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L’attentat déjoué contre le mouvement ‘Habad à Athènes, un aperçu des complots terroristes et antisémites de l’Iran

Depuis 2020, la République islamique serait à l'origine d'au moins 33 enlèvements et meurtres déjoués de responsables et autres cibles juives et israéliennes en Occident - un chiffre probablement en-deçà de la réalité

Des femmes entrent dans un restaurant juif qui aurait été la cible d'une tentative iranienne d'attentat dans le centre d'Athènes, en Grèce, le 28 mars 2023. (Crédit : Angelos Tzortzinis / AFP)
Des femmes entrent dans un restaurant juif qui aurait été la cible d'une tentative iranienne d'attentat dans le centre d'Athènes, en Grèce, le 28 mars 2023. (Crédit : Angelos Tzortzinis / AFP)

ATHENES, Grèce (Reuters) – Alors que le conflit entre l’Iran et Israël gagne en intensité, Téhéran fait trembler l’Occident avec une vague de tentatives d’attentats et de tentatives d’enlèvements à l’encontre de cibles qui se trouvent en Europe et aux États-Unis.

Washington et ses alliés ont fait état d’une forte augmentation de complots liés à la république islamique, ces dernières années. Depuis 2020, il y a eu au moins 33 tentatives d’assassinat ou d’enlèvement en Occident qui, selon les autorités locales ou israéliennes, étaient liées à l’Iran, a constaté Reuters qui a pu examiner des documents judiciaires et les retranscriptions de déclarations faites publiquement par des responsables gouvernementaux.

Parmi les cibles présumées les plus récentes, il y avait un bâtiment abritant à la fois un centre juif et un restaurant casher qui était situé dans le centre d’Athènes.

Depuis l’Iran, un Pakistanais répondant au nom de Sayed Fakhar Abbas avait recruté une vieille connaissance qui vivait en Grèce et il lui avait demandé d’attaquer le site, affirment les enquêteurs dans les documents soumis aux autorités judiciaires dans le cadre de l’affaire, un dossier qui a pu être lu par Reuters. Abbas avait indiqué à son contact qu’il travaillait pour un groupe qui le paierait environ 15 000 euros pour chaque homicide réalisé.

Dans un échange WhatsApp datant du mois de janvier 2023 – et qui est présenté dans les documents – les deux hommes avaient discuté de la possible utilisation d’explosifs ou du déclenchement d’un incendie criminel dans le cadre de cet attentat. Abbas avait insisté sur la nécessité de présenter des éléments prouvant la présence réelle d’éventuelles victimes après l’attaque.

« Il y a des agences des services secrets qui sont impliquées », avait-il dit, sans les mentionner explicitement. « Faites les choses de manière à ce que ce soit impossible, pour eux, de déposer plainte pour une raison ou une autre ».

Ces documents jusqu’à présent inédits contiennent des centaines de pages d’éléments qui ont pu être rassemblés au cours de l’enquête pré-procès par les Grecs avec notamment des témoignages, des déclarations faites par les policiers et des détails des échanges qui avaient eu lieu via WhatsApp. Leur objectif : démontrer la façon dont Abbas avait formé son contact qui était, comme lui, un Pakistanais. Ce dernier, Syed Irtaza Haider, devait évoquer aussi facilement la vie et les souvenirs dans le pays d’origine des deux hommes que la mise au point des attaques à venir dans ses discussions avec son commanditaire.

Les autorités grecques ont arrêté Haider et un autre Pakistanais l’année dernière. Elles ont affirmé que les forces de l’ordre avaient contribué au démantèlement d’un réseau terroriste dirigé depuis l’étranger, dont l’objectif était d’infliger des « pertes humaines ». Pour leur part, les deux hommes, qui sont accusés de terrorisme, ne cessent de clamer leur innocence.

