Israël en « pourparlers avancés » pour un accord visant à mettre fin aux hostilités avec la Syrie
L'accord ne viserait pas une paix totale, Damas préférant un accord limité ; le ministre des affaires étrangères Saar souligne que le plateau du Golan restera israélien même si deux les pays normalisent leurs relations

Israël et la Syrie mènent actuellement des « négociations avancées » sur un accord bilatéral destiné à mettre fin aux hostilités entre les deux pays, a déclaré lundi un haut responsable israélien au Times of Israel.
Les entretiens sont axés sur la coordination autour des questions de sécurité, a indiqué ce responsable, qui ne s’est toutefois pas risqué à spéculer sur l’échéance de la conclusion d’un accord de paix complet entre les deux États ennemis.
« Cela pourrait-il évoluer vers quelque chose au-delà [des arrangements de sécurité] ? », s’est interrogé ce responsable. « Nous allons maintenant attendre, et voir. Pour l’instant, rien de concret n’est encore sorti. »
« Il y a un véritable souhait d’étendre les Accords d’Abraham, notamment à la Syrie. Ce n’est un secret pour personne », a poursuivi le responsable.
« Et une opportunité pourrait se présenter. »
Ces États voisins, depuis des décennies, s’opposent dans les différents conflits qui secouent le Moyen-Orient, y compris dans des combats directs et souvent acharnés, de la guerre d’Indépendance de 1948 à la Première guerre du Liban en 1982.

Mais Bachar al-Assad, le dictateur syrien soutenu par l’Iran, a fui le pays en décembre et les nouveaux dirigeants islamistes de Damas voudraient présenter un visage modéré à l’Occident.
En avril, les responsables syriens ont envoyé des antennes en Israël via plusieurs pays européens, dont la Suisse, a fait savoir un diplomate européen au Times of Israel. Ce sont toutefois les États-Unis qui ont pris l’initiative de la médiation.
Israël a d’abord adopté une position belliqueuse envers le nouveau régime syrien. Ces dernières semaines, néanmoins, la rhétorique a changé dans le contexte des efforts menés par les États-Unis pour la conclusion d’un accord entre les deux pays.

Côté israélien, les pourparlers sont menés par le chef du Conseil national de sécurité Tzachi Hanegbi, ont indiqué des responsables hébreux. Hanegbi a confirmé la semaine dernière qu’Israël et le régime syrien étaient en contact direct quotidien, et s’entretenaient sur une possible normalisation.
Lundi également, le ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, a déclaré que dans tout accord de paix potentiel avec la Syrie, « le plateau du Golan doit rester à l’État d’Israël ».
Israël avait pris ce plateau stratégique à la Syrie en 1967, puis adopté une loi annexant effectivement le plateau du Golan en 1981.
De plus, lors de la conférence de presse, Saar a rapporté qu’Israël considérait le Liban, un autre voisin officiellement en état de guerre avec l’État juif, comme un candidat à la normalisation.

Les responsables israéliens ont d’abord qualifié les nouveaux dirigeants syriens de « terroristes » en raison de leur passé lié à Al-Qaïda. L’armée de l’air israélienne a mené une importante campagne de bombardements sur ce qu’elle a identifié comme des cibles militaires dans toute la Syrie. Les hostilités se sont apaisées depuis la mi-mai, quand le président des États-Unis Donald Trump a levé les sanctions contre la Syrie, bouleversant ainsi des décennies de politique américaine, et rencontré le président Ahmed al-Sharaa à Riyad.
Malgré une série de rapports faisant état de l’empressement de Damas à établir des relations diplomatiques avec Israël, des sources syriennes anonymes ont déclaré lundi au média libanais Al-Akhbar qu’il n’y avait pas de consensus ferme au sein du régime syrien sur la question de l’intensification récente des pourparlers de paix sous médiation américaine.
Selon ces sources, contrairement aux affirmations des envoyés internationaux selon lesquelles Sharaa avait « accueilli favorablement » l’idée de liens avec Israël, les entretiens en cours « indiquent qu’une telle démarche ne bénéficie pas d’un véritable consensus, même chez ceux qui sont fidèles à Sharaa ».

