Israël en guerre - Jour 435

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Par un décret sans précédent, Washington sanctionne 4 résidents d’implantations

Ces nouvelles mesures imposées à des Israéliens à l'origine de violences "intolérables" pourraient être utilisées pour priver l'ensemble du mouvement pro-implantations de tout financement américain

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Des soldats israéliens se tenant à l'écart alors que des Israéliens jettent des pierres sur des Palestiniens lors d'affrontements, à Huwara, en Cisjordanie, le 13 octobre 2022. (Crédit : Oren Ziv/AFP)
Des soldats israéliens se tenant à l'écart alors que des Israéliens jettent des pierres sur des Palestiniens lors d'affrontements, à Huwara, en Cisjordanie, le 13 octobre 2022. (Crédit : Oren Ziv/AFP)

Le président américain Joe Biden a signé jeudi un décret déclarant une urgence nationale qui lui permet de mettre en œuvre de nouvelles mesures pour lutter contre la violence des résidents d’implantations, notamment des sanctions annoncées simultanément à l’encontre de quatre extrémistes israéliens qui ont commis des actes de violence en Cisjordanie.

Il s’agit de la mesure la plus ambitieuse jamais prise par une administration pour lutter contre ce phénomène, qui persiste malgré les avertissements répétés des États-Unis à Israël, notamment après l’annonce, en décembre, d’une série de restrictions sur les visas, les premières du genre. Cette annonce survient également alors que Biden est de plus en plus critiqué par les démocrates progressistes pour son soutien constant à Israël dans la guerre contre le groupe terroriste palestinien du Hamas et son opposition à un cessez-le-feu permanent.

« La situation en Cisjordanie – en particulier les niveaux élevés de violence des résidents d’implantations extrémistes, le déplacement forcé de personnes et de villages, et la destruction de biens – a atteint des niveaux intolérables et constitue une menace sérieuse pour la paix, la sécurité et la stabilité », a indiqué Biden dans le décret.

Réagissant à cette décision, le bureau du Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré dans un communiqué que « la grande majorité des habitants de Judée et de Samarie sont des citoyens respectueux des lois, dont beaucoup se battent en ce moment même dans le cadre du service actif et du service de réserve pour protéger Israël ».

« Israël agit contre tous les contrevenants à la loi, où qu’ils se trouvent », poursuit le communiqué du cabinet du Premier ministre, « et il n’y a donc pas lieu de prendre des mesures draconiennes dans ce domaine ».

Le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, est allé plus loin en accusant Biden de faire cause commune avec les antisémites et de légitimer les attaques contre les résidents d’implantations israéliens.

Des résidents d’implantation regardant des voitures et des habitations brûler à Huwara, une ville de Cisjordanie, le 26 février 2023. (Crédit : Autorisation)

« La campagne sur la violence des résidents d’implantations est un mensonge antisémite que les ennemis d’Israël diffusent dans le but de salir les résidents d’implantations pionniers et les implantations, de leur nuire et de salir ainsi l’ensemble de l’État d’Israël », a déclaré Smotrich.

« Il s’agit d’une campagne [du mouvement anti-Israël Boycott, désinvestissement et sanctions du] BDS immorale qui transforme les victimes en agresseurs et cautionne l’effusion de sang des résidents d’implantations. Il est dommage que l’administration Biden coopère avec ces actions », a-t-il ajouté.

L’augmentation de la violence des résidents d’implantations au cours des derniers mois, à la suite de l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre, a fait l’objet d’une documentation et d’un rapport importants, et le chef de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet, Ronen Bar, avait averti le cabinet des répercussions à la fin du mois d’octobre.

Le mois dernier, des responsables israéliens ont déclaré au Times of Israel que l’establishment de la sécurité avait pris un certain nombre de mesures pour lutter contre ce phénomène, à la suite des avertissements répétés des États-Unis, et qu’il y avait eu une diminution des incidents de ce type en Cisjordanie.

Le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, a publié un communiqué jeudi en même temps que la notification de la mesure envoyée par Biden au Congrès. « Ce décret permettra aux États-Unis d’émettre des sanctions financières à l’encontre de ceux qui dirigent ou participent à certaines actions, y compris des actes ou des menaces de violence contre des civils, l’intimidation de civils pour les amener à quitter leur domicile, la destruction ou la saisie de biens ou l’engagement dans des activités terroristes en Cisjordanie », a-t-il déclaré.

Les sanctions empêcheront les personnes désignées de bénéficier du système financier américain, leur interdiront tout type de propriété aux États-Unis et gèleront les biens qu’elles pourraient déjà posséder. Les sanctions comprendront également une interdiction d’entrée aux États-Unis.

