Netanyahu rejette l’avertissement de Kerry sur un État binational
Le Premier ministre déclare qu’il ne peut pas y avoir de solution tant que "l’autre côté" ne veut pas la paix ; il accuse l’AP d’inciter à la violence
Raoul Wootliff est le correspondant parlementaire du Times of Israël
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a accusé dimanche l’Autorité palestinienne (AP) d’être responsable de l’impasse du processus de paix, semblant répondre aux commentaires du secrétaire d’État américain John Kerry, qui a averti qu’un manque de progression sur le conflit israélo-palestinien pourrait mener à la fin de l’État juif.
« Israël ne sera pas un État binational » a déclaré, catégorique, Netanyahu à l’ouverture de la réunion hebdomadaire du cabinet. « Mais, afin qu’il y ait la paix, l’autre partie doit décider qu’ils veulent aussi la paix, et malheureusement ce n’est pas ce que nous voyons. »
Netanyahu a répété ses précédentes affirmations, disant que l’AP incite à la violence durant la vague actuelle de terreur, citant une visite samedi par le responsable des négociations de l’AP Saeb Ereket à la maison familiale d’un homme qui a mené une attaque à main armée la semaine dernière et a été tué après cette attaque.
« Non seulement il n’a pas condamné l’assaillant, mais il a offert ses condoléances à la famille et a ainsi encouragé et soutenu ces actes terroristes, » a déclaré Netanyahu.
Ces commentaires surviennent au lendemain de la déclaration de Kerry au Forum Saban à l’Institution Brookings de Washington, DC, que les tendances actuelles mènent à une solution à un État, et qu’Israël ne serait pas capable de maintenir sa nature juive et démocratique dans un tel scénario.
« Ce statu quo n’est simplement pas tenable, et les faits en la matière sont que les tendances actuelles, y compris la violence, l’activité d’implantation, les démolitions, mettent en péril la viabilité d’une solution à deux États, a averti Kerry. Et cette tendance doit être inversée pour empêcher cette solution intenable d’une réalité à un État de prendre le dessus. »
Kerry, qui a été critiqué cet automne pour sembler accréditer un lien entre la croissance des implantations et la récente montée d’attaques terroristes contre les Israéliens, a affirmé samedi que bien que « les implantations ne sont absolument pas une excuse à la violence – et nous sommes clairs à ce propos », dans le même temps « la croissance continue des implantations soulève des questions légitimes sur les intentions à long-terme d’Israël, et ne fera que rendre beaucoup plus difficile la séparation d’avec les Palestiniens. »
« Je ne peux pas plus insister sur l’effet dévastateur des attaques terroristes sur les espoirs des Israéliens qui veulent croire que la paix est possible et que la violence doit cesser, a déclaré Kerry, mais les espoirs palestiniens sont aussi balayés par ce qu’ils voient jour après jour. Ils se concentrent sur une réalité que peu d’autres voient : que la transition à une plus grande autorité civile des Palestiniens telle qu’envisagée par le processus d’Oslo a, à bien des égards, été inversée. »
Kerry a aussi condamné les constructions israéliennes dans la zone C de la Cisjordanie, qui est sous contrôle sécuritaire et administratif israélien, comme accroissant les désillusions palestiniennes et éloignant la perspective d’une solution à deux États. Dans son discours, Kerry a alerté les ministres du gouvernement israélien qui ont déclaré leur scepticisme face à une solution à deux États.
« Presque toute la zone C, qui comprend 60 % de la Cisjordanie, est de fait restreinte à tout développement palestinien, sa plus grande part étant revendiquée comme la terre de l’État israélien ou des implantations, » a déclaré Kerry à l’assistance.
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« Nous comprenons qu’il n’y a eu qu’un seul permis de construire accordé dans toute la zone C à une construction palestinienne l’année dernière et que les avant-postes des colons sont régulièrement légalisés pendant que la démolition des structures palestiniennes s’accroit. Vous comprenez ? »
Netanyahu a aussi répondu aux commentaires fait vendredi par la ministre suédoise des affaires étrangères Margot Wallström suggérant qu’Israël pratiquait des exécutions extrajudiciaires sur les assaillants palestiniens.
« Je dénonce les commentaires outrageux de la ministre des affaires étrangères suédoise, a déclaré Netanyahu. Il semble qu’elle attende que les citoyens israéliens offrent leurs nuques à ceux qui veulent les poignarder. Cela n’arrivera pas et nous allons continuer à protéger les vies des citoyens israéliens. »
Wallström a prononcé cette remarque au parlement suédois après que trois députés aient accusé le gouvernement d’avoir un biais vers les Palestiniens et contre Israël. En réponse, elle a condamné les attaques aux couteaux par des Palestiniens contre des Israéliens, mais a ajouté que la réponse israélienne était « disproportionnée », citant comme une preuve évidente le grand nombre de victimes palestiniennes comparé aux victimes israéliennes.
La réponse d’Israël implique des « exécutions extrajudiciaires » a-t-elle déclaré, et est « disproportionnée, donc le nombre de morts de l’autre côté est largement supérieur au bilan original ».
Le ministère des Affaires étrangères d’Israël a également diffusé un communiqué très ferme en réponse à ces commentaires.
« Cette déclaration est outrancière. Fantasque, irrespectueuse, et détachée de la réalité. En Israël, chaque criminel est mené devant une cour [de justice], y compris les terroristes, est-il écrit dans le communiqué. Les citoyens israéliens font face au terrorisme, qui est aidé par des déclarations si irresponsables et mensongères. »
Le ministère des Affaires étrangères de Stockholm a publié une clarification des propos de Wallström, affirmant qu’ils ont été mal interprétés.
« La ministre n’a jamais dit qu’Israël menait des exécutions extrajudiciaires, a déclaré le bureau de Wallström. La ministre des Affaires étrangères a prononcé une remarque générale sur les lois internationales et le droit à l’auto-défense, et sur l’importance de la proportionnalité et de la pertinence [de la réponse]. Elle faisait référence aux deux parties. »
La Suède est l’un des pays les plus critiques de la gestion par Israël du conflit avec les Palestiniens. A la suite des attaques du 13 novembre à Paris, dans lesquelles des terroristes ont tué 130 personnes, Wallström a affirmé que la racine des attaques est la frustration des musulmans au Moyen-Orient, y compris celle des Palestiniens.
Rebecca Shimoni Stoil a contribué à cet article depuis Washington.