Au lieu de cela, des personnalités proches de Sharaa exhortent les médiateurs américains à envisager un accord plus limité, qui déclarerait la fin des hostilités avec Israël sans envisager une paix totale.
Cette résistance à la conclusion d’un accord de paix vient principalement de deux facteurs, ont fait savoir les sources. Premièrement, un tel accord serait difficile à justifier pour le régime, alors que la guerre à Gaza se poursuit et que les Arabes condamnent largement les actions militaires israéliennes. Deuxièmement, des éléments pro-turcs, dans le cercle des proches de Sharaa, craignent que la normalisation ne place la Syrie sous une influence israélienne et saoudienne significative, marginalisant le rôle d’Ankara dans la région.
Dans des informations distinctes suggérant une plus grande ouverture dans les pourparlers en cours, la chaîne d’information libanaise LBCI a indiqué que la Syrie n’exigeait pas qu’un éventuel accord de paix implique la restitution du plateau du Golan. Damas chercherait plutôt à obtenir la reconnaissance du nouveau régime par Israël, un retrait des zones tenues par Tsahal depuis janvier dans le sud de la Syrie, des arrangements de sécurité à déterminer dans le sud et un soutien américain, dont la nature précise reste encore incertaine.
En plus d’exiger que les forces de Damas se retirent du sud de la Syrie, Israël s’est engagé à protéger la communauté druze syrienne, Tsahal frappant des cibles dans le pays à titre « d’avertissement » pour le nouveau régime. Tsahal a également ouvert un hôpital temporaire dans le sud de la Syrie pour soigner les victimes druzes, après que plus de 30 blessés ont été évacués vers des hôpitaux israéliens.

La Syrie n’a pas abordé la question du plateau du Golan dans les négociations avec Israël, a précisé dimanche un responsable syrien à la chaîne publique Kan. La principale préoccupation de Damas reste le retrait des troupes de Tsahal de la zone tampon créée dans le sud du pays après l’effondrement du régime d’Assad.
Ce responsable a ajouté que « les contacts entre Israël et la Syrie pourraient être très significatifs » et que le gouvernement actuel de Damas était « opposé à l’Iran ainsi qu’à ses proxys terroristes, le Hezbollah et le Hamas ».
« La question du Golan n’a même pas encore été évoquée dans les discussions. Il est encore tôt. Mais les Américains sont un facteur essentiel sur ce sujet », a poursuivi le responsable.
La zone tampon désigne une zone définie et placée sous la surveillance de l’ONU, destinée à séparer les forces israéliennes et syriennes. Israël en a pris le contrôle après que les forces fidèles au gouvernement d’Assad ont abandonné leurs positions avant que les groupes rebelles n’atteignent Damas, en décembre.
Pour les Nations Unies, la prise de contrôle de la zone tampon par Israël constitue une violation de l’accord de désengagement de 1974 entre Israël et la Syrie. Israël affirme que l’accord est devenu caduc dès que l’une des parties n’a plus été en mesure de le mettre en œuvre, et que sa prise de contrôle était un geste défensif visant à protéger le pays contre d’éventuelles forces hostiles qui auraient pu exploiter la vacance du pouvoir.

Dimanche, au cours d’une réunion à huis clos, de hauts responsables de la sécurité ont informé les juges en charge du procès du Premier ministre Benjamin Netanyahu de l’existence d’une opportunité de changer le visage du Moyen-Orient et, pour Israël, d’élargir son cercle de paix, notamment avec la Syrie, a rapporté la chaîne publique Kan.
Les chefs du renseignement militaire de Tsahal et du Mossad étaient présents à l’audience. Tous deux ont exposé aux juges les raisons pour lesquelles les jours de témoignage du Premier ministre prévus cette semaine devaient être reportés.
Dans une interview sur Fox News, dimanche, Trump a semblé faire écho à l’optimisme de Netanyahu concernant l’extension des possibilités dans la région, insistant sur le fait que la campagne américaine et israélienne contre l’Iran inciterait davantage de pays à faire la paix avec Israël.
« Nous avons de très grands pays là-bas en ce moment », a-t-il indiqué, « et je pense qu’ils vont pouvoir commencer à nous rejoindre. L’Iran était le principal problème. Je pensais en fait que l’Iran… Durant une certaine période, je pensais que l’Iran rejoindrait les Accords d’Abraham avec tous les autres. »

Abraham Cooper, un rabbin américain qui s’est entretenu en juin avec Sharaa, a dit à la chaîne d’information Kan qu’avec l’aide de Trump, une rencontre entre Netanyahu et le nouveau président syrien était possible.
« Si Trump indique son intention de s’impliquer et dit à Sharaa qu’il va l’aider à réhabiliter son pays, alors tout est possible. À défaut les choses iront plus lentement, étape par étape », a conclu Cooper.