Un véhicule de la police grecque transfère deux ressortissants pakistanais soupçonnés d’avoir planifié une attaque contre un centre juif dans le centre d’Athènes, en Grèce, le 31 mars 2023. (Crédit : Angelos Tzortzinis / AFP)

Haider, qui a été libéré de détention provisoire au printemps dernier – une remise en liberté assortie de diverses restrictions – dément toute implication dans un projet d’ordre terroriste. Au cours d’un entretien, ce jeune homme frêle de 28 ans déclare à Reuters qu’il a transmis à Abbas des images du bâtiment mais qu’il avait d’ores et déjà renoncé à mener un attentat quelconque, espérant toucher une rémunération sans pour autant devoir attenter à la vie de qui que ce soit.

« C’était des paroles en l’air, il n’y aurait pas eu de passage à l’acte », se défend-il. Son avocat, Zacharias Kesses, note que Haider n’a « jamais participé de manière substantielle dans sa vie » à une activité illégale.

Le chef présumé de la bande, Abbas, fait lui aussi l’objet d’accusations liées au terrorisme. Au Pakistan, il est actuellement recherché parce qu’il est soupçonné de meurtre, a indiqué un responsable de la police pakistanaise. L’individu est toujours en cavale et il a été impossible d’entrer en contact avec lui pour obtenir une réaction dans le cadre de cet article. Le troisième suspect n’a pas non plus pu être contacté. Il a nié avoir commis des actes répréhensibles, selon Iraklis Stavaris, un avocat qui l’a représenté lors de sa mise en examen.

La police grecque s’est refusée à tout commentaire. L’affaire est actuellement examinée par les autorités judiciaires qui décideront de la tenue d’un éventuel procès, a expliqué l’avocat de Haider.

Le Mossad, qui a pris part à l’enquête, a déclaré que ce projet d’attentat avait été orchestré par l’Iran dans le cadre d’un réseau multinational qui trouve ses racines au sein de la république islamique. De son côté, Israël a refusé de commenter l’affaire et les activités du Mossad.

L’Iran nie avec force les affirmations faites par l’agence israélienne de renseignement. Les techniques opérationnelles qui ont été utilisées correspondent toutefois aux modèles qui ont pu être observés dans le cadre d’autres complots iraniens présumés. Parmi ces modèles, il y a notamment le type de cible – des civils israéliens ou Juifs – et l’intervention d’assassins qui ne sont pas iraniens. Des ressortissants pakistanais apparaîtraient ainsi dans deux autres affaires que Reuters a été en mesure d’examiner.

Les cibles choisies dans le cadre d’autres complots présumés, ces derniers temps, ont compris de hauts-responsables américains, des journalistes iraniens et d’autres personnes de la diaspora. L’ancien président des États-Unis, Donald Trump, a été informé par les services de renseignement américains de l’existence de « menaces d’assassinat réelles et spécifiques de la part de l’Iran », a récemment commenté son équipe de campagne. Téhéran a publiquement nié être impliqué dans des complots présumés et précis aux États-Unis.

Brett Holmgren, secrétaire d’État américain adjoint au renseignement et à la recherche, s’exprimant lors d’une audience de la commission du renseignement du Sénat américain, au Capitole, à Washington, le 11 mars 2024. (Crédit : Mark Schiefelbein/AP)

Cette guerre de l’ombre se joue également sur le sol européen – c’est d’ailleurs en Europe que la majorité des complots présumés dont Reuters a eu connaissance sont ourdis.

« Depuis 2020, l’Iran a renforcé de manière considérable ses complots meurtriers à l’encontre d’anciens responsables américains, de dissidents iraniens et des intérêts juifs et israéliens aux États-Unis et à l’étranger », indique Brett Holmgren, directeur par intérim du National Counterterrorism Center, une agence américaine de coordination des services de renseignement.

Téhéran a accusé à son tour ses rivaux d’avoir commis des actes terroristes, soulignant les assassinats, par Israël et par les États-Unis, de hauts-responsables de ses forces de sécurité.

