Le rabbin délinquant sexuel se vante d’un don involontaire de 80 000 dollars
Sous des ricanements moqueurs, Eliezer Berland dit avoir demandé 18 000 dollars à une anglophone. Elle entend 80 000 et obéit, il lui en demande alors encore plus
Marissa Newman est la correspondante politique du Times of Israël
Eliezer Berland, reconnu coupable de crimes sexuels et messie autoproclamé, s’est vanté d’avoir exploité une femme qui avait fait des dons de dizaines de milliers de dollars, d’après un enregistrement obtenu par le Times of Israel, ponctué de rires moqueurs de ses fidèles.
Longtemps considéré comme un chef de culte par des milliers de ses disciples du mouvement hassidique Breslev, Berland avait fui Israël en 2013 après avoir été accusé d’avoir sexuellement agressé plusieurs de ses disciples femmes, dont une mineure. Après avoir échappé à une arrestation pendant trois ans, Eliezer Berland, 81 ans, avait été condamné à 18 mois de prison en novembre 2016 pour deux cas d’attentat à la pudeur et un autre d’agression, dans le cadre d’un arrangement judiciaire, qui lui a permis d’obtenir 7 mois d’incarcération seulement. Il avait été libéré après cinq mois de détention, en partie en raison de sa santé chancelante.
Depuis, le rabbin a repris ses activités de leader de la communauté Shuvu Bonim, une sous-branche de la secte Breslev, désavouée par la dynastie hassidique.
Shuvu Bonim — dont l’objectif est de sensibiliser les Israéliens laïcs à la religion — fait depuis longtemps l’objet de rumeurs quant aux dons exorbitants qu’il réclamerait en échange de rites mystiques et religieux, dont des bénédictions et des promesses de guérison de malades.
Des militants qui se sont entretenus avec le Times of Israel par le passé ont évoqué plusieurs cas de fidèles qui auraient vendu leur maison ou se seraient endettés pour profiter de ces bénédictions, ce qu’ils considèrent comme de l’extorsion de la part d’un chef religieux avec trafic d’influence sur ses fidèles.
Les dons — par des adultes consentants pour un service religieux — ne sont pas interdits par la législation israélienne.
Aujourd’hui, un enregistrement émaillé de gloussements moqueurs vient donner un aperçu de l’attitude du rabbin envers ses donateurs.
« Nous nous sommes réunis à Noël. Au milieu de cette réunion, nous avons reçu un appel d’une femme qui souhaitait donner 300 000 shekels, 80 000 dollars », peut-on entendre Berland dire dans l’enregistrement non daté.
« Je lui ai répondu 18 [000] — c’est ce que je lui ai dit — et elle a entendu 80 », explique Berland, qui précise que l’échange était en anglais.
Après un murmure inaudible, il raconte qu’il va lui demander plus d’argent : « Je lui ai dit qu’il nous fallait 50 000 de plus [dollars ou shekels, ce n’est pas clair], ce à quoi elle a répondu ‘je n’ai pas plus’. ‘Vois avec tes amis’, je lui ai alors dit. »
« Elle a passé des dizaines de coups de fil et n’a pas réussi à obtenir une agura [centime israélien], puis elle s’est rappelé qu’elle avait une amie, ici en Israël, qui assiste à un mariage [de sa famille], je lui ai donc demander d’appeler son ami pour qu’elle lui prête [l’argent]… »
Contacté par le Times of Israel, Barak Barber, un conseiller de Berland, n’a pas réfuté l’authenticité de l’enregistrement.
Invité à commenter ces propos, il a répondu par écrit : « Je ne comprends pas ce à quoi il faut réagir. Qu’avez-vous entendu [dans l’enregistrement] qui n’est pas approprié ? »
Pour Barber, « c’est un vieil enregistrement. Je n’ai jamais entendu le rabbin dénigrer qui que ce soit, jamais, mais ceux qui ne comprennent pas son exaltation ne comprendront jamais aucune explication, donc ce n’est pas la peine de s’y efforcer. »