France : alerte maximale, « atmosphère de jihadisme » selon les autorités
La France est passée en alerte "urgence attentat", niveau le plus élevé du dispositif Vigipirate et jusqu'à 7 000 soldats de la force Sentinelle vont être déployés sur le territoire
Au lendemain d’une attaque islamiste meurtrière dans le nord de la France, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a dénoncé samedi une « atmosphère de jihadisme » dans le pays, placé en état d’alerte maximale.
La crainte d’un nouvel attentat a entraîné l’évacuation dans l’après-midi, après des alertes, de deux des monuments français les plus connus au monde, le musée du Louvre puis le château de Versailles. Mais il n’y avait finalement « pas de menace réelle », selon M. Darmanin.
« Une atmosphère de jihadisme, de passage à l’acte est évidente depuis samedi dernier », date de l’attaque meurtrière sans précédent du groupe terroriste islamiste palestinien du Hamas contre Israël, qui a entraîné des représailles ciblées contre le groupe terroriste sur la bande de Gaza, a affirmé le ministre.
Depuis, 189 actes antisémites ont été recensés, donnant lieu à 65 interpellations, dont 23 d’étrangers.
A Arras, dans le nord de la France, un professeur, Dominique Bernard, a été poignardé à mort vendredi devant le collège-lycée où il enseignait, par un jeune homme radicalisé, né dans la république russe à majorité musulmane d’Ingouchie.
Cette attaque qui a également fait trois blessés, qualifiée par le président Emmanuel Macron de « terrorisme islamiste », a provoqué une onde de choc, en particulier dans le monde enseignant.
Dominique Bernard, agrégé de lettres modernes, professeur de français, admirateur de Julien Gracq, cofondateur de l’Université Populaire d'Arras, père de trois filles, homme de courage.
1966-2023 pic.twitter.com/Ihz6KwU85x
— ???????????????????????????????? ???????????????????????????????? (@phwatrelot) October 13, 2023
Elle survenait presque trois ans jour pour jour après l’assassinat d’un autre enseignant, Samuel Paty, décapité le 16 octobre 2020 pour avoir montré des caricatures de Mahomet en classe.
La France est passée dès vendredi soir en alerte « urgence attentat », niveau le plus élevé du dispositif Vigipirate. Jusqu’à 7 000 soldats de la force Sentinelle (lutte antiterroriste) vont être déployés sur le territoire « d’ici à lundi soir et jusqu’à nouvel ordre », selon l’Elysée.
Il existe, selon Gérald Darmanin, un « lien » entre la situation au Proche-Orient et « le passage à l’acte » de cet homme, Mohammed Mogouchkov, fiché S, âgé d’une vingtaine d’années et arrivé en France en 2008, selon une source policière.
Cet ancien élève de l’établissement était suivi depuis peu par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), en raison, selon le ministre, des liens avec son père, fiché également et expulsé en 2018, et son frère, emprisonné pour sa participation à un attentat visant l’Elysée.
Il avait été interpellé jeudi par la DGSI « pour vérifier s’il n’avait pas d’arme » et contrôler son téléphone, a précisé M. Darmanin, excluant une « faille des services de renseignements ».
Depuis son arrestation, l’assaillant, de nationalité russe et qui a crié « Allah Akbar » selon plusieurs témoins, « ne s’est pas expliqué », a indiqué à l’AFP une source policière.
Dix autres personnes dont plusieurs membres de sa famille étaient en garde à vue samedi après-midi, a indiqué une source policière.
Expulsion systématique
Dominique Bernard, professeur de français au collège, a été tué devant l’établissement où un autre enseignant, un agent technique et un agent d’entretien ont été blessés.
Originaire d’Arras, ce professeur agrégé de lettres modernes de 57 ans était père de trois filles et marié à une enseignante.
Une minute de silence sera respectée dans les établissements scolaires de France lundi à 14H00 en hommage aux victimes d’attentats contre l’école, a annoncé le ministre de l’Education, Gabriel Attal.
« Je veux le dire à tous les enseignants : nous serons au rendez-vous pour assurer votre sécurité », a assuré samedi la Première ministre Elisabeth Borne. « Nous ne céderons rien à la violence », a-t-elle ajouté
Des CRS patrouillaient samedi devant la cité scolaire Gambetta d’Arras, où une cellule psychologique avait été mise en place.
« C’est mieux de laisser le lycée ouvert, que tout le monde puisse venir, parler, pour faire son deuil », a estimé Camille, 17 ans, témoin de l’attaque.
L’attentat met le gouvernement sous pression, la droite exhortant à instaurer « l’Etat d’urgence », tandis que l’extrême droite pointe des « failles ».
Le ministre de l’Intérieur a demandé samedi l' »expulsion systématique de tout étranger (…) considéré comme dangereux par les services de renseignement ».
« La ligne de fermeté est extrêmement claire », a déclaré Gérald Darmanin, lors d’une conférence de presse. « Identification partout sur le territoire national de ceux qui sont dangereux, retrait systématique du titre de séjour pour ceux qui sont étrangers, expulsion systématique de tout étranger (…) en effet considéré comme dangereux par les services de renseignement », a-t-il énuméré.
Depuis l’attaque de Charlie Hebdo en janvier 2015 (12 victimes), une vague d’attentats jihadistes a fait plus de 260 morts en France. Selon Gérald Darmanin, 43 projets d’attentats islamistes en France ont été déjoués depuis 2017.