système judiciaire, ou d’un État de bureaucrates dissimulés dans l’ombre, qui complotent un coup d’État judiciaire. Ajoutez alors un peu de sang à ce mélange et vous obtenez – avec un peu de piment – une répétition folle du ‘Protocole des sages de Sion’. Une culture de l’épouvantail en lieu et place d’une culture de responsabilité ».
Elle avait ensuite comparé les critiques continues émises par Netanyahu sur les responsables du gouvernement et sa dénonciation de sa perte présumée de sa « capacité à gouverner » au conte « Les habits neufs de l’empereur ».
« La ‘capacité à gouverner’ est ce vêtement extravagant fabriqué à l’aide des meilleurs tissus, par les meilleurs tailleurs, pour permettre la gouvernance et la prise de décision politique – si seulement, bien sûr, ces dernières ne sont pas entravées par les juges, les conseillers juridiques, les responsables du ministère des Finances, les médias partiaux, les universitaires hostiles à la patrie, la culture mondiale élitiste qui vit à notre détriment et qui ternit notre nom à l’international, les émissions de satire qui nuisent à la morale nationale, les manipulateurs de la conscience, les anciens élèves de la Fondation Wexner, le Nouveau fonds juif, les gauchistes, les Arabes et tous ceux qui ont oublié ce que signifie être juif », avait-elle décrit.
« Ce discours sur la ‘capacité à gouverner’ est la stratégie mensongère la plus efficace pour couvrir les échecs de leadership« , avait continué Zilber, avant de faire une autre référence littéraire : « [L’écrivain politique anglais] Samuel Johnson a dit : ‘Le patriotisme est le dernier refuge des crapules’. Et le discours sur la capacité à gouverner est parfois le dernier refuge d’un faux dirigeant ».