Levin va convoquer le panel de sélection des juges, après des mois d’atermoiements
Alors que le système judiciaire souffre d'une pénurie de juges, le ministre de la Justice déclare qu'il proposera des noms qui feront l'objet d'un "large consensus"
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.

Le ministre de la Justice, Yariv Levin, a déclaré dimanche à la Haute Cour de justice qu’il convoquerait la commission de sélection des juges, après avoir refusé pendant des mois de le faire dans le cadre du programme de refonte du système judiciaire du gouvernement.
Les avocats représentant Levin dans la procédure judiciaire engagée contre lui devant la Haute Cour ont déclaré dans un document déposé au tribunal que le ministre convoquerait la commission dans les 15 jours « pour éviter tout litige » en temps de guerre, et qu’il proposerait de nouveaux juges au sujet desquels il y aurait un « large consensus ».
Levin avait refusé pendant plus de dix mois de convoquer la commission, chargée de la nomination des juges, en raison de son souhait d’en modifier la composition pour donner à son gouvernement la main sur les nominations.
Cette position a donné lieu à des recours déposés à la Haute Cour demandant que Levin soit contraint de convoquer la commission, et une audience sur ces recours est prévue pour le 12 novembre. Dimanche était la date butoir pour déposer les réponses à ces recours.
L’ONG Mouvement pour un gouvernement de qualité (MGQ) en Israël, l’un des requérants contre Levin devant la Haute Cour, a exprimé son scepticisme quant à l’annonce de Levin, affirmant qu’il pourrait s’agir d’une tactique pour retarder l’audience, tandis que le député Gilad Kariv (Avoda) a déclaré que Levin « ne s’engage pas à nommer des juges » et que sa déclaration était formulée d’une manière qui pourrait permettre au ministre d’éviter de procéder à des nominations.
MGQ et le parti Yesh Atid ont fait valoir dans leurs recours que Levin « n’a pas l’autorité » nécessaire pour refuser de convoquer la commission et que le comportement du ministre de la Justice équivaut à un abus d’autorité illégitime qui lui donnerait un droit de veto de facto sur toutes les nominations de juges.

« Le ministre de la Justice est d’avis qu’en temps de guerre, il n’y a pas lieu de s’occuper de questions litigieuses, y compris la question de la nomination des juges », a écrit l’avocat privé de Levin à la Cour, en référence à l’audience à venir.
« Afin d’éviter tout litige, le ministre convoquera le panel de sélection des juges dans les 15 jours et s’engage à ce moment-là à soumettre à la commission les décisions qui font l’objet d’un large consensus », a conclu la brève déclaration.
Un porte-parole de Levin a déclaré que cela signifiait qu’il s’efforcerait de procéder à des nominations de juges qui pourraient faire l’objet d’un large consensus au sein du panel.
Cette annonce survient quelques jours après que Levin et le président par intérim de la Cour suprême, Uzi Vogelman, ont accepté de nommer 14 juges temporaires dans plusieurs tribunaux en raison d’une pénurie de magistrats.
Il y a actuellement plus de 20 postes non pourvus dans les tribunaux du pays, et ce chiffre passera à 53 d’ici la fin de l’année. La Cour suprême a un président intérimaire depuis le départ à la retraite d’Esther Hayut le mois dernier, car seul la commission de sélection des juges peut choisir un président permanent.
Le leader du parti HaMahane HaMamlahti, Benny Gantz, farouche opposant à la refonte judiciaire de Levin, mais actuellement membre important du gouvernement d’urgence qui mène la guerre contre le Hamas, s’est félicité de la déclaration du ministre de la Justice.
« Le ministre de la Justice, Yariv Levin, a pris la décision correcte et digne d’un homme d’État de convoquer le panel de sélection des juges. C’est la bonne mesure à prendre en ce moment. »
Lapid a déclaré que « dans ces temps difficiles, nous avons besoin d’un système juridique fort et démocratique ». « C’est le moment de convoquer la commission de sélection judiciaire, de nommer des juges et de renforcer le système juridique. »

La nomination de juges conservateurs est devenue une pierre angulaire du programme de refonte judiciaire du gouvernement Netanyahu, que Levin a cherché à accomplir en changeant radicalement la composition de la commission par le biais d’une législation en mars qui aurait donné au gouvernement un contrôle presque total sur la quasi-totalité des nominations judiciaires.
La législation a été gelée en raison de manifestations et de grèves sans précédent avant le vote final à la Knesset le 27 mars.
Le ministre de la Justice a refusé de convoquer la commission pendant tout ce temps, déclarant ouvertement qu’il voulait donner au gouvernement un plus grand contrôle sur le panel avant de procéder aux nominations.
Les recours déposés contre lui affirmaient qu’il n’avait pas le pouvoir discrétionnaire de refuser de convoquer la commission sur la base de motivations politiques et législatives, en particulier lorsqu’il y a de nombreux postes non pourvus dans les tribunaux du pays.
Levin a répondu qu’il était le seul à avoir le droit de convoquer la commission et que la Cour n’avait pas le pouvoir de lui ordonner de le faire.