Femme noire, la seule pilote diplômée de Tsahal veut être jugée sur son travail
Pour le lieutenant Tav, fille religieuse d'un immigrant de Côte d'Ivoire, ce qui compte le plus c'est sa compétence professionnelle, et non son apparence
Femme. Religieuse. A la peau foncée.
Alors que ces caractéristiques peuvent sembler remarquables pour un pilote de l’armée de l’Air israélienne, pour la seule femme à terminer cette année la formation de l’académie militaire, ce n’est pas ce qui la définit.
« La première chose que vous remarquerez est probablement ma couleur [de peau], ou que je suis une fille ou que j’ai des tresses », a déclaré le lieutenant Tav à la Douzième chaîne dans un entretien diffusé vendredi. « Après une conversation de deux phrases, vous verrez que ce ne sont pas mes qualités principales, il y a d’autres choses ».
Seulement identifiée par son grade et la première lettre de son nom, Tav a grandi à Jérusalem avec des parents olim hadashim. Son père est venu en Israël depuis la côte d’Ivoire, sa mère depuis la France.
Alors qu’elle a souvent entendu des commentaires d’autres enfants sur sa couleur de peau en grandissant, Tav explique qu’elle ne s’est jamais laissée influencer par ces critiques : « Je dirais à chaque enfant qui se sent dénigré que c’est une question de point de vue et que cela ne vous retire rien… c’est quelque chose d’extérieur ».
Alors que de nombreuses femmes religieuses choisissent d’autres formes de service national après le lycée plutôt que de servir dans l’armée, Tav dit n’avoir jamais hésité à s’engager.
« Je ne suis pas la femme religieuse classique que l’on pourrait imaginer. Je suis l’une de ces filles religieuses dont l’histoire ne se résume pas qu’à ça », indique-t-elle.
Pour elle, c’était important de sortir de sa zone de confort.
« J’aime les défis. Pour moi, c’est important d’être dans un endroit qui n’est pas confortable, ce n’est pas simple pour moi ici, j’ai besoin de travailler dur pour y arriver », révèle-t-elle.
Tav, qui a fini la formation d’ingénieur de vol sur un avion cargo, a reconnu qu’il était parfois difficile d’être la seule femme parmi les 40 pilotes de la promotion, soulignant qu’à la fin d’une « semaine très dure » elle rentrait dans sa chambre, seule.
« D’un autre côté, c’est une chance de dire, ‘Ok, ce n’est pas grave’. Je suis une fille et c’est un garçon mais ce n’est pas grave ; nous avons tous les deux un rôle à jouer, nous voulons tous les deux faire de notre mieux et c’est ce qui compte », a-t-elle déclaré.
Interrogée sur la question de savoir si elle est dérangée par les commentaires autour du fait qu’elle est la seule pilote femme à avoir fini la formation, Tav répond que ces remarques en disent plus sur la société israélienne que sur elle.
« C’est révélateur pour nous en tant que société, sur la manière dont nous considérons une jeune femme religieuse – ou une jeune femme tout court, ou le fait d’être différent dans un groupe… qui semble homogène vu de l’extérieur », estime-t-elle.
« Pour moi, ce n’est pas la leçon à retenir, ce n’est pas intéressant », continue Tav, soulignant que le plus important est d’être en accord avec sa profession.
« Au final, il faut surtout savoir ce que l’on veut apporter avec soi dans son travail, pas seulement les caractéristiques extérieures ».
« Ce qui compte vraiment, c’est qui je suis dans le cockpit, comment je travaille avec une équipe, et mon niveau de professionnalisme », a-t-elle déclaré.
Après avoir terminé la prestigieuse formation, Tav est devenue l’une des dizaines de pilotes femmes à obtenir le diplôme de pilote de l’armée de l’Air israélienne depuis qu’une décision de la Cour suprême a imposé à l’armée d’autoriser les soldates à intégrer le programme.
L’écrasante majorité de pilotes de combat de l’armée de l’Air israélienne sont toujours des hommes, cela est surtout dû aux impératifs physiques très exigeants de la profession.