Le cabinet de Netanyahu qualifie le verdict de la Cour suprême de « déroutant » ; des élus appellent à l’ignorer
Le communiqué ne précise pas si le Premier ministre respectera le jugement stipulant que le directeur du Shin Bet conserve son poste pour le moment ; l'opposition enjoint le gouvernement à s'y conformer

Le cabinet du Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré mardi que l’ordonnance provisoire de la Cour suprême maintenant le chef du Shin Bet à son poste pour le moment, malgré le vote du cabinet actant son renvoi le mois dernier, était « déroutante » — mais n’a pas précisé si le Premier ministre se conformerait au jugement, alors que les membres de son gouvernement l’ont qualifié d’illégitime.
La Cour a indiqué au gouvernement qu’il ne pouvait prendre aucune mesure pour démettre Ronen Bar de ses fonctions — y compris en nommant un remplaçant — tant que l’injonction provisoire restait en vigueur, lui donnant jusqu’au 20 avril pour trouver un compromis avec la procureure générale.
Le gouvernement a reçu l’ordre de ne pas entraver les pouvoirs de Bar en tant que chef du Shin Bet ni de modifier les relations de travail entre le gouvernement et l’agence de sécurité intérieure, bien que les entretiens en vue d’un remplacement puissent encore être menés.
Dans une déclaration publiée depuis l’avion du Premier ministre, l’Aile de Sion, le cabinet de Netanyahu a fait valoir que les juges avaient confirmé l’autorité du gouvernement, en principe, pour révoquer le chef du Shin Bet.
« Par conséquent, la décision de la Cour suprême de repousser de dix jours la fin du mandat du Shin Bet est déroutante », a déclaré le cabinet du Premier ministre.
Le cabinet de Netanyahu a contesté la position des juges selon laquelle Bar aurait dû être entendu, arguant que la procureure générale Gali Baharav-Miara n’avait pas exigé que le chef de la police soit entendu lorsque le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir avait demandé à le démettre de ses fonctions.

Le cabinet du Premier ministre a accusé Baharav-Miara, que le gouvernement tente également de limoger, d’être motivée par le désir d’empêcher le renvoi de Bar, en utilisant comme prétexte l’enquête en cours menée par Bar sur le scandale dit du « Qatargate » au sein du cabinet de Netanyahu.
« Il est impensable que le gouvernement israélien soit empêché de démettre de ses fonctions un chef du Shin Bet qui a échoué, simplement parce qu’une enquête qui n’est liée à aucun des ministres du gouvernement a été ouverte », a déclaré le cabinet du Premier ministre, affirmant que ce précédent permettrait au directeur de l’agence d’ouvrir une enquête pour éviter son propre licenciement.
Netanyahu continuera d’interviewer les candidats pour remplacer Bar, a ajouté le communiqué.
« Non ! »
La déclaration ambiguë de Netanyahu est intervenue alors que des ministres du gouvernement ont émis des commentaires virulents sur l’ordonnance temporaire de la Cour, la qualifiant d’illégitime et suggérant au gouvernement de l’ignorer.
Le ministre des Communications, Shlomo Karhi, a écrit « Non ! » sur X, en réponse à un article sur l’ordonnance de la Cour suprême.
« Le gouvernement doit obéir à la loi ! C’est une obligation de loyauté envers l’État d’Israël et ses lois (!) et non envers un ordre illégal sans autorité », a-t-il écrit.
« La ‘solution créative’ est très simple : Ronen Bar terminera son mandat le 10 avril, c’est notre obligation », a déclaré Karhi.
« Qu’y a-t-il de démocratique dans le règne absolu d’Isaac Amit ????? », a-t-il ajouté, en référence au président de la Cour suprême.

Le ministre des Finances Bezalel Smotrich a écrit sur X qu’en ce qui le concerne, Bar « sera le chef du Shin Bet en nom et en salaire, en vertu de l’ordonnance provisoire de la Cour suprême. C’est tout, et rien d’autre ».
Smotrich a demandé à Netanyahu « de ne pas le convoquer [Ronen Bar] à des discussions et de ne pas travailler avec lui ».
Le ministre des Finances a également exhorté le Premier ministre à ne pas entamer de négociations avec la procureure générale pour parvenir à un compromis, comme les juges ont encouragé les parties à le faire.
Smotrich a souligné la responsabilité du gouvernement dans la sécurité d’Israël, déclarant que « l’arrogance des juges ne doit pas nous lier les mains en temps de guerre ».
Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a déclaré dans un communiqué que « l’érosion continue de l’autorité d’un régime démocratique élu, par un organe non élu, sans contrôle ni contrepoids, qui s’octroie des pouvoirs totalement contraires à la loi, devrait inquiéter tous ceux qui craignent pour la démocratie ».
« Il n’y a pas d’autre choix que de revenir rapidement à la réforme judiciaire », a-t-il ajouté.
Les efforts du gouvernement pour réformer le système judiciaire ont suscité une énorme opposition tout au long de l’année 2023, et certains ont cité la division qu’ils ont provoquée comme l’une des raisons de l’incapacité du pays à prévenir et à répondre à l’invasion meurtrière du Hamas du 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre en cours.
Ces derniers mois, le gouvernement a relancé certaines parties de la réforme, notamment en adoptant le mois dernier un amendement sur le mode de sélection du médiateur judiciaire de l’État.

L’opposition exhorte au respect de la décision de la Cour
Les membres de l’opposition ont exhorté mardi le gouvernement à se conformer à l’ordonnance temporaire de la Cour suprême et ont condamné les suggestions visant à ce que le gouvernement la défie.
« Ils doivent obéir à la décision de la Cour », a tweeté le chef du parti HaMahane HaMamlahti, Benny Gantz, ajoutant que « ne pas permettre au chef du Shin Bet de participer aux discussions et le ‘boycotter’, c’est jouer avec des vies ».
Yair Golan, chef du parti de gauche Les Démocrates, a également mis en garde le gouvernement contre toute tentative de se soustraire à la décision.
« Toute tentative de se soustraire à la Cour suprême devra se mesurer à une lutte civile sans précédent de la part de la majorité démocratique déterminée », a écrit Golan sur X. « Un gouvernement qui n’obéit pas à la loi ne peut rester en fonction un seul jour de plus. »