Israël en guerre - Jour 369

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Les obsèques du soldat, fils d’un rabbin de Kiev, témoignent de la contribution de la communauté juive à la guerre

Juifs et non-juifs ont rendu un dernier hommage à Anton "Moty" Samborsky, fils de Moshe Azman, l'un des grands rabbins autoproclamés d'Ukraine. Des centaines de soldats juifs auraient été tués à la guerre

Le rabbin Moshe Azman lors des funérailles de son fils, Anton Matityagi Samborsky, à la synagogue centrale de Kiev, le 12 septembre 2024. (Oleksandr Magula/Suspilne, Ukraine/JSC 'UA :PBC'/Global Images Ukraine/Getty Images via la JTA)
Le rabbin Moshe Azman lors des funérailles de son fils, Anton Matityagi Samborsky, à la synagogue centrale de Kiev, le 12 septembre 2024. (Oleksandr Magula/Suspilne, Ukraine/JSC 'UA :PBC'/Global Images Ukraine/Getty Images via la JTA)

KYIV, Ukraine (JTA) – Des dizaines de soldats et civils juifs, ainsi que de nombreux Ukrainiens non juifs, se sont retrouvés jeudi à la synagogue centrale Brodsky de Kiev pour faire leurs adieux au fils d’un célèbre rabbin mort sur le front quelques semaines après avoir été enrôlé dans l’armée ukrainienne.

Anton Samborsky, 32 ans, était le fils adoptif de Moshe Azman, l’un des deux hommes qui revendiquent le titre de grand rabbin d’Ukraine.

A la synagogue – en présence de l’ambassadeur d’Israël à Kiev, Michael Brodsky –, Azman a attiré l’attention sur la tragique ironie qui voulait que l’invasion militaire de l’Ukraine par la Russie, que le Kremlin présente comme une opération destinée à libérer l’Ukraine de la junte nazie, fasse de nombreuses victimes parmi ses minorités, à commencer par les Juifs et les Russes.

La Fédération des communautés juives d’Ukraine a fait savoir, par voie de communiqué, qu’elle avait participé à l’inhumation de 47 soldats juifs morts au combat depuis le début de la guerre. A la Jewish Telegraphic Agency, le président de la fédération, le rabbin Mayer Stambler, a dit que le nombre de soldats juifs ukrainiens morts au combat s’élevait à plusieurs centaines.

Il a ajouté que la fédération fournissait des repas de fête et d’autres formes de soutien à 1 200 soldats juifs sur le front et ailleurs en Ukraine qui en ont fait la demande.

Lors des obsèques, Azman a parlé de Samborsky en utilisant le nom Moty, surnom de Matisyahu, le nom hébreu que sa femme et lui avaient donné à leur garçon lorsqu’ils l’avaient adopté. Selon la Fédération des communautés juives, Samborsky avait auparavant vécu dans un orphelinat juif. Matisyahu est le nom de l’un des combattants juifs pour la liberté lors de la révolte des Maccabées.

« J’ai reçu des dizaines de milliers de mots de sympathie et de soutien », a déclaré Azman sur les réseaux sociaux, vendredi, en annonçant le lancement d’une campagne caritative en souvenir de Samborsky. « J’ai lu chacun d’entre eux. Vos paroles chaleureuses, qui viennent du cœur, me remplissent de confiance dans notre victoire sur le mal. »

Samborsky avait été mobilisé dans le cadre de la loi de conscription qui permet aux autorités de recruter de force les hommes adultes entre 25 et 60 ans.

Sur les réseaux sociaux en août, Azman avait révélé que son fils adoptif avait été enrôlé une semaine après la naissance de sa fille, en mai dernier. « Après une instruction rapide », a ajouté le rabbin, il avait été « envoyé directement au front ».

Samborsky a été tué par un missile tombé près de lui dans le secteur de Pokrovsk, dans la région de Donetsk, à l’est de l’Ukraine, là où la Russie redouble d’efforts pour s’emparer du territoire ukrainien.

Des militaires ukrainiens de la 43e brigade d’artillerie tirent avec de l’artillerie automotrice 2S7 Pion en direction de positions russes, dans une zone tenue secrète de Pokrovsk, dans la région orientale de Donetsk, le 8 août 2024, dans le cadre de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. (Crédit : Roman Pilipey / AFP)

A l’occasion d’interviews, des soldats ukrainiens ont dénoncé le manque de formation et de préparation physique des nouvelles recrues, envoyées sur le front dans la précipitation dans l’espoir de contrebalancer l’avantage écrasant dont dispose la Russie en termes de troupes. Ils ont demandé à rester anonymes car il ne leur est pas permis de parler à la presse.