Les représentants de la mission iranienne auprès des Nations unies à New York ont déclaré à Reuters que la république islamique « n’a ni l’intention ni le projet de se livrer à des opérations de type assassinat ou enlèvement, que ce soit en Occident ou dans tout autre pays ». Elle a qualifié ces accusations « d’affabulations » destinées à « détourner l’attention des atrocités commises par le régime israélien » dans le conflit en cours à Gaza.

Le guide suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, a, au fil des ans, appelé à plusieurs reprises à la fin de l’État d’Israël – et Téhéran est régulièrement accusé d’antisémitisme par les politiciens américains et occidentaux. L’Iran, pour sa part, indique respecter le judaïsme mais s’opposer à Israël.

Cette augmentation récente des tentatives d’attaques présumées intervient alors que les tensions entre la république islamique et Israël grimpent actuellement en flèche.

L’Iran a a lancé, mardi dernier, de vastes frappes en direction du sol israélien, avec des tirs de missiles balistiques qui ont obligé des millions de personnes à trouver refuge dans des abris antiaériens, dans un contexte d’escalade du conflit opposant l’État juif au Hezbollah libanais, un proxy de Téhéran. Israël a également récemment annoncé que le pays avait déjoué un complot d’assassinat soutenu par l’Iran, complot qui visait des personnalités de premier plan.

Le guide suprême iranien Ali Khamenei tenant un fusil alors qu’il prononce un sermon dénonçant Israël et justifiant le pogrom perpétré par le Hamas le 7 octobre en Israël, à Téhéran, le 4 octobre 2024. (Crédit : Capture d’écran X ; utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur les droits d’auteur)

Des assassins embauchés pour la cause

Le décompte qui a été effectué par Reuters, en ce qui concerne les complots iraniens, a compris les incidents qui auraient été orchestrés par la république islamique et ceux dont il s’est avéré qu’ils l’ont réellement été. Il a englobé les incidents menés au nom de l’Iran et ceux qui ont été dirigés par une personne qui se trouvait sur le sol iranien, ou par des individus qui entretenaient des liens de proximité avec le pays.

Ce décompte est probablement sous-estimé, car il ne contient que les affaires où les autorités en place avaient publiquement accusé la république islamique d’être impliquée d’une manière ou d’une autre. Certains gouvernements hésitent à dénoncer ouvertement l’Iran pour des raisons diplomatiques, selon Matthew Levitt qui est le directeur du programme de lutte contre le terrorisme au sein du think-tank Washington Institute for Near-East Policy.

Le directeur du Mossad, David Barnea, avait dit, l’année dernière, qu’au cours des douze mois précédents, les services de renseignement israéliens avaient collaboré avec des partenaires internationaux pour perturber les activités de 27 équipes qui tentaient d’organiser des attentats « orchestrés, commandités et dirigés par l’Iran » à l’étranger. Israël a refusé tout commentaire détaillé sur cette information.

L’une des principales tendances, parmi les complots présumés qui ont été recensés par Reuters, est le recours à des tueurs à gages – y compris à des individus évoluant dans le milieu du crime organisé ou à des membres de gangs. Washington et ses alliés affirment que cette pratique vise à dissimuler tout lien avec la République islamique.

Au mois de décembre, un tribunal allemand avait condamné un homme irano-allemand à deux ans et neuf mois de prison pour avoir planifié un incendie criminel contre une synagogue, au nom du régime des ayatollahs. Après avoir pris connaissance des mesures de sécurité mises en place autour de la synagogue de Bochum, il avait lancé un cocktail Molotov sur un bâtiment voisin, avait déclaré le tribunal régional de Düsseldorf. L’homme avait ensuite reconnu avoir jeté le cocktail Molotov sur le bâtiment, selon les juges.

