Service militaire : des centaines d’ultra-orthodoxes bloquent la Route 4
Les membres d'une faction extrémiste ont brandi des panneaux "En prison, pas dans l'armée" et "Nous mourrons plutôt que de faire le service militaire", alors que la Haute-cour a ordonné de lancer le processus de recrutement des Haredim

Des centaines de manifestants ultra-orthodoxes ont bloqué la Route 4 aux abords de la ville de Bnei Brak, au centre du pays, pendant un mouvement de protestation contre le service militaire obligatoire, lundi – le jour même où le ministère de la Défense devait, sur ordre de la Haute cour, lancer le processus de recrutement des jeunes membres de la communauté haredi au sein de l’armée.
Les personnes présentes à ce rassemblement appartenaient à la Faction de Jérusalem, un groupe extrémiste qui compte 60 000 membres et qui manifeste régulièrement contre l’enrôlement, dans l’armée, des étudiants des yeshivot.
Les protestataires brandissaient des panneaux où l’on pouvait lire « En prison, pas dans l’armée » ; « Nous mourrons plutôt que de faire le service militaire » ou « La Russie, c’est ici ». La police a arrêté six participants et elle a dispersé par la force les manifestants qui bloquaient l’autoroute et qui refusaient de partir. La circulation a pu reprendre après deux heures de blocage.
Ce rassemblement a eu lieu le jour même de l’entrée en vigueur d’une ordonnance rendue par la Haute-cour de Justice, qui a gelé le soutien financier apporté aux yeshivot de la communauté dont les étudiants bénéficient d’une exemption de service militaire annuelle. Le ministère de la Défense a reçu pour instruction, en conséquence, de lancer le processus de recrutement des hommes Haredim.

Le gouvernement était dans l’obligation de trouver un nouveau moyen de se conformer à une décision de justice datant de 2017 avant le 31 mars – dans cette décision, les magistrats avaient déterminé que l’exemption de service militaire des jeunes ultra-orthodoxes était discriminatoire et illégale.
Mais le gouvernement a été dans l’incapacité d’adopter une nouvelle législation sur le sujet qui aurait été acceptable pour la Cour – et l’enrôlement des jeunes Juifs ultra-orthodoxes au sein de l’armée s’est ainsi imposé.

Le mois dernier, le Premier ministre Benjamin Netanyahu avait averti les formations haredim qu’il les « indemniserait rétroactivement » si la Cour coupait les financements, a indiqué la Douzième chaîne.
De son côté, le leader de l’opposition, Yair Lapid, a appelé lundi le Premier ministre à « faire respecter la loi ».
« J’appelle le gouvernement à ne pas tricher, à ne pas tromper, à ne pas trouver de moyens de contournement, à ne pas transférer de budgets cachés, à ne pas faire toutes ces choses qu’il tentera de faire, nous le savons », a commenté Lapid pendant la réunion hebdomadaire de sa faction Yesh Atid, à la Knesset. « Pour changer, les membres du gouvernement seront dans l’obligation d’agir comme s’ils étaient membres d’un gouvernement respectueux de la loi dans un pays qui respecte la loi ».
La bataille politique sur le service militaire des Haredim a plongé le gouvernement de Netanyahu dans la tourmente, alors que le ministre Benny Gantz, du parti HaMahane HaMamlahti, a menacé de quitter la coalition si la Knesset devait adopter un projet de loi préservant ce système généralisé d’exemption – tandis que les Haredim, de leur côté, ont indiqué qu’ils quitteraient le gouvernement si ce dernier devait ne pas approuver une législation leur permettant d’échapper au service.
La majorité des hommes juifs sont dans l’obligation d’effectuer un service de presque trois ans, qui est suivi de longues années de devoir de réserve. Les citoyennes juives passent elles deux ans sous les drapeaux pour un grand nombre d’entre elles. Mais les Haredim, puissants politiquement, qui comptent pour environ 13 % de la société israélienne, bénéficient traditionnellement d’exemptions lorsqu’ils étudient à plein temps dans les yeshivot. Les exemptions – et les allocations gouvernementales qui sont versées à ces étudiants de la Torah jusqu’à l’âge de 26 ans – exaspèrent le public israélien de façon générale.
Une frustration qui a atteint un pic depuis l’attaque terroriste du Hamas dans le sud d’Israël, en date du 7 octobre, et la guerre qui a suivi, avec le bilan humain qui s’alourdit dans les rangs de Tsahal et au moment où il est demandé à certains réservistes de prolonger leur service dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre face aux menaces croissantes qui planent sur Israël.
Sam Sokol et Jeremy Sharon ont contribué à cet article.