Israël en guerre - Jour 370

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Opinion

Les protestations en Israël s’intensifient, et risquent de dégénérer

Le clip du manifestant dont la tête est visée par un canon à eau n'est qu'un exemple du risque qu'un affrontement se transforme, en un instant, en quelque chose de dévastateur

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Le moment où un manifestant est touché au visage par un jet de liquide provenant d'un canon à eau lors d'une manifestation contre le Premier ministre Benjamin Netanyahu à Jérusalem, juillet 2020. (Capture d'écran/Douzième chaîne)
Le moment où un manifestant est touché au visage par un jet de liquide provenant d'un canon à eau lors d'une manifestation contre le Premier ministre Benjamin Netanyahu à Jérusalem, juillet 2020. (Capture d'écran/Douzième chaîne)

Le mélange de protestations devant la résidence officielle du Premier ministre devient de plus en plus inflammable.

Un groupe largement ignoré d’activistes vétérans qui ont campé pendant des années pour exiger la démission de Benjamin Netanyahu a été rejoint, puis éclipsé, ces dernières semaines par des milliers et des milliers de jeunes Israéliens pour la plupart.

Les protestations – une occasion presque unique pour créer des contacts au sein d’un grand rassemblement, maintenant que d’autres rassemblements sont restreints ou interdits – ont été initialement alimentées par des entrepreneurs indépendants, des propriétaires de petites entreprises, divers secteurs de la population active en grève et d’autres personnes profondément affectées par les conséquences économiques de la lutte d’Israël contre la COVID-19, et furieuses que le gouvernement ne les aide pas financièrement.

Mais aujourd’hui, elles sont devenues une sorte d’expression collective, non ciblée, de frustration et de désespoir, incarnée et saluée par des milliers d’habitants de Jérusalem, principalement laïcs, étudiants et autres, âgés de 20 à 30 ans. La grande majorité des participants, pendant l’écrasante durée des rassemblements, ont fait preuve d’une bonne humeur et d’un esprit de paix, bien qu’extrêmement bruyant, avec une minorité violente et une poignée d’extrémistes politiques d’extrême gauche qui ont fait la une des journaux.

Une femme est arrêtée lors d’une manifestation contre le Premier ministre israélien à Jérusalem, le 23 juillet 2020. (Photo par MENAHEM KAHANA / AFP)

Des rassemblements beaucoup plus restreints de militants pro-Netanyahu se sont opposés à eux et ont été tenus à l’écart, certains d’entre eux lançant des slogans virulents de l’autre côté – notamment un groupe qui, jeudi, a chanté les louanges d’Yigal Amir, l’assassin du Premier ministre Yitzhak Rabin – et, dans plusieurs cas signalés à la fin des manifestations de jeudi, ont agressé la foule qui se dispersait.

Des partisans du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors d’un rassemblement devant la résidence du Premier ministre à Jérusalem, le 23 juillet 2020. (Photo par Yonatan Sindel/Flash90)

Chargée d’assurer le droit de manifester et de maintenir l’ordre, la police se déploie en grand nombre, faisant parfois appel à des officiers à cheval et, de plus en plus souvent, utilisant des canons à eau.

Jeudi soir, deux journalistes du Times of Israel présents sur les lieux ont rapporté que les tactiques de la police rendaient en fait la dispersion des manifestants plus difficile, car ils étaient pris en étau entre les policiers à cheval et les tirs de plus en plus fréquents des canons à eau.

Le ministre de la Sécurité intérieure Amir Ohana s’exprime lors de la réunion hebdomadaire du cabinet, au ministère des Affaires étrangères à Jérusalem, le 7 juin 2020. (Marc Israel Sellem/POOL)

Amir Ohana, le ministre israélien de la Sécurité publique – un loyaliste convaincu choisi par Netanyahu – aurait, mercredi, exhorté les hauts responsables de la police à repousser les manifestations dans un parc voisin ou à les interdire complètement, en invoquant les ravages qu’elles causaient aux résidents locaux, et on lui aurait dit que ce serait illégal.

Il aurait également laissé entendre que les forces de l’ordre étaient trop indulgentes envers les manifestants, demandant au chef de la police par intérim Motti Cohen : « Si cette manifestation était le fait d’ultra-orthodoxes, d’Arabes ou d’Éthiopiens, auriez-vous agi de la même
manière ? » Les trois groupes qu’il aurait cités ont en commun l’allégation selon laquelle la police a parfois fait un usage excessif de la force pour disperser leurs manifestations.

Pour sa part, Netanyahu a déclaré jeudi aux manifestants : « N’entraînez pas l’État dans l’anarchie, la violence et la destruction des biens. Ne l’entraînez pas dans des attaques contre la police, ils font leur travail ».

Israël ne connaît que trop bien les défis et les dangers lorsque les passions publiques sont intenses lors d’événements de masse, et que la sécurité est défaillante. Emil Grunzweig, enseignant, militant pour la paix, officier de réserve et père de famille, a été tué par une grenade lancée par un militant de droite lors d’un rassemblement de La Paix Maintenant qui s’est tenu à Jérusalem le 10 février 1983, alors que le cabinet israélien discutait des conclusions d’une commission d’enquête sur le massacre de Sabra et Chatila pendant la guerre du Liban. Rabin a été abattu à bout portant par Amir à l’issue d’un rassemblement pour la paix organisé le 4 novembre 1995 à Tel Aviv.

Manifestation après manifestation, l’intensité des protestations à Jérusalem augmente. Un clip vidéo dans lequel la tête d’un manifestant est littéralement renversée par la pression des tirs de canons à eau cette semaine n’est qu’une illustration du potentiel des affrontements et de la confrontation à se transformer, en un clin d’œil, en quelque chose de bien plus dévastateur.

Les dirigeants élus d’Israël, ses forces de l’ordre et les organisateurs des manifestations ont la responsabilité commune et urgente de se tenir à l’écart du danger.

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