Israël en guerre - Jour 537

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Saad Mousa, l’Arabe israélien agressé à Bat Yam, dit avoir été abandonné par l’État

Après une tentative de suicide, la victime, grièvement blessée par des voyous juifs lors d'une agression sur fond de guerre à Gaza en 2021, dit être un "fardeau" pour les siens

Saeed Mousa, un Arabe israélien qui a été agressé par des voyous juifs israéliens au mois de mai 2021, s'exprime devant les caméras de la chaîne Kan, le 11 février 2022. (Capture d'écran)
Saeed Mousa, un Arabe israélien qui a été agressé par des voyous juifs israéliens au mois de mai 2021, s'exprime devant les caméras de la chaîne Kan, le 11 février 2022. (Capture d'écran)

Saeed Mousa, un Arabe israélien qui avait été sorti de force de sa voiture et agressé sans pitié par des voyous juifs au cours des violences intercommunautaires qui avaient balayé le pays l’année dernière – le tout en direct à la télévision -, a dit vendredi avoir tenté de se suicider ces derniers jours, ne supportant plus d’être « négligé » par l’État après l’épreuve traumatisante qu’il a subie.

Mousa a expliqué qu’après une longue hospitalisation et une rééducation lente et difficile, il se trouve dorénavant dans l’incapacité de travailler et que le gouvernement l’a largement ignoré, ne lui apportant aucune aide financière pour survivre. Il n’a pas précisé quelle avait été sa profession jusqu’à cette funeste soirée du mois de mai dernier.

Dépendant, honteux de sa situation, Mousa a avalé lundi de nombreux médicaments pour en finir. Il a été secouru in extremis par des membres de sa famille qui l’ont emmené en toute hâte à l’hôpital, a-t-il raconté.

« Quand vous faites appel à des institutions qui doivent logiquement vous venir en aide – la Caisse d’Assurance Nationale [bitouach leumi] et les autres – et qu’on met votre dossier dans un coin, qu’on ne vous demande pas comment vous allez, qu’on ne vous demande rien… Si on vous aide, c’est parce que vous êtes allé les voir vingt fois… Vous allez voir les commissions, vous faites la navette de l’une à l’autre et en fin de compte, on vous donne 800 shekels », a-t-il déclaré devant les caméras de la chaîne de télévision Kan.

Les sommes fournies sont « celles qu’ils ont envie de vous donner. Et parfois, rien n’est envoyé » avant l’intervention de quelqu’un « qui, de son côté, entretient des liens au sommet de la hiérarchie », a-t-il affirmé.

En réponse à la chaîne Kan, la Caisse d’Assurance Nationale a fait savoir que Mousa « a refusé de coopérer malgré nos nombreuses tentatives d’entrer en contact avec lui » et que malgré cela, il bénéficiait dorénavant d’une allocation à hauteur de 8 000 shekels par mois.

L’avocate de Mousa a dit, pour sa part, qu’elle n’avait pas connaissance de l’existence d’une telle allocation, ajoutant que tous les documents réclamés avaient été déposés et que Mousa avait pris part à toutes les discussions des commissions à l’exception d’une seule.

Saeed Mousa, un Arabe israélien qui a été agressé par une foule d’Israéliens juifs, au centre médical Ichilov, le 14 mai 2021 (capture d’écran vidéo).

Mousa a ajouté qu’il était dans l’incapacité de travailler. « J’ai essayé, j’ai vraiment essayé… Je ne veux pas de ce statut de handicapé. J’ai l’habitude de travailler. J’ai l’habitude de gagner ma vie de mes propres mains. Je ne demande aucune aide ou quoi que ce soit… Je suis retourné au travail, j’ai essayé mais je n’ai pas réussi », a-t-il déploré.

