L’appel de Trump à vaincre le Hamas, un « chèque en blanc pour Israël » – Matt Brooks
Selon le chef de la RJC, l'ex-président rétablira "la loi et l'ordre" nécessaires pour combattre l'antisémitisme post-7 octobre, alors que les Juifs craignent les attitudes anti-Israël des Démocrates
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

MILWAUKEE, Wisconsin – JTA – En cette période sans précédent pour les Juifs américains, le président de la Coalition juive républicaine (RJC), Matt Brooks, a fait quelque chose de nouveau pour lui, mardi soir : il a pris la parole à la Convention nationale républicaine.
« Le président Trump ramènera la loi et l’ordre afin que les Juifs américains puissent à nouveau porter une kippa et marcher dans les rues sans crainte », a déclaré Brooks dans un discours enflammé, en brandissant une kippa rouge portant le nom de Trump. « Le président Trump mettra fin aux attroupements sur les campus universitaires afin que les étudiants juifs se sentent en sécurité lorsqu’ils se rendent en classe. »
Depuis des décennies, Brooks assiste aux conférences quadriennales qui définissent le programme du parti et la liste des candidats à l’élection présidentielle. C’est la première fois que les organisateurs l’invitaient à s’adresser à la convention, ce qui montre à quel point les Républicains et la campagne de Donald Trump ont l’intention de s’emparer du rôle de protecteur des Juifs.
Lors de la dernière convention en 2020, l’antisémitisme violent était plus souvent identifié aux agitateurs d’extrême droite qui adhéraient aux théories du complot raciste et antisémite sur les immigrants. L’une de ces théories, dont Trump et d’autres Républicains de l’époque se faisaient l’écho, animait l’homme qui avait assassiné onze Juifs dans leur synagogue à Pittsburgh en 2018.
Aujourd’hui, les Juifs américains sont sur les dents, car les rapports d’antisémitisme aux États-Unis ont augmenté depuis le pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël, lors duquel près de 1 200 personnes ont été tuées et 251 autres ont été prises en otage, déclenchant la guerre à Gaza et inaugurant une vague de protestations pro-palestiniennes aux États-Unis.
Les organisations juives ont en partie déplacé leur attention vers les campus universitaires, où les manifestations pro-palestiniennes ont été nombreuses et parfois accompagnées d’affrontements entre étudiants pro-Israël et pro-Palestiniens.

Tout au long de la journée de mardi, la deuxième de la convention qui était axée sur les questions de sécurité, les intervenants ont fait référence aux récentes angoisses des Juifs américains.
La représentante de l’État de New York, Elise Stefanik, dont les interrogatoires musclés menées à l’automne dernier ont entraîné le départ des présidentes de Harvard et de l’Université de Pennsylvanie (UPenn), qui ont été équivoques lorsqu’elle leur a demandé si elles condamnaient les appels au génocide, a déclaré que les manifestations anti-Israël sur les campus reflétaient les normes en vigueur chez les Démocrates.
« Quelle a été la réponse de la gauche radicale sur nos campus universitaires ? », a-t-elle demandé. « Un antisémitisme ignoble a été scandé : ‘Mort à Israël’, ‘Mort aux Juifs’, ‘Mort à l’Amérique’. »
« C’est le parti démocrate [sic] de Joe Biden. Le président Trump ramènera un leadership moral à la Maison Blanche, en condamnant l’antisémitisme », a-t-elle ajouté. En réalité, Biden a notamment dénoncé l’intimidation d’étudiants juifs sur les campus, ainsi que des actes illégaux de la part de manifestants.

Les rivaux les plus acharnés de Trump pendant les primaires, l’ancienne gouverneure de Caroline du Sud Nikki Haley et le gouverneur de Floride Ron DeSantis, l’ont approuvé sans hésitation. Le discours de Haley était extraordinaire, car il y a quelques semaines encore, elle avait déclaré qu’elle voterait pour Trump, mais qu’elle ne le soutiendrait pas.
Pourquoi a-t-elle changé d’avis ? En partie, a-t-elle dit, à cause des dangers auxquels, selon elle, les Juifs sont confrontés. « La communauté juive est confrontée à une montée obscène de l’antisémitisme », a déclaré Haley.
Brooks a déclaré que Trump était la clé pour freiner la haine des Juifs. « Ici, chez nous, sous Donald Trump, nous mettrons un terme à la marée montante de l’antisémitisme », a-t-il déclaré dans son discours.
L’identification du conservatisme à la défense des Juifs était en évidence à un demi-pâté de maisons de là, où Concerned Women of America a installé une tente rose où les femmes se sont interviewées les unes les autres sur les bénédictions que les bébés apportent.

