La guerre Israël/Hamas source de controverses dans les festivals de films européens
Le Festival du film de Stockholm annule son invitation à l'actrice israélo-américaine Aleeza Chanowitz ; à Amsterdam, des cinéastes pro-palestiniens retirent leurs films
JTA – La guerre entre Israël et le Hamas continue de diviser le monde culturel, avec deux festivals de cinéma européens qui, cette semaine, se sont retrouvés au cœur d’une controverse sur leur traitement des cinéastes israéliens et pro-palestiniens.
La guerre actuelle a éclaté après l’assaut barbare le 7 octobre de terroristes du Hamas, au cours duquel ils se sont déchaînés sur les communautés du sud d’Israël, tuant plus de 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et en kidnappant environ 240.
Le Festival international du film de Stockholm, en Suède, s’est excusé lundi pour ce qu’il a qualifié de « malentendu » au sujet d’une invitée prévue, la cinéaste et actrice israélo-américaine Aleeza Chanowitz. Le festival avait en effet prévu que Chanowitz assiste cette semaine à une projection de sa série comique osée « Chanshi« , qu’elle a créée et dans laquelle elle joue le rôle d’une Américaine orthodoxe qui s’installe en Israël en quête de relations sexuelles avec des soldats.
Or on apprend par les emails retransmis par Chanowitz à Deadline, que les organisateurs ont annulé leur invitation, prétextant dans un premier temps que l’ambassade d’Israël ne pouvait plus prendre en charge les frais de voyage, puis citant une mise en garde de l’ambassade suédoise déconseillant les voyages à destination et en provenance d’Israël.
Lorsqu’elle a les a sommés d’obtenir plus d’informations, les organisateurs du festival lui auraient dit que l’organisation devait « prendre position » et que sa présence au festival risquait de créer une « situation désagréable ».
« Je suis surprise par la lâcheté des organisateurs du festival, et c’est vraiment nul parce que je me réjouissais de passer un bon moment à un événement culturel qui m’aurait permis de faire une pause loin de notre réalité effrayante, de profiter et de discuter d’art « , a confié Chanowitz à Deadline. « J’ai donc moi aussi ‘dû prendre position’ ; je me tiens avec les Juifs, avec les Israéliens de tous bords, je suis pour la paix avec nos voisins et, surtout, je suis de tout cœur, avec les familles des otages ».
Après le retentissement de l’affaire dans la presse israélienne, le festival a présenté ses excuses et proposé une séance de questions-réponses virtuelle à Chanowitz, selon The Hollywood Reporter. Affirmant que des « informations erronées » avaient été diffusées sur les raisons de ce changement, le festival a déclaré dans un communiqué : « Nous sommes terriblement navrés pour cette mauvaise communication qui a causé de la peine à l’équipe et à l’ensemble de la communauté juive ».
Au moment où éclatait la controverse à Stockholm, une autre controverse avait lieu aux Pays-Bas, où une douzaine de cinéastes ont retiré leurs œuvres de la programmation du Festival international du documentaire d’Amsterdam en raison de sa position sur le slogan « From the River to the Sea » (du fleuve à la mer).
Le collectif, ainsi que l’Institut du film palestinien, ont reproché aux organisateurs du festival d’avoir condamné une manifestation pro-palestinienne organisée lors de la soirée d’ouverture. Au cours du rassemblement, les manifestants avaient déployé une banderole sur laquelle on pouvait lire « Du fleuve à la mer, la Palestine sera libre », une phrase controversée qui est généralement perçue comme un appel à rayer Israël de la carte.
Affirmant qu’il n’avait pas vu la banderole sur le moment, le directeur du festival, Orwa Nyrabia, a été filmé applaudissant les manifestants. Il a par la suite condamné la banderole à la suite des protestations des cinéastes israéliens, qui ont écrit dans une lettre ouverte : « Nous considérons cela comme une attaque personnelle contre nous ».
Les responsables du festival ont ensuite indiqué que le slogan « ne nous représentait pas et que nous ne l’approuvions en aucune façon ». Nous sommes sincèrement désolés qu’il ait blessé tant de personnes ». Les organisateurs du festival ont également appelé à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza, qu’Israël bombarde depuis plus d’un mois, depuis les attaques du Hamas le 7 octobre, et à l’acheminement de l’aide humanitaire dans la région.
Après cette déclaration, plusieurs réalisateurs pro-palestiniens ont annoncé qu’ils retireraient leurs films de l’événement, et parmi eux au moins un réalisateur iranien.
« J’ai le cœur brisé, je suis trahie et indignée par la calomnie sur le slogan ‘Du fleuve à la mer' », a indiqué la réalisatrice iranienne Maryam Tafakory sur Instagram en retirant son film. « Qualifier ce slogan de ‘blessant’, c’est être contre la fin de l’occupation ».
L’Institut du film palestinien, qui a renoncé à présenter plusieurs de ses films ou à participer aux rencontres du festival, a publié un communiqué dans lequel il affirme que le festival « criminalise injustement les voix et les récits palestiniens ». Alors que l’expression a été criminalisée en Allemagne, l’institut a déclaré qu’elle n’avait pas été interdite aux Pays-Bas. L’institut a par la suite publié une autre déclaration louant le festival pour son soutien au cessez-le-feu.
Parmi les films que l’institut avait prévu de présenter au festival figurait « Bye Bye Tiberias », un documentaire sur la famille de l’actrice palestinienne-israélienne-française Hiam Abbass, surtout connue pour son rôle dans la série HBO « Succession ».
Les controverses de Stockholm et d’Amsterdam reflètent d’autres débats sur Israël qui se sont déroulés dans des espaces artistiques et culturels, notamment au 92NY de New York et au sein de l’équipe du magazine d’art Artforum. Dans les deux cas, les lettres ouvertes critiques à l’égard d’Israël ont entraîné la démission ou le licenciement de membres du personnel de ces institutions.
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.