Le programme scolaire va mettre l’accent sur la communauté druze et ses liens avec l’État
Le ministère de l'Éducation a annoncé ce nouveau cursus pour les élèves du secondaire alors que l'Agence juive a élu un premier représentant druze à son conseil d'administration, il y a quelques jours
L’État va mettre en œuvre un nouveau programme d’études intitulé « Société druze : Histoire, patrimoine et culture », un programme qui est destiné à mettre en lumière « le partenariat historique entre les Druzes et l’État d’Israël », a annoncé le ministère de l’Éducation. Il aidera « à comprendre l’essence et les défis » de ce partenariat, a ajouté le ministère.
L’objectif est d’étudier l’histoire, la culture, la religion et la société druzes, en incluant notamment « le contexte historique entre la communauté druze et l’État d’Israël ». « L’accent sera mis en particulier » sur le service des membres de la communauté druze au sein de l’armée et des autres forces de sécurité israéliennes, a déclaré le ministère dans la journée de lundi.
Le programme consistera en un cours facultatif destiné aux élèves des collèges (de la 6e à la 3e) dans les écoles juives laïques et religieuses de tout le pays – et il comprendra des excursions dans les communautés druzes.
La date de mise en œuvre du programme n’a pas été annoncée.
Les Druzes, qui sont environ 140 000 en Israël, constituent une minorité arabophone distincte des principales communautés arabes musulmanes et chrétiennes, avec une histoire, une culture et une religion uniques.
Contrairement aux autres Arabes israéliens – et à l’exception de certains membres de la communauté bédouine – les Druzes ont traditionnellement servi dans l’armée israélienne et dans la police des frontières, certains d’entre eux parvenant à s’élever à des grades très élevés. La plus grande partie de la communauté vit dans le nord d’Israël, en Galilée et sur le plateau du Golan. Il y a aussi des communautés druzes en Syrie et au Liban.
Faisant référence à l’histoire du service druze au sein de Tsahal, le ministre de l’Éducation Yoav Kisch a déclaré, alors qu’il annonçait le programme, que « l’alliance de sang avec nos frères druzes est une pierre angulaire de l’Histoire israélienne commune ». Il a ajouté que le programme d’études mettrait en évidence « la courageuse société druze et son profond engagement à l’égard de l’État d’Israël ».
Malgré l’accueil chaleureux réservé à la communauté par une grande partie du public israélien, les Druzes ont subi des coups de la part de l’establishment politique – en particulier sous les gouvernements de droite de ces dernières années.
En 2017, la Knesset avait adopté un amendement à la loi sur l’urbanisme – connu sous le nom de loi Kamenitz, du nom d’un responsable du ministère de la Justice – qui permettait d’accélérer la mise en œuvre des mesures prises contre les constructions illégales, et ce sans passer par les tribunaux. Cet amendement avait été considéré très largement comme visant spécifiquement les villes arabes, où les permis de construire sont très difficiles à obtenir et où les citoyens arabes ont donc tendance à construire illégalement.
Puis, en 2018, la Knesset avait adopté la loi sur l’État-nation, qui déclare que le pays est l’État-nation du peuple juif. Les minorités du pays (y compris les Druzes) et de nombreux Israéliens juifs avaient estimé que cette législation faisait la promotion d’une exclusion insultante.
Au cours de la guerre qui oppose actuellement Israël au Hamas, dans la bande de Gaza, plus d’une dizaine de soldats druzes ont été tués – cela a notamment été le cas du colonel Ehsan Daqsa, 41 ans, commandant de la 401e brigade des blindés de l’armée israélienne, qui a perdu la vie au mois d’octobre. Au mois de juin, 12 enfants et ados qui jouaient au football dans la ville druze de Majdal Shams, sur le plateau du Golan, avaient trouvé la mort lors d’un tir de roquette du Hezbollah.
« Je suis très heureux que ça arrive enfin, mais il est très triste qu’une guerre ait été nécessaire. J’aurais aimé que ça se produise avant », a commenté Adham Nasr Aldin, un responsable communautaire habitant à Daliyat al-Karmel, une ville à majorité druze située aux abords de Haïfa, au sujet de l’annonce faite par le ministère de l’Éducation.
« Les Druzes vivent dans des villages quelque peu reculés » qu’ils quittent « pour aller travailler, pour aller à l’université, pour servir dans l’armée israélienne ». Là-bas, ils apprennent que « la société israélienne est une société juive, une réalité qui reste unilatérale », a déploré Aldin qui s’est entretenu avec le Times of Israel par téléphone, mardi. Beaucoup d’Israéliens juifs ne savent pas grand-chose sur les Druzes, a-t-il déploré.
L’armée israélienne est « un bon lien » entre les membres des populations Juive et Druze du pays et le service militaire est souvent le moment où les deux communautés se rencontrent vraiment pour la première fois, a-t-il continué, mais « il devrait y avoir plus de coopération, plus de programmes communs… c’est le genre de chose susceptible de créer un meilleur avenir ».
« Les Druzes sont une partie importante de la société israélienne », a-t-il vivement affirmé.
En début de semaine, l’Agence juive pour Israël a annoncé que le colonel de réserve Mofid Marai, ancien député et commandant de bataillon, avait été élu au sein de son conseil d’administration. Il est le premier membre de la communauté à rejoindre l’instance.
« Le fait que le colonel Mofid Marai rejoigne le conseil d’administration de l’Agence juive symbolise le lien profond et la reconnaissance de l’engagement stratégique et historique entre la communauté druze et l’État d’Israël », a déclaré le président de l’Agence juive, le général de division réserviste Doron Almog, dans un communiqué.
Dimanche, le Bureau des gouverneurs a approuvé une résolution « appelant la Knesset israélienne à adopter une législation qui reconnaisse l’engagement de la communauté druze à l’égard de l’État, et qui affirme la pleine égalité des droits dont les citoyens druzes d’Israël peuvent bénéficier », selon le communiqué.
Sue Surkes a contribué à cet article.