Le chef du Mossad, David Barnea, assistant à une cérémonie au mémorial de la Shoah de Yad Vashem ,à Jérusalem, le jour de la commémoration de la Shoah, le 5 mai 2024. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)

Faisant écho à l’affaire grecque, il avait été recruté par un homme qui vivait en Iran – qui avait, lui aussi, la double nationalité irano-allemande et qui fait actuellement l’objet d’une enquête en Allemagne pour deux meurtres sans rapport avec cette affaire. La Cour, lors du procès, a fait savoir que l’individu qui se trouvait en Iran avait suivi les ordres donnés par « des agences gouvernementales » iraniennes. Une affirmation que Téhéran avait qualifiée de « sans fondement ».

Aux États-Unis, au moins cinq dossiers liés à des assassinats ou à des kidnappings présumés en lien avec l’Iran ont été portées devant la justice depuis 2020. Trois d’entre eux concernaient des complots de meurtre pour le compte d’un tiers.

Les procureurs ont récemment inculpé un Pakistanais qui, selon eux, entretenait des liens étroits avec l’Iran, dans le cadre d’une tentative d’assassinat – déjouée – prenant pour cible un homme politique ou un responsable américain. Ce projet était né dans le sillage de la mort du commandant Qassem Soleimani, un responsable de premier plan du Corps des gardiens de la révolution, qui avait été tué lors d’une frappe américaine, au mois de janvier 2020.

C’est l’ancien président des États-Unis, Trump, qui était la cible privilégiée du suspect mais ce dernier, qui avait commencé à échafauder son projet en 2024, ne comptait toutefois pas l’assassiner, selon un proche du dossier – cette information avait été rendue publique par Reuters.

Après avoir séjourné en Iran, le suspect, Asif Merchant, avait quitté le Pakistan pour les États-Unis dans le but de recruter des hommes de main pour fomenter le complot, selon une plainte qui avait été déposée au mois de juillet. Merchant a finalement été mis en examen, le mois dernier, pour avoir tenté de commettre un acte de terrorisme et pour avoir commandité un meurtre. Il a plaidé non-coupable. Son avocat n’a pas répondu à nos demandes de commentaires.

Après la mort de Soleimani, le président iranien Khamenei avait déclaré qu’une vengeance sévère attendait les responsables « criminels ». La mission iranienne auprès de l’ONU a fait savoir à Reuters que la politique de Téhéran consistait à poursuivre légalement les personnalités endossant la responsabilité de l’assassinat de Soleimani.

Le commandant principal des Gardiens de la révolution, le général Qassem Soleimani, (au centre), assiste à une réunion avec le Guide suprême, l’Ayatollah Ali Khamenei (hors cadre) et les commandants des Gardiens de la révolution à Téhéran, Iran, le 18 septembre 2016. (Bureau du Guide suprême iranien via AP)

Opérations mortelles

Une journaliste irano-américaine, critique de premier plan de la république islamique, avait été la cible d’un autre projet d’assassinat aux États-Unis.

Selon les procureurs, les membres d’un groupe appartenant au milieu du crime organisé, en Europe de l’Est, avaient tenté d’assassiner la journaliste sur ordre d’un homme, en Iran. Un Azéri vivant aux États-Unis avait reçu des instructions et un paiement de 30 000 dollars de la part d’un individu, un résident de la république islamique. Selon les procureurs, l’Azéri s’était présenté au domicile de la journaliste à Brooklyn. Il avait entre les mains un fusil d’assaut de type AK-47.

La cible, Masih Alinejad, a déclaré à Reuters qu’elle avait été profondément choquée lorsque les autorités américaines l’avaient informée que l’homme armé était venu chez elle. Elle a dit qu’elle avait bien entendu quelqu’un à la porte, mais qu’elle n’avait pas ouvert cette dernière parce qu’elle était au beau milieu d’un entretien par visioconférence.