À proximité, un bus rose portait l’inscription « American Women Want » (« Les femmes américaines veulent »), avec des réponses sous forme de faux graffitis : « L’Amérique d’abord », « Le sport pour les filles, uniquement pour les filles », « Choisissez la vie, comme l’a fait votre mère », « Tenez bon pour Israël » et « Arrêtez l’antisémitisme ». Sous ce dernier slogan, quelqu’un avait griffonné une partie d’un vrai graffiti : « Le Christ est roi », accompagné d’un crucifix.
Les Juifs américains ont historiquement voté majoritairement pour les Démocrates dans les scrutins nationaux, et les sondages montrent qu’une nette majorité d’entre eux prévoient de voter pour Biden, le président sortant et probable candidat démocrate en novembre. Toutefois, la proportion de Juifs votant pour les Démocrates a diminué au cours des dix dernières années, selon les sondages, et certains Juifs démocrates sont, depuis le 7 octobre, mal à l’aise face à l’attitude du parti à l’égard d’Israël et de la lutte contre l’antisémitisme.
L’un d’entre eux, Shabbos Kestenbaum, diplômé de l’Université de Harvard, doit s’adresser à la convention mercredi. Il a voté pour Bernie Sanders lors des primaires démocrates de 2020 et reste inscrit sur les listes démocrates, mais il se sent abandonné par le parti depuis le 7 octobre. Kestenbaum poursuit Harvard pour avoir omis de protéger les étudiants juifs contre la discrimination l’année dernière.
Linda Stoch, 71 ans, originaire du comté de Palm Beach, en Floride, a déclaré qu’elle avait senti un changement. « Je m’occupe de l’inscription des électeurs et le peuple juif change de vote parce qu’il n’aime pas la façon dont Biden traite Israël », a-t-elle déclaré depuis son siège dans la section des délégués de Floride, où elle a acclamé chaque mention d’Israël et a brandi une pancarte presque aussi grande qu’elle sur laquelle on pouvait lire : « Nous sommes des Juifs pour Trump. »

Stoch hurlait sur fond d’un message enregistré de Trump décrivant ce qu’il a dit être le déclin de la loi et de l’ordre, le thème d’une grande partie de la soirée.
Trump a fait valoir que les politiques frontalières de Biden ont rendu l’Amérique moins sûre. Plus tôt dans la journée, la convention a envoyé aux journalistes une liste de victimes de crimes commis par des sans-papiers. Au cours de la convention, les noms des victimes sont revenus fréquemment, cités par les politiciens et dans les discours déchirants des membres des familles survivantes.
Les anecdotes n’ont pas manqué, mais aucun orateur n’a apporté la preuve que les migrants sont plus enclins à commettre des crimes violents que n’importe quel autre groupe démographique. (De nombreuses études ont montré que ce n’était pas le cas).
Le programme républicain adopté avant la convention promet « la plus grande opération de déportation de l’Histoire des États-Unis », ce qui inquiète les groupes juifs qui ont soutenu l’immigration conformément à l’attitude adoptée de longue date par les Juifs américains de droite et de gauche.

Brooks n’a pas mentionné l’immigration au cours de son discours, qui a plutôt mis l’accent sur la bonne foi du parti républicain à l’égard d’Israël. Mais il a utilisé un langage qui recoupe celui des partisans de l’anti-immigration, qu’il a repris en s’adressant aux journalistes après avoir quitté l’estrade.
« D’aussi loin que je me souvienne, il y a pour la première fois, une véritable insécurité dans la communauté juive », a-t-il déclaré. « Les gens ont peur de marcher dans les rues. »
Niché dans un marché de tentes sur le site de la convention, parmi les boutiques de cadeaux, les points de goodies « Trump », face à une scène gratifiée d’une chanteuse de musique country en bottes de cow-boy blanches et robe bleu clair, se trouvait un point de vente du mouvement Habad Loubavitch.
Le rabbin Dov Lisker, 32 ans, a déclaré que les cibles du stand étaient les Juifs participant à la convention qui souhaitaient manger casher ou participer à l’un des trois offices quotidiens sans avoir à franchir les barrières de sécurité pour se rendre dans les synagogues locales. Mais il a ajouté qu’un nombre important de non-Juifs s’arrêtaient également pour exprimer leur solidarité.
« Ils nous disent qu’ils sont désolés de ce que vous et votre peuple traversez », a déclaré Lisker.
Brooks a reproché à Biden d’avoir retenu la livraison à Israël de bombes de 900 kg, le président expliquant ne pas vouloir qu’elles soient larguées sur des zones très peuplées à Gaza.
Trump a également critiqué la poursuite par Israël de la guerre contre le groupe terroriste palestinien du Hamas, tout en affirmant que l’armée israélienne devrait être autorisée à « terminer le travail rapidement ».
S’adressant aux journalistes à l’issue de son discours, Brooks a déclaré que ce message équivalait à un « chèque en blanc pour Israël ».
« Si vous devez bombarder la zone, faites-le. Faites-le. Enlevez le pansement. Finissez le travail parce que le Hamas doit être détruit », a déclaré Brooks.
« Cela dure depuis des mois et des mois. Tout ce que [Trump] dit, c’est que le temps n’est pas l’allié d’Israël. Plus cela dure, plus le soutien de l’opinion publique s’érode, plus le soutien international s’érode, et le point de vue de M. Trump est de faire ce qu’il faut, d’en finir et de se retirer », a ajouté Brooks.