L’ex-envoyé contre l’antisémitisme de Trump dénonce son dîner avec Fuentes et West
Elan Carr a appelé son ancien patron à condamner Kanye West et le négationniste de la Shoah avec lesquels il a dîné ; l'Orthodox Union a aussi critiqué l'ancien président
L’ancien envoyé à la lutte contre l’antisémitisme du président américain Donald Trump et l’Orthodox Union (OU) ont condamné Trump, lundi, pour sa rencontre avec Kanye West et Nick Fuentes.
Trump a reconnu s’être entretenu, mardi soir, avec West lors d’un dîner organisé à Mar-a-Lago, précisant que le rappeur avait amené des amis – dont Fuentes, connu pour son racisme et pour son antisémitisme.
Trump a affirmé qu’il ne connaissait pas Fuentes.
Elan Carr, qui était l’envoyé spécial de l’administration Trump dans la lutte contre l’antisémitisme, a fustigé son ancien patron pour cette rencontre.
« Aucun Américain conscient de ses responsabilités et, c’est certain, aucun ancien président ne doit folâtrer avec des Nick Fuentes ou avec des Kanye West, », a écrit Carr sur Twitter.
« Amadouer l’antisémitisme, c’est promouvoir l’antisémitisme. Le président Trump doit condamner ces hommes dangereux et leurs points de vue immondes et profondément anti-américains », a-t-il ajouté.
No responsible American, and certainly no former President, should be cavorting with the likes of Nick Fuentes and Kanye West. To placate antisemitism is to promote antisemitism. President Trump must condemn these dangerous men and their disgusting and un-American views.
— Elan Carr (@ElanSCarr) November 28, 2022
L’Orthodox Union – organisation-cadre des groupes juifs orthodoxes – n’a pas été en reste, disant que le dîner de Trump avec « les personnalités antisémites les plus violentes du pays est profondément inquiétant ».
« Nous appelons l’ancien président Trump à condamner ces individus et à rompre les liens avec eux et avec leurs complices. En tant que personnalité publique majeure, Donald Trump a la responsabilité de dénoncer la haine sous toutes ses formes et de se poser en exemple aux yeux de ses nombreux partisans. Il n’a donné rien de moins qu’un sceau d’approbation à la haine la plus ancienne du monde », a commenté le groupe.
L’organisation a appelé « les leaders responsables – en particulier ceux du parti républicain » à prendre la parole et à se « placer aux côtés de tous ceux qui rejettent explicitement l’antisémitisme ».
Quelques semaines après avoir décerné un prix important à Donald Trump, l’Organisation Sioniste d’Amérique (ZOA) a fustigé dimanche l’ancien président pour sa rencontre avec Kanye West et Nick Fuentes.
L’administration Biden a également condamné l’incident. « Le sectarisme, la haine et l’antisémitisme n’ont absolument pas leur place en Amérique, y compris à Mar-a-Lago », indique son communiqué. « Le déni de la Shoah est répugnant et dangereux, et il doit être condamné avec force ». (Invité à commenter le fait que Trump ait dit qu’il ne connaissait pas Fuentes, Biden a lui-même déclaré à un journaliste : « Vous ne voulez pas entendre ce que je pense »).
La déclaration de la Maison Blanche n’a pas nommé Trump, pas plus que les déclarations de nombreux Républicains, y compris la Coalition juive républicaine (RJC), à la conférence annuelle de laquelle Trump a pris la parole la semaine dernière. Le groupe n’a pas initié de déclaration, mais, en réponse aux questions des journalistes, il en a publié une.
« Nous condamnons fermement l’antisémitisme virulent de Kanye West et de Nick Fuentes et appelons tous les dirigeants politiques à rejeter leurs messages de haine et à refuser de les rencontrer », indique la déclaration, sollicitée pour la première fois par Maggie Haberman du New York Times. La RJC et son PDG, Matt Brooks, ont retweeté Haberman.
La raison pour laquelle la RJC n’a pas voulu nommer Trump a entrainé des questions de la part des journalistes, dont Maggie Haberman, ainsi qu’une avalanche de critiques sur les réseaux sociaux.