Alinejad, qui fustige ouvertement les lois iraniennes relatives au port du voile pour les femmes, avait déjà été la cible d’un complot d’enlèvement commandité par Téhéran, selon les procureurs. Une information qui a été démentie par l’Iran.

Alinejad, qui est âgée de 48 ans, a raconté qu’elle avait été placée dans l’obligation d’abandonner son domicile, laissant derrière elle amis et voisins pour trouver des refuges temporaires. Elle a noté qu’elle a dû déménager à près de vingt reprises, ces dernières années, sous la protection de la police américaine. Elle et son mari ont été séparés de leurs beaux-enfants pendant une longue période, a-t-elle ajouté.

« Nous ne nous sentons plus en sécurité », a déploré Masih Alinejad, évoquant les dissidents iraniens qui, comme elle, vivent aux États-Unis.

Masih Alinejad, opposante au régime iranien basée aux États-Unis, fait le signe de la victoire à la sortie d’un tribunal fédéral à Manhattan, à New York, le 7 avril 2023. (Crédit: AP Photo/Lawrence Neumeister)

Les procureurs américains ont mis en examen trois hommes dans le cadre du projet d’assassinat. Il a été établi que le quatrième – l’Azéri Khalid Mehdiyev – avait aidé activement à élaborer le complot, comme le révèle l’acte d’inculpation qui a été émis le mois dernier. Le département de la Justice n’a fait aucun commentaire et l’avocat de Mehdiyev n’a pas répondu à nos demandes de réaction.

Deux autres hommes ont plaidé non-coupable dans cette affaire. Le troisième homme est accusé de complicité dans le cadre de cette tentative de meurtre et il est mis en cause dans d’autres crimes dans son pays d’origine, la Géorgie, selon les autorités tchèques qui l’ont arrêté l’année dernière.

Matthew Olsen, le procureur-général adjoint des États-Unis chargé de la sécurité nationale, a déclaré que Téhéran n’avait pas réussi à dissimuler le rôle tenu par le régime des ayatollahs dans la vague de complots qui s’est abattue sur le sol américain.

« Dans un certain nombre de cas, nous sommes parvenus à identifier les acteurs malveillants qui font partie de ces groupes mais nous avons aussi réussi à mettre en évidence leurs liens directs avec le régime iranien », a indiqué Olsen au cours d’une interview.

Matthew Olsen, le procureur-général adjoint des États-Unis, chargé de la division de la sécurité nationale, lors d’une réunion à Washington, DC, le 4 septembre 2024. (Crédit : AP Photo/Mark Schiefelbein)

Mohammad Reza Ansari figure parmi les responsables iraniens qui, selon Washington, est à l’origine de la planification de ces attaques. Les États-Unis affirment qu’il fait partie d’une unité des Gardiens de la révolution spécialisée dans les « opérations meurtrières » aux États-Unis, en Europe et ailleurs.

L’administration américaine a fait savoir qu’Ansari avait tenté de tuer deux anciens hauts responsables du gouvernement américain, un complot qui avait été ourdi à la fin de l’année 2021 avec l’aide d’un autre Iranien, Shahram Poursafi.

Les procureurs américains avaient accusé Poursafi – qui, selon eux, est membre des Gardiens de la révolution – d’avoir comploté le meurtre de l’ancien Conseiller à la sécurité nationale John Bolton et d’une autre personne dont l’identité n’a pas été révélée. Dans un de ses livres, l’ancien secrétaire d’État américain Mike Pompeo affirme qu’il était cette deuxième cible.

Dans une interview, John Bolton a expliqué qu’il pensait qu’il était encore une cible potentielle du régime iranien. « Je pense qu’il s’agit d’une campagne sans précédent de tentatives d’assassinat à l’encontre de responsables et d’anciens responsables américains », a-t-il dit.

Des accusations que la république islamique a une fois de plus qualifiées de « ridicules et sans fondement ». Poursafi est toujours en liberté. Les demandes de commentaires que nous lui avons soumises, ainsi qu’à Ansari et au Corps des Gardiens de la révolution, sont restées sans réponse.