Comme beaucoup de leurs concitoyens de toutes confessions et origines, des membres masculins de la communauté juive ukrainienne ont déclaré à la JTA faire en sorte d’éviter certains quartiers de peur de tomber sur les patrouilles de recrutement militaire. À Dniepr et dans un camp juif de l’ouest de l’Ukraine, cet été, des dirigeants juifs ont déclaré que les hommes participaient moins à la vie communautaire à cause de ce risque de conscription.

Des chaînes Telegram spécialisées, gérées par des Ukrainiens anonymes, informent en temps réel de la présence de ces patrouilles dans les villes, afin d’aider les personnes vulnérables à échapper à la mobilisation et la conscription.

Le nombre total de victimes militaires est encore inconnu : le gouvernement ukrainien n’a pas publié de bilan actualisé mais elle avait fait état en février dernier, après deux ans de guerre, de plus de 30 000 morts parmi ses soldats. Les États-Unis estiment que le bilan réel est bien plus élevé. Quoi qu’il en soit, l’impasse à laquelle ont mené les combats requiert l’apport régulier de nouveaux soldats, qui sont rapidement blessés ou tués.

Le 29 août, Azman a publié une déclaration à propos de la mort de son fils, le jour où l’Ukraine commémorait la Journée du souvenir des défenseurs du pays. Selon la Fédération des communautés juives, Samborsky était alors officiellement porté disparu mais, compte tenu des circonstances de sa disparition, la famille était certaine qu’il était mort.

Le corps de Samborsky n’a été retrouvé et identifié que mercredi et inhumé jeudi, dans un cimetière juif de Kiev.

Né à Leningrad – aujourd’hui Saint-Pétersbourg – en 1966, Azman est arrivé en Ukraine au début des années 1990 avec pour mission de faire revivre la vie juive après des décennies de persécutions soviétiques. Il a mis en place des services religieux dans l’une des pièces de la synagogue Brodsky, qui n’avait pas encore été rendue à la communauté juive et qui était à l’époque un théâtre de marionnettes pour enfants.

Il est l’un des deux rabbins à utiliser le titre officieux de grand rabbin d’Ukraine, avec le rabbin Yaakov Bleich, né aux États-Unis et venu dans ce pays d’Europe de l’Est en qualité de membre du mouvement hassidique Karlin-Stolin, dont il s’est depuis éloigné.

Le rabbin Moshe Azman entre dans la synagogue centrale de Kiev, le 22 avril 2019. (Sergueï Soupinski / AFP)

Chabad-Loubavitch est le plus grand mouvement juif d’Ukraine, et ses rabbins se trouvent dans des dizaines de villes. Loubavitch autoproclamé mais non-membre des structures de Habad en Ukraine, Azman s’est taillé une réputation nationale et internationale en restant dans le pays au début de l’invasion russe.

Depuis lors, il multiplie les initiatives pour rallier les soutiens à l’Ukraine, à la fois sur place et à l’étranger. Il se rend régulièrement sur le front et apporte de l’aide aux soldats et civils ukrainiens, juifs et non-juifs.

L’activité d’Azman depuis le début de cette guerre l’a rendu populaire auprès nombre d’Ukrainiens, dont certains ont assisté aux obsèques [de son fils] jeudi en témoignage de leur soutien.

Selon des informations locales, étaient présents un représentant d’une fondation de soutien au bataillon Azov – régiment de l’armée ukrainienne ayant l’habitude d’afficher des symboles nazis mais qui fait son possible pour changer d’image, les Russes présentant leur ennemi comme les dignes héritiers des nazis.

Samborsky ne faisait pas partie de cette brigade, a déclaré le représentant.

Juifs, proches et amis ukrainiens assistent aux obsèques du défunt soldat ukrainien Anton Matityagi Samborsky à la synagogue centrale de Kiev, en Ukraine, le 12 septembre 2024. (Maxym Marusenko/NurPhoto/Getty Images via la JTA)

Un professeur d’université juif qui s’est porté volontaire pour rejoindre l’armée au début de la guerre a remercié Azman pour le soutien qu’il apporte aux soldats et rappelé l’aide que lui a prodiguée le rabbin après ses graves blessures de guerre.

Un Ukrainien non juif qui s’est présenté comme étant Mikhaïl a pris la parole, se présentant comme le restaurateur des lieux, lorsque la synagogue Brodsky était encore un théâtre, à la fin des années 1970.

« Je le suis sur Facebook et je respecte ce qu’il fait », a déclaré Mikhail à propos d’Azman. « Je tenais à être ici aujourd’hui pour lui témoigner, ainsi qu’à sa famille, mon soutien en ces moments difficiles. »

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