Brooks, manifestement piqué au vif, a qualifié ces questions de « stupides et peu clairvoyantes » dimanche matin. « Nous n’avons pas mentionné Trump dans notre déclaration de la RJC, même si elle est manifestement en réponse à sa réunion, parce que nous voulions que ce soit un avertissement pour TOUS les Républicains. Banane ! », a-t-il déclaré sur Twitter en guise d’explication.
Max Miller, un Républicain juif qui vient d’être élu au Congrès de l’Ohio, et ancien allié de Trump, n’a pas non plus nommé ce dernier et a plutôt fait appel à Ye, qui, au moins jusqu’à récemment, était devenu un proche de la droite en tant que Conservateur chrétien noir, pour corriger le tir.
« Nick Fuentes est incontestablement un antisémite et un négationniste. Sa marque de haine n’a pas sa place dans notre discours public », a déclaré Miller sur Twitter. « Ye n’a pas besoin de continuer à suivre cette voie. Laisser des gens comme Nick Fuentes entrer dans sa vie est une erreur. »
Parmi les éminents Juifs républicains qui n’ont pas fait de déclarations, citons David Kustoff, un membre du Congrès républicain juif du Tennessee, Jason Greenblatt, qui a été l’un des conseillers principaux de Trump pour le Moyen-Orient, ainsi que la fille de Trump, Ivanka, et son mari, Jared Kushner, qui étaient tous deux des conseillers principaux de Trump lorsqu’il était président. Le porte-parole de Kushner n’a pas répondu à une demande de commentaire.
Lee Zeldin, le député juif républicain de New York considéré comme ayant un avenir dans la direction du Parti Républicain américain, après avoir obtenu des résultats plus solides que prévu dans une tentative ratée d’être élu gouverneur d’un État démocrate, n’a pas non plus publié de déclaration, et son porte-parole n’a pas répondu à une demande de commentaire. Zeldin s’est par ailleurs exprimé ouvertement sur les questions juives au Congrès et co-préside le caucus juif-noir de la Chambre des représentants des États-Unis.
Le sénateur de Caroline du Sud Tim Scott, qui est le seul Républicain noir au Sénat et qui co-préside son caucus noir-juif, n’avait pas non plus fait de commentaire dimanche soir. Scott est présumé candidat à la présidence pour 2024.
D’autres leaders républicains ont dénoncé l’extrémisme mais n’ont pas appelé Trump par son nom. Ronna McDaniel, la présidente du Comité national républicain (RNC) connue pour sa proximité avec l’ancien président, n’a répondu que lorsqu’un journaliste – dans son cas, de Bloomberg – lui a posé la question mais s’est bien gardée de nommer Trump.
« Comme je l’ai déjà dit à maintes reprises, la suprémacie blanche, le néonazisme, les discours de haine et la bigoterie sont dégoûtants et n’ont pas leur place au sein du Parti républicain », a déclaré McDaniel.
Pendant ce temps, l’ancien secrétaire d’État, Mike Pompeo, a condamné l’antisémitisme – mais sans mentionner Trump, Fuentes, Ye ni aucune des marques d’antisémitisme dont ils ont fait preuve. Au lieu de cela, Pompeo a parlé de son propre rôle dans l’affaiblissement du mouvement de boycott d’Israël (BDS) – une cause qu’aucun des hommes ayant assisté au dîner n’a embrassée.
« L’antisémitisme est un cancer. En tant que secrétaire, je me suis battu pour interdire le financement des groupes antisémites qui soutenaient le BDS », a déclaré Pompeo sur Twitter. « Nous sommes aux côtés du peuple juif dans la lutte contre la plus vieille bigoterie du monde. »
Une poignée de Républicains, déjà réputés pour leurs critiques ouvertes de Trump, dont le gouverneur de l’Arkansas, Asa Hutchinson, et le gouverneur du New Jersey, Chris Christie, l’ont nommément dénoncé.
« C’est tout simplement horrible. Une telle conduite est inacceptable de la part de quiconque, mais plus particulièrement d’un ancien président et d’un candidat avéré », a tweeté Christie vendredi.
Ron Kampeas a contribué à cet article.