Le conseiller américain à la sécurité nationale, John Bolton, lors d’une conférence de presse à Jérusalem, le 22 août 2018. (Crédit : AFP / Pool / Abir Sultan)

Des tensions accrues

Au moins six des complots recensés par Reuters en Europe, depuis 2020, concernent des cibles israéliennes ou juives. Presque tous ces complots impliqueraient des tueurs à gages.

C’est vers 2020 qu’Abbas avait contacté Haider, depuis l’Iran. Haider vivait en Grèce – il était immigrant clandestin, selon les documents qui ont pu être consultés par Reuters. Au cours d’une interview, Haider a déclaré à Reuters que les deux hommes se connaissaient parce qu’ils se côtoyaient dans leur pays d’origine. Tous les deux étaient ainsi originaires de la même ville d’Alipur, située dans la province du Punjab, à l’Est du Pakistan. Les deux hommes étaient des musulmans chiites, la religion de la théocratie iranienne, avait-il par ailleurs confié aux autorités grecques lors de l’enquête.

Haider avait fait des études d’ingénieur au Pakistan et il était arrivé en Grèce en 2019, a dit ce dernier à Reuters. Il s’était installé sur l’île de Zakynthos, une destination touristique populaire. Il vivait dans un immeuble avec d’autres ressortissants pakistanais et il avait trouvé du travail dans une oliveraie, assumant également d’autres emplois saisonniers.

Abbas était, lui aussi, originaire du Pakistan. Les autorités pakistanaises le soupçonnent aujourd’hui d’avoir organisé un enlèvement et un meurtre au mois d’octobre 2021, a fait savoir un responsable de la police qui travaille dans la province du Pendjab.

La police grecque avait identifié un compte Instagram sous le nom de Shani Shah Sherazi – un compte qui, selon elle, appartenait à Abbas. Le dernier message posté sur la page date de la mi-octobre 2021.

Des touristes débarquent sur la célèbre plage de Navagio sur l’île ionienne de Zakynthos, le 18 juillet 2020. (Crédit : Louisa Gouliamaki / AFP)

Abbas, marié et père de deux enfants, était entré en Iran par la route au mois de février 2022 et il n’en est jamais revenu depuis, a indiqué à Reuters un responsable des services de renseignement du Pendjab.

Après son arrivée en Iran, Abbas avait recruté Haider. Au mois d’avril 2022, les deux hommes étaient en contact via WhatsApp, selon le témoignage apporté par Haider au juge d’instruction et selon les messages présentés dans le détail dans les documents relatifs à l’affaire judiciaire.

Dans un échange datant du mois de novembre 2022, alors qu’ils s’entretenaient sur WhatsApp, les deux hommes avaient discuté des cibles et des méthodes à utiliser pour tuer le maximum de victimes. Abbas avait demandé à Haider de souligner auprès d’autres terroristes potentiels ce que le groupe était alors prêt à payer : « La récompense par tête est de cinq millions de roupies », avait-il dit, ce qui correspondait, à l’époque, à environ 16 000 euros.

Les deux hommes discutaient fréquemment finances. Haider harcelait Abbas pour qu’il lui transmette des fonds, selon les échanges WhatsApp. Au mois de décembre 2022, Abbas s’était plaint de ne pas pouvoir payer son loyer, déplorant le fait qu’il devait emprunter de l’argent.

« Lorsque le travail sera terminé et pour le reste de notre vie, nous ne voudrons plus jamais d’argent », avait écrit Abbas à Haider ce mois-là.