Le département d’État américain a indiqué dans un communiqué que les quatre personnes désignées lors du premier tour de sanctions sont David Chaï Chasdaï, qui aurait initié et dirigé – à la suite de la mort de deux jeunes frères israéliens lors d’une fusillade terroriste – le saccage de la ville de Huwara, dans le nord de la Cisjordanie, l’année dernière, qui a entraîné la mort d’un des résidents palestiniens ; Eitan Tanjil, qui aurait été impliqué dans des agressions contre des agriculteurs palestiniens et des activistes israéliens en les attaquant avec des pierres et des gourdins, entraînant des blessures qui ont nécessité des soins médicaux ; Shalom Zicherman, qui aurait agressé des militants israéliens et leurs véhicules en Cisjordanie, les bloquant dans la rue, et tenté de briser les vitres des véhicules qui passaient avec des militants à l’intérieur ; et Yinon Levi, qui aurait régulièrement dirigé des groupes de résidents d’implantations de l’avant-poste de la ferme Meitarim qui ont agressé des civils palestiniens et bédouins, les menaçant de violences additionnelles s’ils ne quittaient pas leurs maisons, brûlant leurs champs, et détruisant leurs biens.

De multiples formes de preuves corroborantes sont requises pour qu’un individu soit sanctionné, et elles peuvent inclure des informations publiques, des documents judiciaires et des renseignements, a déclaré un haut fonctionnaire américain qui a informé les journalistes avant l’annonce de jeudi, ajoutant que le décret peut être utilisé pour sanctionner à la fois les Israéliens et les Palestiniens coupables d’actes de violence en Cisjordanie.

David Chaï Chasdaï arrivant pour une audience devant le tribunal, à Jérusalem, le 16 février 2022. (Crédit : Noam Revkin Fenton/Flash90)

Le décret fait suite aux restrictions en matière de visas annoncées en décembre par le département d’État américain à l’encontre des extrémistes violents de Cisjordanie. Toutefois, ces sanctions ne comportaient pas de volet financier. Le nombre de personnes désignées et leur identité n’ont pas été divulgués.

Un mois avant l’annonce des restrictions en matière de visas, Sullivan a publié un mémo ministériel ordonnant aux départements et aux agences d’élaborer des options politiques en vue d’une action supplémentaire contre les responsables des violences en Cisjordanie, a ajouté le haut fonctionnaire américain.

Le haut fonctionnaire a noté que la violence des résidents d’implantations « fait également obstacle à la réalisation d’un État palestinien indépendant, coexistant avec l’État d’Israël ».

Ce phénomène a porté un préjudice considérable à l’Autorité palestinienne (AP), qui est considérée par de nombreux Palestiniens comme incapable de les protéger, même dans les zones qui sont censées être sous le contrôle de Ramallah. Les experts expliquent que l’affaiblissement de la légitimité de l’AP rend plus difficile la mise en place d’une solution à deux États.

Se référant à l’annonce de jeudi, le fonctionnaire a déclaré « qu’il s’agit d’une étape importante pour répondre directement aux menaces que la violence extrémiste en Cisjordanie fait peser sur la sécurité nationale et régionale des États-Unis et souligne à quel point l’administration prend cette menace au sérieux ».

S’exprimant sur les implications de cette décision, Joel Braunold, directeur général du Centre S. Daniel Abraham pour la paix au Moyen-Orient, a déclaré que Biden avait « mis au point un outil permettant de couper l’ensemble du mouvement des résidents d’implantations des services financiers américains ».

« Les actions couvertes par l’ordonnance comprennent la destruction, la saisie ou la dépossession de biens par des acteurs privés ainsi que des actes de violence, mais l’ordonnance permet également de frapper des entités gouvernementales qui ont été considérées comme participant à ces actions », a expliqué Braunold, en faisant référence aux municipalités des implantations.

Biden « n’a pas appuyé sur la gâchette avec cet ordre, mais il a mis en place le système permettant d’exclure toute personne considérée comme une menace pour la paix, la sécurité et la stabilité de la Cisjordanie », a poursuivi Braunold. « L’administration commence au scalpel, mais si les gens demandent où est le levier dont dispose le président, l’administration Biden vient de le créer. »

Le président américain Joe Biden et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu discutant de la guerre entre Israël et le Hamas, à Tel Aviv, le 18 octobre 2023. (Crédit : Miriam Alster/Pool Photo via AP)

L’ordonnance de jeudi ne couvre pas les citoyens américains, qui constituent une part importante des résidents d’implantations israéliens. Le président démocrate de la commission des Affaires étrangères du Sénat américain, Ben Cardin, a demandé à la Maison Blanche de prendre des mesures à l’encontre de cette catégorie de personnes impliquées dans des actes de violence à l’encontre des Palestiniens.

Le haut fonctionnaire américain a déclaré que les informations selon lesquelles l’administration avait envisagé de prendre des sanctions contre les ministres israéliens d’extrême-droite Smotrich et Itamar Ben Gvir étaient « tout simplement erronées » et a ajouté que Washington avait informé Jérusalem en amont de l’annonce de jeudi.

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