Mobilisation des experts pour sauver les derniers oliviers sauvages d’Israël, voire du monde
Selon les chercheurs, la plus importante population, qui pousse sur des dunes de sable figées dans le nord, pourrait aider l'industrie oléicole à affronter le changement climatique

Plusieurs experts travaillant dans des organisations clés – publiques comme privées – ont décidé de s’unir pour protéger ce qui pourrait être les derniers oliviers sauvages d’Israël.
Ces arbres – qui ressemblent, pour beaucoup, davantage à des buissons et produisent de minuscules fruits dont on tire assez peu d’huile – poussent sur des crêtes de kurkar – du sable figé – à Atlit et dans ses environs, dans le sud de Haïfa, dans la partie nord d’Israël. Sur la côte israélienne, ces dunes ont été éradiquées par les constructions et autres projets d’aménagement.
Considérée comme la plus importante population connue d’oliviers sauvages dans le sud du Levant, au point de distribution le plus méridional de la variété sauvage du sylvestris, ces arbres poussent à proximité d’un village néolithique désormais sous les flots, connu sous le nom de Kfar Samir(7600-7000 avant notre ère), à l’endroit où les archéologues ont découvert des traces de la plus ancienne installation au monde de production d’huile d’olive.
Dvora Lev-Ramati, coordinatrice de la recherche à l’Open Landscape Institute du Musée d’histoire naturelle Steinhardt de l’Université de Tel Aviv, a déclaré, lors d’une récente conférence dans ce qui fut le camp de détention d’Atlit, à l’époque du mandat britannique, que cette espèce d’olivier sauvage était très résistante au sel, aux températures élevées, aux parasites et aux maladies.
Lev-Ramati, qui a pris part à des recherches sur les oliviers d’Atlit, explique que ces derniers pourraient fournir un matériel génétique important pour l’industrie oléicole en proie au changement climatique.
Selon la professeure Dafna Langgut, cheffe du Laboratoire d’archéobotanique et d’environnements anciens de l’Université de Tel Aviv, spécialiste de l’identification microscopique de restes de plantes, l’olivier sauvage qui poussait autrefois un peu partout sur les côtes méditerranéennes, a en grande partie disparu lors de la dernière période glaciaire. Il ne survit plus que dans un très petit nombre d’endroits, comme la côte sud de la péninsule ibérique et la côte du Carmel, près d’Atlit.
Les recherches génétiques menées par le professeur Oz Barazani du Centre Volcani du ministère de l’Agriculture et son étudiant en master de l’époque, Elad Ben-Dor, tous deux présents lors de cette conférence, ont montré que la plupart des oliviers découverts à l’état sauvage en Israël étaient des spécimens cultivés puis revenus à l’état sauvage, et non des spécimens réellement sauvages.

Certains d’entre eux viennent d’oliveraies abandonnées depuis longtemps, d’autres sont issus de noyaux d’olives cultivées et dispersés par les oiseaux ou de pollen d’arbres cultivés transportés par le vent.
Ce n’est que dans le parc d’Adamit, dans l’ouest de la Galilée, à une heure de route au nord-est d’Atlit, que Barazani et Ben-Dor ont trouvé des arbres avec l’ADN d’une variété sauvage.
Avec ces informations en main, le Volcani s’est associé en 2021 à l’Open Landscape Institute pour cartographier un bon millier d’oliviers à Atlit et dans ses environs.
Lors de la conférence, Barazani a laissé entendre que les arbres sauvages découverts à cet endroit pourraient « bien être les derniers représentants de la variété sylvestris en Israël et peut-être même dans le monde. » Il a précisé au Times of Israel qu’il ne pouvait à ce stade confirmer les conclusions de récentes recherches à l’étranger affirmant que des spécimens sauvages avaient été découverts sur des îles grecques de même qu’au Maroc.
Il a ajouté que des boutures avaient été prélevées sur les arbres sauvages d’Atlit dans le but de faire pousser de nouveaux spécimens et, avec un peu de chance, de remplacer des arbres qui devront être abattus pour laisser la place à une nouvelle école.

Les chercheurs ont détaillé les caractéristiques physiques des 1 054 arbres – apparence, taille, forme et quantité de fruits. Ils ont constaté que la plupart des arbres ressemblaient à des buissons, en particulier ceux qui faisaient face à la mer, et donnaient peu de fruits, lesquels produisaient peu d’huile.
Une analyse génétique a été effectuée sur 112 spécimens, en prenant les profils ADN des arbres d’Admit Park comme groupe témoin à des fins de comparaison.
Certaines parcelles d’Atlit présentaient un pourcentage plus élevé de spécimens sauvages, surtout celles exposées aux vents d’ouest de la mer. Les chercheurs ont émis l’hypothèse que ces vents protégeaient les arbres du pollen émanant des arbres cultivés à proximité.
Dans la ville d’Atlit, il y avait quelques arbres avec un haut degré d’ADN d’olivier sauvage, mais l’influence des variétés cultivées était plus prononcée.
Sous réserve de lever davantage de fonds, l’équipe aimerait examiner d’autres populations d’arbres poussant sur le kurkar, au nord, jusque dans les environs de Haïfa, et au sud, jusqu’à Césarée.
Les chercheurs n’ont, pour l’heure, pas encore développé de méthode leur permettant d’identifier à coup sûr arbres sauvages et non-sauvages par leurs seules caractéristiques morphologiques (physiques et structurelles), car celles-ci sont très semblables. S’ils en trouvaient une, cela aiderait les autorités à identifier les arbres sauvages nécessitant une protection.

La génétique des plantes locales est protégée au sein de 230 réserves terrestres en Israël, mais il n’existe qu’une seule réserve génétique pour des espèces particulières – la réserve d’Amiad dans l’est de la Galilée dans le nord d’Israël, qui protège le lointain ancêtre sauvage du blé cultivé (Triticum turgidum var. dicoccoides) entre autres céréales sauvages.
Etrangement, Aaron Aaronsohn, qui est à l’origine de la découverte du blé sauvage dans le nord d’Israël en 1906, a établi sa station de recherche à Atlit en 1909.
Le chef de l’autorité régionale de Hof Carmel, Asif Izak, a expliqué lors de la conférence que le projet de transformation de la ferme en centre éducatif avait été approuvé 10 jours plus tôt. Parmi d’autres espèces, Aaronsohn avait planté 120 oliviers pour étudier quelles espèces seraient les plus adaptées à Israël.
Lors de la table ronde qui a suivi la conférence, il a été décidé de créer un comité de pilotage pour trouver les moyens de protéger ces oliviers sauvages, entre instruments juridiques et formation des jardiniers municipaux, afin qu’ils ne plantent pas d’oliviers cultivés trop près des oliviers sauvages.
Ce comité de pilotage comptera parmi ses membres des représentants du Keren Kayemeth LeIsrael – Fonds national juif, de l’Autorité israélienne de la nature et des parcs, de la Société pour la protection de la nature en Israël, du Centre de recherche Volcani et du Conseil régional de Hof Carmel.
Le commissaire en charge des forêts au ministère de l’Agriculture, qui accorde les licences pour l’abattage d’arbres, n’a pas pu s’engager sans l’autorisation du ministère. Enfin, c’est le Dr Adi Naali, chef de la division des olives au Conseil des plantes d’Israël, qui présidera ce comité.
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