Des islamistes pakistanais brûlent une effigie du Premier ministre Benjamin Netanyahu lors d’une manifestation condamnant l’assassinat du chef du Hamas, Ismail Haniyeh, à Peshawar, au Pakistan, le 2 août 2024. (Crédit : AP Photo/Mohammad Sajjad)

Un meurtre mis en scène

À la fin de l’année 2022, Abbas avait demandé à Haider avec insistance d’avoir des images du bâtiment de la ‘Habad House, à Athènes. L’immeuble de deux étages, qui est situé dans un quartier animé de la capitale, abrite le centre juif disposant d’un espace de prière et un restaurant casher.

Haider avait appelé à l’aide le troisième suspect, sommé de fournir des photos et des vidéos des lieux, au mois de décembre 2022, avait dit l’homme aux magistrats. Le troisième suspect avait également expliqué aux autorités qu’il ne savait pas que le bâtiment était un centre juif. Il avait précisé que cela n’avait été que plus tard que Haider lui avait confié qu’Abbas proposait de le payer pour tuer – ce qu’il avait immédiatement refusé, avait-il affirmé.

Au début du mois de janvier 2023, Haider s’était rendu à Athènes et il avait enregistré des vidéos du centre ‘Habad d’Athènes et des environs, avait-il raconté. Alors qu’il transmettait ces images à Abbas, Haider avait précisé que le secteur était rempli de magasins et de touristes. « Bon travail », lui avait répondu Abbas.

Mais leurs méthodes avaient parfois frôlé l’amateurisme.

Haider avait mis en scène un faux meurtre, tentant apparemment de tromper Abbas et ses supérieurs. Pendant son séjour à Athènes, Haider avait convaincu un Népalais de jouer le rôle de la victime dans le cadre d’une fausse exécution en lui promettant de lui verser 2 500 euros, selon le témoignage du Népalais qui est présenté dans les documents. Haider l’avait alors habillé de vêtements tachés de sang – c’était du sang de chèvre, avait-il affirmé – et il lui avait ensuite demandé de s’allonger sur le sol et de faire le mort pour que Haider puisse le filmer, avait indiqué l’homme dans son témoignage.

Haider avait fait savoir au juge d’instruction qu’il avait mis en scène ce faux homicide en raison des pressions exercées par Abbas, qui le sommait d’abattre des victimes.

Un restaurant juif qui, selon les autorités grecques, était l’une des cibles d’un projet d’attentat terroriste, dans le centre d’Athènes, en Grèce, le 28 mars 2023. (Crédit : AP Photo/Thanassis Stavrakis)

Des pressions croissantes

Dès la deuxième semaine de janvier 2023, Abbas et Haider avaient concentré leur attention sur le restaurant ‘Habad d’Athènes, affirment les enquêteurs dans les documents. Abbas avait suggéré de déclencher un incendie criminel, selon les messages échangés sur WhatsApp.

« Tout ce que vous pouvez faire, faites-le rapidement, je n’aurai pas beaucoup de temps », avait écrit Abbas le 9 janvier.

Haider avait répondu : « Ce sera fait, je vous le promets ».

Quelques semaines plus tard, les autorités étaient intervenues. Sur la base d’une information anonyme, la police grecque avait perquisitionné l’appartement de Haider et l’avait arrêté pour possession de faux papiers d’identité. Le mois suivant, les procureurs avaient porté plainte pour terrorisme. Dans le témoignage qu’il avait apporté après son arrestation, Haider avait décrit le groupe dont Abbas était membre en évoquant une importante organisation basée en Iran – il n’avait pas voulu dire son nom.

Dorénavant dans l’attente de son procès, Haider raconte qu’il occupe actuellement deux emplois à Zakynthos – dans la cuisine d’un restaurant et comme gardien de la sécurité. Il a du mal à dormir. Il risque la prison en Grèce mais s’il est innocenté, il n’a pas l’intention de rentrer chez lui, car il redoute les représailles d’Abbas ou de son entourage.

« J’ai peur parce que je ne sais pas ce qui va se passer ici », s’exclame-t-il. « Et je ne peux pas retourner au Pakistan ».

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