Mousa a ajouté ne pas être parvenu à travailler à cause de ses « douleurs » et « du stress qui résulte du fait de me retrouver avec des gens autour de moi. Dès que je vois des gens autour de moi, je ressens de l’anxiété », a-t-il dit – attribuant cette angoisse au traumatisme entraîné par l’agression violente subie au mois de mai dernier.

« Et quand vous vous réveillez le matin, vous avez les enfants qui vous demandent quelque chose et vous ne pouvez pas le leur donner. A manger, toutes ces petites choses que vous n’êtes plus en mesure de leur offrir », a poursuivi Mousa, expliquant les causes qui l’ont amené à tenter de se suicider.

« Il n’y avait plus rien à faire, je me suis dis que je ne voulais plus vivre tout ça. Je vois bien mon entourage, je suis un fardeau pour lui, je ne sais pas… C’est devenu trop dur ».

« Je veux que ça s’arrête, je ne veux plus vivre. Me faire du mal à moi-même, ne pas faire de mal aux autres… Me faire du mal et disparaître, c’est tout », a-t-il confié à la chaîne.

« Et je ne veux pas remercier ceux qui m’ont sauvé. Si je dois rester comme je suis actuellement, ça n’en vaut pas la peine », a-t-il ajouté.

Mousa a indiqué que sa situation actuelle était finalement bien pire que pendant sa longue rééducation. « Pendant un mois, je ne ressentais rien, j’avais l’impression de vivre un rêve » mais ensuite, la réalité s’est imposée et elle est devenue de plus en plus difficile, a-t-il continué.

Il a noté que les travailleurs sociaux ne s’étaient pas entretenus avec lui depuis sa tentative de suicide et qu’aucune aide ne lui avait été proposée.

Mousa a déclaré qu’il n’avait jamais regardé la vidéo de son agression. « Je n’ai vu aucune vidéo jusqu’à présent. Et c’est intentionnel. Je ne veux pas en voir ». Il a précisé que la dernière chose dont il se souvenait était quand les voyous lui avaient demandé s’il était Arabe – et qu’il avait oublié tout le reste.

Cette attaque qui n’avait été précédée d’aucune provocation avait été diffusée en direct à la télévision, créant une onde de choc dans le pays.

L’un des suspects, Lahav Nagauker, avait été interviewé, encore en direct, après l’agression. Il avait déclaré à cette occasion aux journalistes que « on est venus ce soir se battre avec les Arabes… Si on doit le faire, on va les tuer et si on doit le faire, on va les assassiner ».

Au mois dix personnes ont été mises en examen dans le cadre de cette violente attaque, mais une seule condamnation a été prononcée depuis. Nagauker, qui était alors âgé de 20 ans, a été condamné au début du mois pour incitations à la violence et racisme dans le cadre d’une négociation de peine qui a entraîné une réduction des chefs d’inculpation. La cour a estimé que si Nagauker n’avait pas été impliqué directement dans l’attaque, il avait néanmoins jeté une bouteille en direction de la voiture de Moussa, endommageant le pare-brise arrière de son véhicule.

Mousa a dit ne pas avoir suivi le procès ni les arrestations. « Si ce pays est réellement un État de droit, ils seront tous rattrapés », a-t-il commenté.

Mousa a ajouté que sa confiance dans les Juifs était restée la même depuis l’attaque. « Ce n’est pas que je ne fais pas confiance – mais je n’aime pas me mélanger aux autres. Mais j’ai des amis juifs, ils viennent me voir à la maison… Mais je n’ai pas envie de me mêler aux autres, je veux rester seul », a-t-il insisté.

Alors que la chaîne Kan lui demandait ce qu’était dorénavant son quotidien, il a répondu : « Je dors ».

Mousa a dit souffrir, ses médicaments lui ayant été retirés après sa tentative de suicide. « Nous avons une Caisse d’Assurance Nationale [bitouach leumi] que nous payons, nous avons des institutions de l’État que nous payons, ils devraient s’occuper de nous », a-t-il déploré.

