L’Agence juive réunit ses délégués mais ignore Netanyahu
Sans évolution sur la crise du mur Occidental et le projet de loi sur les conversions, les dirigeants juifs estiment qu'une rencontre avec le Premier ministre “ne s’impose pas”
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
L’Agence juive n’avait pas pris contact avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu à la veille de sa conférence à Jérusalem, et ne lui a pas demandé de s’adresser aux délégués, ni de rencontrer en privé des cadres de l’organisation, a appris le Times of Israël.
Cette indifférence de la part de l’Agence juive met en lumière l’amertume qui entoure le désaccord entre le gouvernement à Jérusalem et les Juifs de Diaspora au sujet de l’espace de prière égalitaire au mur Occidental et des conversions au judaïsme.
En juin, l’Agence juive avait annulé un dîner prévu avec Netanyahu pour protester contre les décisions du cabinet, celle consistant à geler le projet de création d’un espace de prière égalitaire au mur Occidental, et le projet de loi qui octroierait aux ultra-orthodoxes le monopole des conversions au judaïsme en Israël.
Le Conseil d’administration de l’Agence juive réunit trois fois par an des centaines de dirigeants juifs des États-Unis et d’autres communautés de la Diaspora. Le troisième et dernier meeting de l’année 2017 aura lieu dimanche au David Citadel, à Jérusalem.
Les délégués pourront écouter Yuli Edelstein, président de la Knesset, plusieurs ministres et des dizaines de députés. Mais Netanyahu, qui s’adresse généralement au Conseil d’administration au moins une fois par an, n’a pas été convié à prendre la parole ni à rencontrer les cadres de l’organisation. Selon certaines sources, ceci serait lié au fait qu’il n’ait aucunement l’intention d’annoncer un quelconque progrès sur ces questions importantes.
« Certains délégués ont l’impression que le Premier ministre ne propose aucune nouvelle perspective, et c’est pour cela qu’une rencontre ne s’impose pas », a déclaré un membre du Conseil d’administration au Times of Israël, sous couvert d’anonymat.
« Bien que le conseil d’administration de l’Agence juive ne rencontre pas le Premier ministre cette fois-ci, il rencontre un certain nombre de ministres du cabinet, et ouvre son assemblée générale avec un discours du ministre Yuval Steinitz », a déclaré Yigal Palmor, le directeur des affaires publiques et de la communication de l’Agence juive.
« Les dirigeants de l’Agence juive sont en contact permanent avec toute la hiérarchie du bureau du Premier ministre, depuis le Premier ministre lui-même jusqu’au directeur général, en passant par le chef de cabinet et les membres du personnel. Le Premier ministre ne se présente pas plus d’une fois par an aux réunions du conseil de l’Agence juive, et cela n’a rien à voir avec l’annulation du dîner de gala du mois de juin », a-t-il ajouté.
La dernière fois que Netanyahu s’est adressé publiquement à l’Agence juive remonte au mois de novembre 2016, à la Knesset.
En réponse à une demande du Times of Israël, un membre du bureau du Premier ministre a indiqué jeudi que Netanyahu « rencontre les dirigeants de l’Agence juive plusieurs fois par an, mais pas à chaque fois que le conseil d’administration se réunit. »
Le 26 juin, au lendemain de la suspension des projets sur la création d’un espace de prière égalitaire au mur Occidental, l’Agence juive avait annulé un dîner prévu avec Netanyahu et changé « son programme pour les deux jours de réunions à Jérusalem, afin de gérer les ramifications de ces décisions. »
À l’époque, le conseil d’administration avait adopté à l’unanimité une résolution appelant le gouvernement israélien à revenir sur ses décisions, indiquant qu’elles allaient à l’encontre de la vision des pères fondateurs d’Israël et de l’esprit du sionisme.
La résolution marquait la première fois que l’institution – qui date d’avant la création de l’État d’Israël – a explicitement demandé au gouvernement israélien de revenir sur une décision.
Après l’annulation de ce dîner, des cadres de l’Agence juive avaient rencontré Netanyahu à huis-clos, sans parvenir à résoudre la crise. Les dirigeants de Diaspora s’étaient engagés à lutter contre la décision du gouvernement, jusqu’à ce que l’accord initial du mur Occidental, que les ministres ont approuvé en janvier 2016, soit pleinement appliqué.
La rebuffade de l’Agence juive à l’égard du Premier ministre ne veut pas dire que le conseil d’administration ne s’attardera pas sur la crise du mur Occidental et des conversions. Lundi matin, par exemple, les délégués se rendront sur l’espace de prière égalitaire adjacent à l’esplanade principale du mur Occidental avec le ministre de la Coopération régionale, Tzachi Hanegbi, qui a été nommé pour assurer la liaison entre les dirigeants de Diaspora et le gouvernement sur cette affaire.
Les dirigeants juifs estiment que cette réunion représente un effort de la part du gouvernement pour les convaincre que les Juifs non-orthodoxes ont un lieu de prière sur le lieu saint. Les mouvements conservateurs et réformés, ainsi que les communautés juives du monde entier soulignent cependant que certaines améliorations peuvent être apportées sur ce site, en accord avec la décision du cabinet de janvier 2016.
Lors des trois prochaines journées de conférence, quelque 120 membres du conseil d’administration de l’Agence juive rencontreront des dizaines de ministres et de députés en petits groupes. Durant l’une des rencontres, les rabbins Rick Jacobs et Steve Wernick, dirigeants respectifs des mouvements réformés et conservateurs, s’entretiendront avec Ayelet Shaked, ministre de la Justice.
Shaked, membre du parti religieux HaBayit HaYehudi mais laïque, est impliquée dans les initiatives juridiques destinées à changer les lois sur la conversion en Israël.
Certains délégués rencontreront le vice-ministre de l’Intérieur Meshulam Nahari, du parti ultra-orthodoxes Shas, qui est fermement opposé à l’idée de laisser des courants non-orthodoxes prendre un point d’ancrage religieux ou légal en Israël.