France: Les Juifs déplorent la remise d’un prix à un journaliste pro-Hamas par la région de Normandie
Motaz Azaiza va recevoir le Prix Liberté lors des cérémonies du D-Day pour "avoir raconté l'histoire de ceux qui sont touchés par la guerre" malgré son éloge apparent du groupe terroriste et son refus de condamner le 7 octobre
Au 80e anniversaire de l’invasion des Alliés dans l’Europe qui était occupée par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, la région de Normandie, en France, a choisi de remettre un prestigieux prix à un journaliste palestinien qui a accusé Israël de commettre « un génocide » et qui a pris la défense des atrocités qui avaient été commises par les terroristes du Hamas, le 7 octobre.
La région a été critiquée par les Juifs de France et par un groupe juif international pour son projet de remettre son Prix Liberté à Motaz Azaiza lors d’une cérémonie prévue le 4 juin au Zénith de Caen – un prix qui sera accompagné d’un chèque de 25 000 euros.
Azaiza va être distingué pour « son combat pour le droit à l’information qui permet de diffuser des informations sur le conflit et de mettre en lumière les destins des populations affectées par cette guerre », a écrit la région sur internet.
Au mois de mars, Azaiza avait écrit sur Instagram – où il est suivi par plus de 18 millions d’abonnés – qu’il ne pensait pas que les atrocités commises par les terroristes du Hamas, le 7 octobre, devaient nécessairement être condamnées. Environ 3 000 hommes armés étaient entrés dans le sud d’Israël, ce jour-là, semant la désolation dans les communautés frontalières. Ils avaient tué près de 1 200 personnes, des civils en majorité, et ils avaient kidnappé 251 personnes, prises en otage dans la bande de Gaza.
« Si vous voulez qu’un Palestinien qui subit un véritable un siège condamne cela, vous devez déclarer que vous condamnez ce qu’Israël a fait aux Palestiniens avant le 7 octobre, depuis 1948 et pendant le génocide, et après. Les Palestiniens ne sont pas des terroristes ; Israël tue tous les jours comme si c’était un devoir de le faire pour les Israéliens. Israël est un État terroriste », avait écrit Azaiza en date du 11 mars, après avoir quitté Gaza pour sa nouvelle base au Qatar.
Selon le ministère de la Santé de Gaza, qui est placé sous le contrôle du Hamas, environ 37 000 Palestiniens sont morts dans le cadre de l’opération militaire israélienne en cours – une offensive qui avait été lancée après le 7 octobre – jurant de démanteler le régime du groupe terroriste et d’obtenir la remise en liberté des otages. Ces données, qui sont concrètement invérifiables, ne font aucune différence entre civils et hommes armés. Israël, de son côté, affirme avoir tué au moins 15 000 terroristes dans le cadre de sa guerre.
Selon le groupe de veille Palestinian Media Watch, une organisation non-gouvernementale israélienne qui suit les médias palestiniens, Azaiza avait aussi publié un message fêtant les hommes armés du Hamas sur Instagram.
Une image datée du mois de mai et qui a été postée sur un compte qui, selon le groupe de veille, semble appartenir à Azaiza montre un individu portant une cagoule et un brassard du Hamas s’agenouillant pour faire la prière, le front appuyé contre un fusil d’assaut de modèle AK-47. « Parmi les vertueux, il y a des hommes qui font preuve de loyauté à l’égard de leur serment [de se battre au nom d’Allah et de sacrifier leur vie] », note une légende écrite sous une photo de la chaîne Telegram.
Une autre photo montre des terroristes du Hamas en train de prier, avec pour légende « Par Allah le tout-puissant, ces anges se battent à nos côtés. Un message de l’un des moudjahidines ».
Le chaîne mentionne le nom d’Azaiza et, parmi d’autres photos, il y a celles d’une personne qu’il décrit comme étant sa grand-mère.
Sur X, Azaiza a téléchargé une photo d’Adolf Hitler et de son conseil qu’il a juxtaposée à un cliché montrant le Premier ministre Benjamin Netanyahu et les ministres de son cabinet.
