Les Émirats arabes unis se réjouissent de l’accord entre l’Arabie saoudite et l’Iran
Les EAU évoquent "une avancée importante pour la stabilité et pour la prospérité régionales" ; l'Autorité palestinienne et la Jordanie saluent elles aussi l'accord
Le ministre émirati des Affaires étrangères, Abdullah bin Zayed Al Nahyan, a salué samedi l’accord conclu entre l’Arabie saoudite et l’Iran déterminant que les deux pays rétabliront des relations diplomatiques.
« La reprise des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran est une avancée importante pour la stabilité et pour la prospérité régionales », a écrit Al Nahyan sur Twitter.
L’année dernière, l’Iran avait déclaré vouloir renforcer ses relations avec les EAU, accueillant à nouveau un ambassadeur émirati à Téhéran après une absence de six ans.
L’Iran et l’Arabie saoudite ont convenu de rétablir des relations diplomatiques et de rouvrir leurs ambassades respectives après sept ans de tensions. Cette avancée diplomatique majeure a été négociée avec la Chine.
L’accord est largement considéré comme un coup porté à Israël et aux États-Unis.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu devait se rendre aux Émirats arabes unis au mois de janvier mais son voyage avait été annulé, apparemment dans un cadre de tensions suscitées par le visite effectuée par le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, un politicien d’extrême-droite, sur le mont du Temple.
Un diplomate de longue date au Moyen-Orient avait ainsi confié, le mois dernier, au Times of Israel que les invitations lancées à Netanyahu concernant deux visites officielles – aux États-Unis et aux Émirats arabes unis – avaient été mises en veilleuse, les deux sources expliquant que les gouvernements des deux pays ressentaient une forte frustration face aux politiques mises en place par le gouvernement vis-à-vis des Palestiniens et qu’ils attendaient de voir ce qu’il se passerait sur le terrain pendant le mois du ramadan, qui est toujours une période de tensions particulièrement accrues entre les Israéliens et les Palestiniens. (Le média d’information Axios, pour sa part, a annoncé que la décision prise par les Émirats arabes unis de revenir sur l’invitation qui avait été transmise à Netanyahu avait été motivée par l’inquiétude de ce que le Premier ministre israélien n’utilise ce déplacement pour faire des déclarations publiques contre l’Iran sur le sol émirati).
Le Bureau du Premier ministre, pour sa part, avait fait savoir que la visite avait été annulée pour des raisons de calendrier.
Le ministère des Affaires étrangères de l’Autorité palestinienne s’est également réjoui de l’accord, disant dans une déclaration qu’il « entraînera la stabilité, la sécurité et la coopération parmi les pays de la région ». « Il aidera également à s’attaquer aux différentes crises et autres problèmes régionaux », a-t-il ajouté.
« Cet accord fait disparaître le spectre des combats et des guerres et ôte le tapis des pieds de certains pays qui recherchaient une solution militaire à leurs crises », a poursuivi Ramallah, lançant apparemment une pique à Israël qui réclame depuis longtemps qu’une menace militaire crédible puisse servir d’outil de dissuasion contre Téhéran.
« Dans ce contexte, le ministère félicite le royaume d’Arabie saoudite pour ce succès diplomatique et nous le félicitons pour cette décision qui reflète la profondeur de sa vision politique et de son sentiment historique de responsabilité à l’égard de la population saoudienne et des populations de toute la région et du monde entier », a noté l’AP.
La Jordanie a, elle aussi, salué l’accord, le ministère jordanien des Affaires étrangères exprimant « son espoir que cette avancée puisse contribuer à dynamiser la paix et la stabilité de la région tout en préservant la souveraineté des États et la non-intervention dans leurs affaires intérieures. »
Un haut-responsable israélien qui s’est rendu avec Netanyahu en Italie, vendredi, a pour sa part tenté d’attribuer la responsabilité de l’accord conclu entre Ryad et Téhéran aux « faiblesses » du gouvernement israélien précédent et de l’administration Biden.
Des médias ont néanmoins insisté sur le fait que les négociations entre les deux pays avaient commencé lorsque Netanyahu était encore Premier ministre et avant l’arrivée de la coalition Bennett-Lapid au pouvoir.
Pour sa part, vendredi, le secrétaire du Conseil national de sécurité iranien, Ali Shamkhani, a fait savoir à Nour News, un média iranien, que l’accord signé entre son gouvernement et l’Arabie saoudite « sera un réel obstacle à la présence et à l’interférence des pays extra-régionaux et au régime sioniste dans la région ».
Les Nations unies se sont réjouies du rapprochement entre l’Arabie saoudite et la Chine, et elles ont remercié cette dernière pour son rôle dans l’accord. « De bonnes relations de voisinage entre l’Iran et l’Arabie saoudite sont déterminantes pour la stabilité de la région du Golfe », a commenté un porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric.
Les États-Unis se sont aussi félicités de « tout effort visant à mettre un terme à la guerre au Yémen et à entraîner une désescalade des tensions dans la région du Moyen-Orient », a dit Karine Jean-Pierre, une porte-parole de la Maison Blanche.
Le département d’État a toutefois fait preuve de prudence dans le contexte d’un accord où l’Amérique n’aura finalement tenu aucun rôle : « Bien sûr, il reste à voir si le régime iranien honorera, de son côté, ses engagements », a ajouté Washington à l’instar de Paris qui s’est aussi montré prudent.
Paris est favorable à « toute initiative qui peut contribuer de manière concrète à la désescalade des tensions et au renforcement de la sécurité et de la stabilité régionales », a déclaré Anne-Claire Legendre la porte-parole du ministère français des Affaires étrangères dans un communiqué. Paris a par ailleurs appelé l’Iran à renoncer à ses « actions déstabilisatrices », précise le Quai d’Orsay.
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— France Diplomatie???????????????? (@francediplo) March 10, 2023
Les tensions sont restées pendant longtemps fortes entre l’Iran et l’Arabie saoudite. Le royaume avait rompu les liens avec la république islamique en 2016 après que des manifestants ont envahi des postes diplomatiques saoudiens sur le territoire iranien. L’Arabie saoudite avait exécuté un célèbre sheikh chiite en plus de 46 autres personnes quelques jours auparavant, déclenchant le mouvement de protestation.
Ces événements avaient eu lieu alors que le prince héritier Mohammed bin Salman commençait son ascension au pouvoir. Fils du roi Salmane, le prince Mohammed avait comparé, dans le passé, le guide suprême de l’Iran, l’Ayatollah Ali Khamenei, à Adolf Hitler, et il avait aussi menacé de frapper la république islamique.
Depuis, les États-Unis se sont retirés de manière unilatérale de l’accord sur le nucléaire conclu entre Téhéran et les grandes puissances en 2018. L’Iran a été accusée d’une série d’attaques depuis, notamment une attaque qui avait touché le cœur de l’industrie pétrolière saoudienne en 2019 et qui avait temporairement interrompu la production de pétrole brut du royaume.
Si les rebelles houthis, soutenus par Téhéran, avaient initialement revendiqué cette attaque, les nations occidentales et les experts en avaient attribué la responsabilité à Téhéran. L’Iran n’avait eu de cesse de nier toute implication et n’a cessé de clamer son innocence dans d’autres attaques dont la responsabilité a été attribuée à la république islamique.
La religion joue également un rôle déterminant dans les relations entre les deux pays. L’Arabie saoudite, qui accueille la Kaaba sous forme de cube vers laquelle les musulmans prient cinq fois par jour, se présente comme la principale nation sunnite du monde. La théocratie iranienne, pour sa part, se considère comme la protectrice de la minorité chiite de l’islam.