L’accord-cadre de Kerry est trop vague pour un responsable de l’OLP
L'ancien Premier ministre Ahmed Queri avertit que les négociateurs palestiniens n'accepteront pas le vocabulaire ambigu de l'accord-cadre
Elhanan Miller est notre journaliste spécialiste des affaires arabes
Le langage ambigu de l’accord-cadre américain qui sera prochainement présenté aux Israéliens et Palestiniens pourrait faire échouer les pourparlers de paix, a averti mercredi un haut responsable palestinien.
Ahmed Qurei, un membre du comité exécutif de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) et ancien ministre, a affirmé que les positions actuelles des Américains par rapport à certaines questions clefs des négociations, incluant les frontières, Jérusalem et les implantations ne satisfont pas les besoins de clarté des Palestiniens.
« Rendre le texte ambigu n’aidera pas les parties. Je ne veux pas continuer à débattre sur le sens de telle ou telle [phrase]… ce serait une perte de temps, et les Israéliens de l’autre côté continueront leurs projets sur le terrain pour changer le statut de la Cisjordanie et maintenir la séparation de Gaza de la Cisjordanie, » a souligné Qurai, plus connu sous son nom de guerre Abu Alaa, aux journalistes venus dans son bureau à Abu Dis, Jérusalem Est.
Un document américain soulignant le point de vue de l’administration Obama sur les questions clefs doit être présenté dans les deux prochaines semaines.
Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a rencontré le secrétaire d’État américain John Kerry à Paris mercredi, pour discuter des pourparlers de paix – les Israéliens et les Palestiniens ont suspendu tout contact direct depuis le 5 novembre dernier.
La formule américaine, établie par Kerry parle du « droit palestinien à une capitale à Jérusalem. »
« Nous ne pouvons pas accepter cela, » a exprimé Qurei. « Nous voulons [une mention explicite de] Jérusalem Est comme capitale de la Palestine. »
Il a précisé que la référence à Jérusalem sans distinction entre l’est et l’ouest de la ville reconnaît tacitement l’annexion d’Israël de la partie est de la ville, occupée en 1967.
Alors que Qurei a réaffirmé le refus des Palestiniens de reconnaître Israël comme État juif, prononcé par Abbas lors de son discours à un groupe d’étudiants israéliens dimanche, le membre du comité exécutif de l’OLP, Nabil Amro, a annoncé mardi à la chaîne palestinienne Watan qu’Abbas serait prêt à « s’arranger positivement » sur la question de l’État juif, peut-être en se basant sur la formule de la « Feuille de route pour la paix » de 2003 qui parle du droit d’Israël « de vivre en paix et en sécurité. »
Amro a ajouté qu’Abbas compte sur une « solution créative » de la part des Américains.
Pour les frontières, Kerry a proposé un État palestinien « fondé sur les frontières de 1967, » avec les modifications qui s’appuient « des changements sur le terrain, » faisant ainsi référence aux implantations israéliennes, selon Qurei.
La phrase « changements sur le terrain » est aussi trop vague pour les Palestiniens, a commenté Qurei. « Quels changements ? Ce sont des territoires occupés. Tout changement devrait être inacceptable, mais les parties peuvent discuter d’échanges [de terres]. Ils devraient être minimes et ne pas affecter la vie des Palestiniens ni la contiguïté territoriale. »
« En ce qui concerne les colonies, les États-Unis devraient insérer une clause qui reconnaît spécifiquement leur caractère illégale en vertu de la loi internationale. Les États-Unis ont eux-mêmes voté contre la construction de colonies aux Nations unies, » a dit Qurei.
« Si cela n’est pas reconnu, je pense qu’il sera difficile d’arriver à un accord, » a-t-il ajouté.
Un autre écart entre les positions américaines et palestiniennes concerne le « droit au retour » des réfugiés palestiniens et de leurs descendants. Les Américains rejettent la notion d’un droit au retour palestinien, alors que les Palestiniens insistent sur la formule de l’Initiative de paix arabe d’une solution « juste et convenue, » basée sur la Résolution 194 de l’ONU.
Quant à la question de sécurité, Qurei affirme que les Israéliens « exagèrent » sur leur besoin de sécurité en vue d’obtenir plus de concessions territoriales des Palestiniens. Les exigences israéliennes visant à maintenir une présence militaire dans la Vallée du Jourdain, ajoute-t-il, sont déraisonnables étant donné des précédentes concessions israéliennes sur la question.
Lors de pourparlers officieux à Stockholm en 2000 avec le ministre israélien des Affaires étrangères de l’époque, Shlomo Ben Ami, les négociateurs israéliens avaient accepté en principe de reconnaître la Vallée du Jourdain comme la frontière est de la « Palestine. » Cet accord verbal avait été applaudi par l’envoyé américain pour les pourparlers, Dennis Ross, selon Qurei.
« Nous sommes d’accord afin de trouver un compromis pour des raisons de sécurité, mais pas au détriment de la souveraineté palestinienne, » a-t-il ajouté.