Dans le passé, Azaiza a travaillé pour l’UNRWA, l’agence controversée de l’ONU chargée des réfugiés palestiniens, selon le Journal du Dimanche. Les responsables israéliens accusent depuis longtemps l’UNRWA d’ignorer son obligation de neutralité politique, faisant appel à des employés qui mènent des campagnes anti-israéliennes actives. Quelques salariés de l’agence avaient participé aux atrocités commises le 7 octobre et des milliers de plus entretiendraient des liens avec le Hamas et avec d’autres organisations terroristes, affirme Israël.
Azaiza n’a pas répondu à une demande de réaction du Times of Israel.
Il a écrit samedi, sur les réseaux sociaux, qu’il faisait l’objet « d’une campagne de diffamation de la part de sionistes » qui chercheraient à annuler sa remise de prix – une réponse apparente aux objections soulevées par les responsables des communautés juives de France.
Nassim Lévy, le président de l’Association Culturelle Israélite de Caen et des associations israélites de la Région Normandie, a écrit dans une lettre adressée aux autorités de la région que le choix d’Azaiza était « immoral et inapproprié dans la mesure où Azaiza est un proche du Hamas, auquel il est associé ».
Azaiza avait quitté Gaza, au mois de janvier, à bord d’un avion militaire qatari, a noté le Journal du Dimanche. Il doit assister à une cérémonie officielle qui sera organisée en Normandie en présence de vétérans du D-Day – le jour où les forces alliées avaient débarqué sur les plages de la région en 1944.
Très rares sont les Gazaouis qui ont pu quitter la bande de Gaza comme l’a fait le photo-journaliste – un départ que certains de ses critiques attribuent aux liens présumés qu’il entretient avec le Qatar, avec le Hamas ou avec les deux. Azaiza a été présenté dans un grand nombre de médias occidentaux et notamment dans Time Magazine, qui lui a accordé une place dans son classement des cent personnalités les plus influentes en 2024.
Dimanche, le rabbin Menachem Margolin, le président de l’Association juive européenne (EJA) dont le siège est à Bruxelles, s’est indigné de la décision prise de distinguer Azaiza à une date déterminante de la défaite du nazisme.
Azaiza avait fait partie des sujets abordés lors d’une conférence de trois jours qui avait été organisée par l’EJA à Amsterdam et qui avait été consacrée à l’explosion des crimes de haine antisémite en Europe dans le sillage du 7 octobre.
« A l’anniversaire de l’invasion des Alliés qui avaient débarrassé l’Europe du fléau du nazisme, un djihadiste qui réside au Qatar et qui glorifie des assassins méprisables, qui incite à la haine, est honoré. C’est un autre signe de la perte de boussole morale qui se propage dans tout l’Occident », a déploré Margolin.
« Nous faisons face à une cécité morale dans les Parlements, dans les universités, dans les rues, dans les stades – et c’est très exactement la raison pour laquelle nous avons programmé notre conférence d’urgence, unissant groupes juifs et pro-israéliens, à Amsterdam », a-t-il continué.
Margolin a expliqué que ses avocats étaient en train d’examiner si le prix qui sera remis en Normandie ne contrevient pas aux lois adoptées contre l’apologie du terrorisme sur le territoire français.
« Nous ne nous retrouvons pas, cette fois-ci, pour des discussions théoriques mais pour trouver des moyens pratiques de riposter », a-t-il ajouté.
Ni le bureau de Hervé Morin, le président de la région de Normandie, ni l’Institut international pour les droits de l’Homme et pour la paix, une organisation non-gouvernementale impliquée dans la remise du Prix Liberté à Azaiza, n’ont répondu à une demande de commentaire du Times of Israel sur les critiques émises par les groupes juifs et pro-israéliens.
Dans une déclaration faite au Journal du Dimanche, néanmoins, Hervé Morin a estimé « que ce vote n’est pas celui de la région Normandie, qui n’intervient à aucun moment dans la sélection des dossiers, des nominés ou du lauréat, mais bien celui de la jeunesse du monde entier, et cela, à chacune des étapes ». En effet, selon France info, Azaiza a été élu « par un jury de 14 265 jeunes issus de 116 pays différents, encadré par l’Institut international des droits de l’Homme et de la paix. »
Ce vote sur internet, sponsorisé par la région, détermine le lauréat parmi trois candidats sélectionnés par l’Institut. Bertrand Deniaud, vice-président de la région et en charges des lycées et de l’éducation, devrait assister à la remise des prix, a signalé le Journal du Dimanche.