Exposition à Amsterdam : Le destin tragique de Juifs spoliés par les nazis
Cette exposition a "deux objectifs" : "montrer que le pillage des objets juifs était systématique et l'impact que cela avait sur la vie des gens"
Le destin tragique de huit individus ou familles, des Juifs néerlandais spoliés avant de devoir fuir ou de mourir dans les camps de concentration pendant l’Occupation nazie (1940-1945) des Pays-Bas, est racontée à travers des objets leur ayant appartenu, dans une exposition à Amsterdam.
L’exposition, qui démarre ce vendredi, est le fruit d’une collaboration entre trois institutions culturelles de la capitale néerlandaise, le célèbre Rijksmuseum, le musée historique juif et le musée national de la Shoah, inauguré en mars par le roi Willem-Alexander – les objets étant exposés dans ces deux derniers.
Avant la Seconde Guerre mondiale et l’occupation nazie, les Pays-Bas abritaient une communauté juive de quelque 140 000 personnes, principalement concentrée à Amsterdam. Près de 75 % d’entre eux n’ont pas survécu à la Shoah.
Des milliers d’œuvres d’art, d’objets religieux et d’autres biens ont été volés au cours de cette période et sont retournés aux Pays-Bas après la guerre, au terme d’un combat de plusieurs décennies de leurs propriétaires légitimes pour récupérer leurs biens.
Le Premier ministre néerlandais Mark Rutte avait présenté en janvier 2020 des excuses au nom du gouvernement pour la persécution des Juifs aux Pays-Bas pendant la Seconde Guerre mondiale.
Parmi les objets montrés de l’exposition, un sac à dos d’un jeune juif en fuite et une empreinte de botte militaire sur une œuvre d’art évoquent « huit histoires personnelles », dit à l’AFP Mara Lagerweij, conservatrice au Rijksmuseum, pour qui cette exposition a « deux objectifs » : « montrer que le pillage des objets juifs était systématique [et] l’impact que cela avait sur la vie des gens ».
L’un des destins évoqués est celui de Max Heppner, fils de réfugiés juifs allemands qui ont fui l’Allemagne peu après l’arrivée au pouvoir d’Adolf Hitler en 1933. Les nazis et la guerre finissent par rattraper les Heppner en 1942, les obligeant à fuir Amsterdam pour finir par se cacher dans un poulailler, dans le sud des Pays-Bas.
Le sac à dos de Heppner et les dessins qu’il réalise à cette période, dans la hantise d’être arrêté par les nazis, sont montrés au public.
« Période folle »
L’exposition « montre à quel point la civilisation est futile », explique à l’AFP Heppner, aujourd’hui âgé de 90 ans, en regardant son sac à dos. Ceux qui sont venus confisquer leurs biens n’étaient pas des nazis, mais des « policiers d’Amsterdam », se souvient-il. « Cela montre à quel point c’était une période folle », ajoute Heppner.
De nombreux citoyens néerlandais, la police et les chemins de fer, ont activement collaboré avec l’occupant allemand pour arrêter les Juifs et les déporter.
Autre pièce poignante : une œuvre graphique de Samuel Jessurun de Mesquita, mentor et ami du célèbre artiste néerlandais M.C. Escher, « Petites femmes qui parlent mal ».
Récupérée par Escher lui-même peu de temps après le pillage de la maison de son mentor et la déportation de la famille De Mesquita vers le camp d’extermination d’Auschwitz, elle porte l’empreinte d’une botte militaire, laissée par l’un des pilleurs.
Parmi les autres pièces est exposée une œuvre du peintre du siècle d’or néerlandais Gerrit Berckheyde, intitulée « La courbure d’Or », parmi celles pour la restitution desquelles Desi Goudstikker-von Halban, s’est battue toute sa vie.
Son mari, le marchand d’art Jacques Goudstikker, est décédé en 1940 pendant leur fuite vers l’Angleterre. Son commerce a été détruit par les nazis pendant l’Occupation.
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