Election au Consistoire : 3 candidats au titre de grand rabbin de France
Environ 330 grands électeurs ont rendez-vous dimanche matin, en assemblée générale, au Consistoire central, pour départager Haim Korsia, Laurent Berros et Mikael Journo

Les communautés juives liées au Consistoire israélite élisent, dimanche à Paris, pour sept ans, le grand rabbin de France, un titre brigué par le sortant, Haïm Korsia, et deux challengers.
Environ 330 grands électeurs – une majorité de représentants des communautés régionales et locales et environ 10 % de rabbins – ont rendez-vous le matin, en assemblée générale, au Consistoire central, pour les départager.
Élu pour un premier mandat en 2014, Haïm Korsia, 57 ans, est candidat à sa réélection.
Mikaël Journo, 47 ans, rabbin d’une synagogue parisienne, et Laurent Berros, 54 ans, rabbin de Sarcelles, convoitent également ce poste, qui représente la plus haute autorité religieuse juive de France, aux yeux des tenants du courant « traditionaliste » ou « orthodoxe », majoritaire dans le pays.

Sur le papier, peu de choses différencient les trois hommes, tous respectueux de la « halakha », la loi juive, et issus de la même formation, le Séminaire israélite.
Haïm Korsia est connu dans toutes les communautés, auxquelles il a rendu visite – avec « 100 déplacements chaque année » depuis 2014, assure-t-il. Érudit, cet aumônier de l’armée de l’Air et de Polytechnique, bien introduit auprès de personnalités et responsables étatiques, est très attaché au dialogue avec les institutions républicaines et avec les autres cultes.
« Je veux construire du lien », martèle-t-il.

Il met à son actif le règlement des cas problématiques de divorce religieux, l’interpellation des responsables universitaires sur les dates d’examens pour qu’elles ne tombent pas les jours de Shabbat, ou encore la sécurisation sanitaire de la pratique de la circoncision. Il incite les femmes à prendre la présidence (administrative) de communautés et préconise une réforme de la formation rabbinique.
Des thèmes qui figurent aussi dans le programme de Mikaël Journo, aumônier général des hôpitaux, rabbin de la communauté Chasseloup-Laubat à Paris, qui a fait campagne en France en promettant une plus forte proximité au quotidien. « La communauté juive est malade, elle a peur. Il faut la rebâtir », lui donner une « impulsion positive », dit-il.

Laurent Berros, déjà candidat en 2014, est un rabbin de terrain, à la tête, à Sarcelles (Val d’Oise), d’une grosse communauté. Ce défenseur de la scolarisation dans les écoles juives, veut aussi « insuffler quelque chose de fort pour recruter de jeunes rabbins ».
« Poste prestigieux »
« Aucun n’entend révolutionner le système, ni changer le fond du dogme », affirme à l’AFP un observateur au sein des institutions juives.
« C’est surtout une lutte d’hommes pour un poste prestigieux », commente un électeur préférant garder l’anonymat. Plusieurs responsables ont décrit une campagne à la tenue parfois décevante.
Parmi les chantiers du futur élu : susciter des vocations – car seuls trois à six rabbins sortent du Séminaire chaque année – mais aussi faire revenir les fidèles dans les synagogues, au sortir de la crise sanitaire.
Des synagogues, qui comme les autres lieux de culte, souffrent d’une diminution des ressources financières, faute d’une baisse des dons.
Avec environ 500 000 juifs, la communauté française est la plus importante d’Europe. Le Consistoire dit représenter un peu moins de 400 synagogues, soit un peu plus des trois quarts en France.

L’élu dimanche devra partager le pouvoir à la tête de cette institution avec son président, qui est laïc. Joël Mergui, à ce poste depuis 2008, doit quitter ses fonctions à l’automne.
Les deux responsables représentent le culte israélite vis-à-vis des pouvoirs publics – on a pu le voir récemment lors des discussions sur les ouvertures des lieux de cultes pendant la crise sanitaire, les consultations préalables au projet de loi de lutte contre le « séparatisme », les avis sur les questions de bioéthique, etc.
L’institution, mise en place en 1808 par Napoléon pour représenter les Juifs de France, se voit reprocher par d’autres courants, comme les libéraux et les massortis, de s’être repliée sur une ligne orthodoxe stricte. Ces sensibilités, ainsi que les loubavitch et certaines communautés ultra-orthodoxes ne sont pas sous sa tutelle.
Pour « parler au nom de tous les Juifs de France, encore faudrait-il les rassembler », juge Gad Weil, co-président de Judaïsme en mouvement (courant libéral, qui reconnaît le rabbinat des femmes). Il souhaiterait « une réflexion commune » associant les rabbins de tous les courants « sur la place du judaïsme en France », dans le « respect des points de vue de chacun ».