« Le plus difficile pour moi, c’est le silence du gouvernement, c’est que le gouvernement ne s’intéresse pas à moi. C’est très dur », a-t-il maintenu.

Il a estimé qu’il était « humiliant » de devoir mendier une aide auprès du gouvernement et qu’il était aussi frustrant de voir que ce dernier ne s’impliquait que lorsque, de temps en temps, de puissantes personnalités décidaient d’intervenir pour lui apporter une aide.

« Quand il s’agit de quelqu’un qui, ils le savent très bien, peut leur entraîner beaucoup de problèmes alors ils m’aident – puis ils oublient tout ensuite pendant un mois ou deux », a-t-il expliqué.

Ahmed Masharawi, à droite, ancien membre du conseil municipal de Tel Aviv, avec Saeed Mousa, un Arabe israélien qui a été agressé par des voyous juifs au mois de mai 2021, le 11 février 2022. (Capture d’écran)

Ahmed Masharawi, ami de Mousa et ancien membre du conseil municipal de Tel Aviv, a déclaré de son côté devant les caméras de Kan que « c’est un homme très introverti et fermé, et j’ai le sentiment que c’est seulement quand je suis en tête à tête avec lui que je peux obtenir de lui le récit de ses énormes souffrances – psychologiques d’abord avec le traumatisme subi et financières ensuite ».

« Il me dit : ‘J’avais l’habitude d’avoir deux ou trois emplois pour m’assurer des revenus respectables où rien ne manquerait parce que j’étais le chef de famille’ – une mentalité arabe… Et il ajoute que ‘soudain, je me retrouve chez moi, enfermé, je ne peux voir personne, je souffre, je prends des médicaments, je fume toute la journée’, » a continué Masharawi.

Masharawi a noté qu’il passait parfois trois à quatre jours sans pouvoir dormir du tout.

« Au niveau financier, je le demande : Où est l’État d’Israël ?… Si je ne n’étais pas là, derrière lui, alors il serait complètement perdu. On a le sentiment très clair que si on le quitte un moment, personne ne sera là pour l’aider, pour prendre soin de lui », a-t-il continué.

Masharawi a fait savoir que, ces derniers jours, certains groupes de soutien de victimes de violences nationalistes commençaient à s’intéresser à ce dossier. « Cet homme a besoin d’aide. Un grand nombre de médias étrangers ont voulu parler aux éventuelles victimes. Je sais ce qu’ils recherchaient – ils recherchaient des informations pour attaquer le pays. Et nous avons décidé, tous ensemble, que nous ne laisserions pas faire cela ».

« Cet homme aime les gens, il les aiment, mais les choses sont différentes aujourd’hui. Il s’est complètement refermé. J’en appelle à l’État d’Israël : Aidez-le, permettez-lui de se remettre sur pied, permettez-lui de vivre une vie normale, une vie nourrie d’espoirs », a ajouté Masharawi.

L’agression, qui s’était produite à Bat Yam, une banlieue de Tel Aviv, était survenue alors qu’Israël était en guerre contre le groupe terroriste du Hamas, dans la bande de Gaza. Ce conflit d’onze jours avait entraîné une vague sans précédent de violences opposant Juifs et Arabes dans les villes de tout le pays.

Mousa se rendait à la plage de Bat Yam quand il avait été attaqué par un groupe bien déterminé à s’en prendre aux Arabes et aux commerces arabes de Bat Yam, selon l’acte de mise en examen émis dans le dossier.

Selon les procureurs, Mousa avait tenté de fuir les voyous, faisant reculer sa voiture et entrant en collision avec le véhicule qui se trouvait derrière lui. Il avait ensuite accéléré, faisant fuir les individus qui se trouvaient devant son capot, et il était entré dans une autre voiture.

Sorti de force de son véhicule par les voyous – et accusé par certains d’avoir tenté de renverser des piétons – il avait violemment frappé.

Il avait été évacué vers l’hôpital Ichilov dans un état grave.

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