Israël-Hamas : le face à face à haut risque dans les ruines de Gaza
Le groupe terroriste palestinien utilise un nouveau type de missile antichar, le "Yassine 105" et des drones artisanaux d'attaque, comme en Ukraine
L’armée israélienne est engagée dans un « face à face » avec les terroristes du Hamas aux portes de la ville de Gaza, une confrontation ultra-violente, qui laisse présager une phase de combats urbains à haut risque pour les deux camps, selon l’armée israélienne et des experts.
Dans la partie nord de Gaza Ville, selon le porte-parole de l’armée israélienne Daniel Hagari « le face à face » a bel et bien commencé.
« On parle de combats où l’on se voit d’un immeuble à l’autre », a t-il indiqué à la presse.
D’après les premières images israéliennes, dans le nord de la ville de Gaza il ne reste plus que des amas de béton à terre, la plupart des hauts immeubles sont effondrés et la terre est retournée au passage des bulldozers blindés qui ont tout aplati.
Une première ligne de blindés a été formée, derrière laquelle s’abritent les positions israéliennes et d’où partent les incursions de l’infanterie en peu de profondeur, systématiquement, et c’est une nouveauté, appuyées par l’artillerie et l’armée de l’air ainsi que le renseignement.
Ce combat interarmes apparaît comme étant au cœur de la tactique choisie par Israël pour cette offensive, la cinquième contre le Hamas depuis 2005.
Chaque unité au sol a embarqué avec elle un officier de l’air, pour « parler le même langage » aux commandements aériens et maximiser l’efficacité de l’appui opérationnel, a appris l’AFP auprès d’un officier de l’armée de l’air israélienne.
« Le beige se mélange parfaitement au vert », commente-t-il en référence aux couleurs des uniformes de l’aviation et de l’armée de terre.
Au sol, un journaliste de la télévision publique israélienne, Roy Sharon, autorisé à accompagner les troupes, a décrit une « sensation de menace à 360°C » et note également une « avancée très lente et très agressive avec beaucoup de contrôle sur l’environnement », contrairement à la guerre contre le Hezbollah au Liban en 2006.
« C’est la situation de combat la plus extrême, la menace peut surgir de chaque fenêtre, porte, tunnel, de partout », confirme à l’AFP Avi Issacharoff, journaliste et analyste sécuritaire israélien et ancien soldat de l’unité d’élite Douvdevan (et co-créateur de la série Fauda).
Tous les soldats des unités spéciales et d’infanterie s’entraînent régulièrement à Tzeelim, une base du Néguev où ont été recréés plusieurs quartiers de Gaza, des maisons aux minarets sous le nom de « Baladia ».
Pour l’infanterie, côté israélien les soldats de l’unité combattante Givati sont en première ligne et le commandement des divisions constituées pour la bataille viennent de cette brigade, qui « connait Gaza comme personne d’autre », affirme le correspondant militaire du journal israélien Yedioth Aharonot.
Les règles d’engagement de l’armée israélienne, en ce qui concerne les civils, encore au nombre de 300 000 à 400 000 selon l’ONU dans cette zone nord de Gaza, n’ont pas été rendues publiques.
Et le dur des combats urbains, jusqu’au face à face à l’arme automatique, n’a pas encore commencé, que tous les analystes mettent déjà en garde sur la létalité du terrain dans Gaza surpeuplé et au bâti ultra dense.
« En profondeur »
Israël a l’expérience d’une dernière incursion terrestre en 2014, qui avait duré deux semaines et qui s’était limitée à des combats périphériques à la ville de Gaza.
« Le Hamas a eu 15 ans pour préparer une défense en profondeur qui intègre des fortifications souterraines (…) des tunnels de communication, des emplacements et des positions de combat, ainsi que des champs de mines potentiels, des engins explosifs improvisés, des dispositifs explosifs anti-blindés et des bâtiments piégés », énumère le spécialiste en stratégie militaire Michael Knights, du Washington Institute.
Côté Hamas, deux modes opératoires se singularisent : d’abord l’usage répété d’un nouveau type de missile antichar, le « Yassine 105 », et l’apparition de drones artisanaux d’attaque, comme en Ukraine, selon des vidéos postées par la branche armée du mouvement.
Sur l’une de ces vidéos on peut voir, un terroriste palestinien en jean et tee shirt, sortir d’un trou creusé dans la terre, se faufiler dans les buissons, hisser sur son épaule le lance-roquette et tirer à quelques dizaines de mètres un Yassine 105 sur un char Merkava de l’armée israélienne.
« On peut être assez confiants dans les compétences en combat urbain » des Israéliens, relève dans un entretien à l’AFP John Spencer, major américain à la retraite et auteur de référence sur les combats urbains.
« On voit ces techniques de guérilla du Hamas apparaître ça et là, mais je serais plus inquiet du réseau de tunnels », explique John Spencer, qui parle de 1 300 galeries sur 500 km.