Plusieurs groupes juifs ont refusé de soutenir l’interdiction d’entrée
Même après une visioconférence avec l'ambassadeur israélien, la Conference of Presidents a exprimé ses "réserves" sur le refus de laisser entrer en Israël les élues démocrates
La principale association d’organisations juives américaines, la « Conference of Presidents of Major American Jewish Organizations », s’est abstenue de soutenir la décision de jeudi du gouvernement israélien d’interdire l’entrée en Israël à deux élues démocrates. Le groupe a préféré exprimer ses « réserves » sur la décision. Rashida Tlaib a depuis été autorisée à entrer en Israël pour motifs « humanitaires », mais a refusé d’effectuer le voyage dans ces « conditions oppressives ».
La Conference of Presidents, qui soutient habituellement les décisions du gouvernement israélien et qui le critique rarement en public, a organisé une visioconférence au cours de laquelle l’ambassadeur d’Israël aux Etats-Unis, Ron Dermer, a expliqué les raisons de l’interdiction. Dermer, qui avait promis le mois dernier que les deux élues, Rashida Tlaib et Ilan Omar, pourraient entrer en Israël, a déclaré aux responsables juifs américains que la décision de leur interdire l’entrée était motivée par le fait que les deux élues musulmanes soutenaient le mouvement BDS ciblant Israël. Il a déclaré que le parcours de leur voyage, qui devait commencer dimanche, présentait la destination comme « Palestine », et non pas Israël, et ne prévoyait aucune rencontre avec des officiels israéliens.
Dermer a ajouté que les élues prévoyaient de rencontrer des organisations promouvant le BDS, dont l’un des responsables a des liens avec le Front populaire de libération de la Palestine, qui est désigné aux Etats-Unis comme un groupe terroriste. « Les responsables de notre pays considèrent que cette visite avait pour seul objectif de faire la promotion du BDS », a déclaré l’ambassadeur.
Après avoir dialogué avec Dermer lors de l’appel, la Conference of Presidents a publié un communiqué reconnaissant que Tlaib et Omar avaient « clairement fait savoir que leur ‘voyage en Palestine’ visait à promouvoir une politique anti-Israël et montrait un manque évident d’intérêt dans le dialogue ou une présentation de la vérité ».
La Conference a toutefois « exprimé ses réserves sur les conséquences de la décision ».
Le groupe a également déclaré, dans l’appel, qu’un certain nombre des 53 organisations membres de la Conférence « avait exprimé leur désaccord avec la décision du gouvernement et exprimé une crainte qu’elle serait exploitée par les pro-BDS et d’autres critiques d’Israël, alors que d’autres exprimeraient leur soutien ».
La Conference a également indiqué sa préoccupation sur l’impact potentiel de l’interdiction sur le soutien politique bipartite pour Israël : « Notre espoir est que le soutien bipartite témoigné par les récents voyages de membres du Congrès en Israël et le passage de mesures pro-Israël par une écrasante majorité ne changeront pas », a déclaré le groupe, et qu’un « soutien bipartite pour la relation spéciale entre les Etats-Unis et Israël sera renforcée… Les liens entre les deux pays sont vitaux, particulièrement lors qu’ils sont confrontés à des ennemis communs qui ont promis de les détruire. »
Les « réserves » formulées sur l’interdiction par la Conference of Presidents, dont les membres incluent des groupes libéraux comme Americans for Peace Now mais excluent le groupe de gauche J Street, sont intervenues après que l’AIPAC, puissant groupe de lobby, a fait une critique directe de l’interdiction. L’AIPAC a souligné la gêne profonde parmi les principaux groupes juifs américains sur la décision israélienne.
Alors qu’il n’est pas d’accord avec les positions des deux élues, l’AIPAC a affirmé « que chaque membre du Congrès devrait pouvoir visiter et faire l’expérience directe de notre allié démocratique Israël ».
Ce mois-ci, une organisation liée à l’AIPAC a fait venir des dizaines de nouveaux élus républicains et démocrates du Congrès en Israël pour des visites et différentes rencontres. Lors d’une conférence commune à Jérusalem dimanche, les responsables des deux délégations ont déclaré qu’Israël devrait permettre à Tlaib et Omar de venir en Israël.
Dans un communiqué virulent ce jeudi, Steny Hoyer, allié fidèle d’Israël, chef de la délégation démocrate, a qualifié la décision d’Israël de refuser l’entrée aux deux élues de « scandaleuse, quels que soient leurs parcours ou leurs points de vue ». Il a appelé Israël à revoir sa décision et affirmé que celle-ci était « contraire à la déclaration et aux garanties qui m’ont été faites par l’ambassadeur israélien aux Etats-Unis que ‘par respect pour le Congrès américain et la grande alliance entre Israël et les Etats-Unis, nous ne refuserions l’entrée à aucune membre du Congrès en Israël’. Ces propos n’étaient pas vrais ».
Hoyer a déclaré que la décision « injustifiée » et « auto-destructrice (…) reflète de la faiblesse, pas de le force… Au lieu de cela, le gouvernement israélien devrait chercher à dialoguer avec des membres du Congrès concernant la sécurité d’Israël et le futur des Israéliens et des Palestiniens ».
L’agence JTA a contribué à cet article.