Netanyahu suggère que la Diaspora s’éloigne du judaïsme
En visite aux Etats-Unis, le Premier ministre a cherché à rassurer les responsables juifs sur l’engagement d’Israël pour le pluralisme et la démocratie
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
NEW YORK — Vendredi, lors d’une conversation avec des journalistes israéliens, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a suggéré que la raison de la relation difficile d’Israël avec les Juifs de la Diaspora était à trouver dans la distance que ces derniers prennent avec le judaïsme.
Lors d’un grand entretien avec les journalistes qui l’accompagnent dans sa visite aux Etats-Unis, le Premier ministre s’est souvenu d’avoir lu un article du magazine Mosaic, qui, selon ses explications, avançait l’argument que le problème n’était pas qu’Israël prenait ses distances vis-à-vis de la Diaspora juive, ou que la Diaspora s’écartait d’Israël, mais que la Diaspora s’écartait du judaïsme.
« Il y a beaucoup de vrai là-dedans », a déclaré Netanyahu.
Netanyahu est revenu sur une rencontre qu’il a eue avec des représentants des groupes juifs américains cette semaine, au cours de laquelle il a cherché à les rassurer sur leurs préoccupations concernant la liberté religieuse et les droits démocratiques dans l’État juif.
« C’était une conversation très naive et vaste », a remarqué Netanyahu, ajoutant qu’il avait dit aux responsables juifs qu’Israël faisait avancer le projet de construction d’un espace de prière égalitaire au mur Occidental.
« J’ai clairement et très honnêtement décrit la situation, notamment les objections des ultra-orthodoxes », a-t-il dit.
« J’ai indiqué que je ferai des démarches pratiques pour préparer l’ouverture de l’espace [pluraliste]. Actuellement, nous n’avons plus qu’une seule étape avant de commencer les travaux. Il s’agit d’obtenir l’approbation du comité d’urbanisme. C’est le dernier point qui reste et après nous pouvons commencer ».
L’espace de prière pluraliste est devenu en point de friction entre Israël et les Juifs de la Diaspora.
La décision originale de construire cet espace remonte au 31 janvier 2016, quand le gouvernement – sous pression après des décennies d’activisme très médiatisé du groupe de prière féministe des Femmes du Mur – a approuvé ce que l’on a appelé le compromis du mur Occidental.
Ayant fait l’objet de négociations difficiles depuis 2012 avec les représentants du Judaïsme libéral et d’autres personnalités importantes, le compromis prévoit la construction d’un espace pluraliste permanent à la place de l’espace temporaire qui existe actuellement.
D’autres éléments clefs du projet comprenaient une entrée unique sur la zone qui sera partagée avec l’espace de prière orthodoxe, non mixte. On prévoyait aussi la création d’un comité composé de Juifs pluralistes pour superviser la zone mixte.
Pourtant, le 25 juin 2017, Netanyahu a gelé le compromis, sous l’intense pression des ultra-orthodoxes. S’il a mis aux oubliettes l’entrée commune et le comité pluraliste de supervision, il a néanmoins promis de poursuivre la construction de l’espace permanent.
Vendredi, il a aussi déclaré qu’il avait « soulevé la question de la conversion » avec les responsables juifs américains. Il a expliqué que le gouvernement travaillait sur cette question épineuse, en qualifiant de « très intéressante » la proposition formulée, plus tôt cette année, de réviser le système de conversion au Judaïsme dans le pays.
En juin, Moshe Nissim, un ancien ministre de la Justice, des Finances et de l’Industrie, a présenté à Netanyahu un rapport et des recommandations sur un éventuel projet de loi pour fixer les conversions dans une procédure uniforme sous les auspices d’un nouvel organisme orthodoxe approuvé par l’État.
La proposition a été immédiatement condamnée par les responsables orthodoxes qui ont appelé le Premier ministre à l’enterrer. Ils considèrent que la réforme diviserait les Juifs et entraînerait la perte de l’héritage juif.
« Je pense que le rapport de Moshe Nissim est très intéressant, c’est un travail important. Il nous servira dans nos délibérations », a indiqué Netanyahu aux responsables juifs.
Il a cependant concédé qu’une réforme majeure avait peu de chances de voir le jour actuellement, à cause des objections des membres ultra-orthodoxes du gouvernement.
Un récent sondage a pourtant montré que les Israéliens juifs veulent des politiques religieuses plus libérales et désapprouvent la gestion de cette question par le gouvernement.
Le Premier ministre a déclaré que la conversation s’est également focalisée sur la récente loi de l’Etat-nation juif, qui ancre Israël comme « le foyer national du peuple juif » dans sa Loi Fondamentale quasi constitutionnelle, et stipule que « le droit d’exercer l’autodétermination au sein de l’Etat d’Israël est réservé uniquement au peuple juif ».
Des Juifs américains ont exprimé les graves préoccupations sur la loi, qui a été critiqué à l’intérieur et à l’extérieur d’Israël comme étant discriminatoire envers les Arabes et les autres minorités.
Netanyahu a dit qu’il avait « expliqué pourquoi nous avions fait adopter la loi de l’Etat-nation. Je l’ai expliqué étape par étape, et j’ai expliqué la problématique de l’équilibre des deux systèmes – démocratique et national. L’objectif n’était de discriminer personne, et que la loi ne faisait de tort aux droits individuels de personne ».
Il a affirmé que les responsables juifs avaient été réceptifs à ses explications. « Ils m’ont demandé si j’était prêt à parler aux communautés réformées et conservatrices [sur la question] … La réponse est oui ».
Netanyahu a qualifié la loi de « vitale » pour s’assurer qu’ »Israël restera l’Etat-nation juif pour les générations à venir ».