Plus de coopération globale pour gagner la cyber-guerre, d’après un expert israélien
Le chef de l'équipe qui a mis en place la politique nationale de cyber-sécurité d'Israël affirme que le pays fait face à près de 2 millions d'attaques par jour
Il faut plus de coopération au niveau global entre les compagnies et les gouvernements pour lutter contre les menaces toujours changeantes du ‘cyber-monde’, a affirmé lors d’une interview le professeur Isaac Ben-Israel, qui a dirigé une équipe de travail ayant mis sur pied la politique nationale de cyber-sécurité d’Israël.
« On n’en fait pas assez au niveau mondial », a déclaré Ben-Israël, qui est à la tête du Centre de cyber-recherche interdisciplinaire Blavatnik à l’Université de Tel-Aviv, en marge d’une conférence sur la cyber-sécurité.
« Tout le monde est d’accord pour dire que la coopération internationale est très importante dans la guerre contre les cyber-crimes ou attaques, mais personne ne sait vraiment quel est le sens de la coopération internationale dans le cyber-espace. Il y a eu de petites avancées ici et là mais c’est très difficile d’avoir une coopération internationale. Les gens disent, ‘partageons nos renseignements’, mais personne ne le fait. Nous pouvons le dire, mais personne ne le fait, nous devons donc trouver d’autres moyens ».
L’augmentation de l’utilisation des mobiles, du web et des médias sociaux fait partie des facteurs clés qui contribuent à une « augmentation explosive » des cyber-menaces, écrit MarketsandMarkets, une firme spécialisée dans la recherche sur les marchés basée à Dallas, Texas, dans un rapport.
Le marché global de la cyber-sécurité va valoir plus de 170 milliards de dollars en 2020, d’après une estimation de MarketsandMarkets, avec des compagnies qui vont se concentrer sur les solutions de sécurité mais également sur les services.
Israël est confronté à entre 200 000 et 2 millions de cyberattaques par jour sur des infrastructures vitales comme les infrastructures d’eau, d’électricité et du réseau ferroviaire, a affirmé Ben-Israël.
La cyber-sécurité est la face sombre de l’ordinateur », a dit Ben-Israël. « Nous avons développé l’ordinateur, nous l’avons rendu omniprésent et plus rapide. Mais nous avons également créé une énorme dépendance vis-à-vis de cet ordinateur, et les mauvaises personnes pourraient utiliser cela pour porter atteinte à notre sécurité. La cyber-sécurité signifie protéger la face brillante de la face sombre », a-t-il ajouté.
Il y a près de 400 compagnies privées et publiques de cyber-sécurité actives en Israël aujourd’hui qui travaillent à répondre à ces menaces, et l’industrie des start-ups d’Israël a crû à un rythme d’environ 15 % dans les périodes récentes, d’après des données fournies par le Centre de recherche IVC basé à Tel-Aviv, centre qui suit l’industrie high-tech israélienne. Plus de 300 millions de dollars ont été levés par les compagnies israéliennes de cyber-sécurité en 2015, lors de 72 opérations de levées de fonds, a ajouté IVC.
Au niveau global, l’investissement dans les compagnies de cyber-sécurité a atteint un pic inégalé en 2015, allant jusqu’à 3,8 milliards de dollars, au-delà des 2,8 milliards de dollars de 2014 et 1,1 milliards de dollars de 2011, d’après la compagnie de rassemblement de données basée à New-York CB Insights.
Les ordinateurs ont en moyenne une durée générationnelle d’un an et demi, a affirmé Ben-Israël. Tant qu’ils évoluent, alors la technologie de cyber-sécurité doit s’adapter, a-t-il dit.
« On ne peut pas parler de tendances en matière de cyber-sécurité, la technologie change si vite », déclare Ben-Israël. « Nous ne savons pas quelles seront les menaces du futur. Nous connaissons que les menaces passées et les menaces actuelles, mais nous n’avons pas assez de connaissances concernant le futur car cela change constamment. »
Ben-Israël a étudié les mathématiques, la physique et la philosophie à l’Université de Tel Aviv et a reçu son doctorat en 1988. Durant son service à l’armée où il a officié jusqu’en 2002, Ben-Israël a servi dans différents postes dans des unités opérationnelles, de renseignements et de développement d’armement de l’armée de l’air israélienne et a pris la tête de la recherche et du développement militaire de l’armée et du ministère de la Défense.
En 2011, Ben-Israël a dirigé l’équipe de travail qui a mis en place la politique nationale de cyber-sécurité d’Israël et a fondé le cyber-Quartier-général national dans le bureau du Premier ministre. En février 2015, le gouvernement a décidé de mettre sur pied une nouvelle cyber-autorité nationale.
« Durant notre travail avec l’équipe, nous nous sommes demandé ce dont nous avions besoin pour créer un cyber-écosystème vivant qui aurait de nouvelles idées constamment, et s’adapterait rapidement à la technologie en évolution constante, » a-t-il ajouté.
L’augmentation des études de cyber-sécurité dans les Universités israéliennes en plus du capital humain venant de l’armée et d’une opportunité de marché identifiée par l’industrie high-tech locale a mené à une croissance de la cyber-industrie israélienne, dit-il. Les exportations de produits de cyber-sécurité israéliens équivalent aujourd’hui à 8 à 10 % de ce qui est estimé être une industrie globale de cyber-sécurité valant 60 milliards de dollars.
La cyber-industrie florissante d’Israël fait totalement partie de l’écosystème high-tech qui a fait la renommée d’Israël en tant que nation de start-ups, ajoute Ben-Israël.
« Il s’agit majoritairement de développer le capital humain, » a-t-il dit. « Les Israéliens se disputent tout le temps, nous avons un sens très développé de l’art de la critique. Le peuple d’Israël critiquait Moïse. Tout a commencé là. La critique est bonne pour l’innovation. »