Un début de session d’hiver bien difficile à la Knesset
Une bataille budgétaire pas encore gagnée et un projet de réforme sur les conversions : la coalition va-t-elle exploser ?
Haviv Rettig Gur est l'analyste du Times of Israël
La Knesset ouvre sa session d’hiver lundi, alors que 120 députés reviennent au parlement pour la première fois depuis l’été dans une atmosphère tendue : une série de projets de loi controversés est attendue pour tester les différentes parties de la coalition.
Parmi les projets de loi, de nouvelles règles d’assouplissement pour les conversions au judaïsme, une proposition visant à permettre à la Knesset de passer outre la Haute Cour quant aux lois et politiques concernant les migrations et les migrants.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, le président Reuven Rivlin, le président de la Knesset Yuli Edelstein, le chef de l’opposition Isaac Herzog, et d’autres députés prononceront des discours lundi après-midi lors de la session plénière.
Le premier ordre du jour du Parlement sera l’adoption du budget 2015 de l’Etat, ce qui n’est pas un mince exploit. De nombreuses batailles ont déjà été menées sur le prochain budget, la plus spectaculaire étant celle du ministre des Finances Yair Lapid afin d’éliminer la taxe sur la valeur ajoutée sur les achats de maisons neuves pour les jeunes couples primo-accédants qui ont accompli leur service militaire ou national.
Lapid et Netanyahu ont conclu un accord sur la question plus tôt ce mois-ci, qui verra finalement la proposition de Lapid présentée comme un projet de loi distinct en parallèle avec l’adoption du budget.
Selon la loi, si le budget ne parvient pas à passer, le gouvernement doit tomber.
La Knesset devra également débattre du recours de l’Autorité palestinienne au Conseil de sécurité des Nations unies dans les prochaines semaines, ainsi qu’à la Cour pénale internationale contre Israël.
Né comme une réponse aux protestations de 2011 contre le coût élevé de la vie, le plan de Lapid cherche à lutter contre la principale plainte de la classe moyenne israélienne : le coût prohibitif de l’achat d’un appartement. Le plan n’a pas été accueilli avec beaucoup d’enthousiasme.
Il y a déjà des signes que le gouvernement ne puisse livrer son projet de loi budgétaire à temps – pour mercredi 29 octobre – soit en raison de nouveaux désaccords sur le budget au sein du gouvernement soit comme tactique pour raccourcir le temps alloué à la Knesset pourra ajouter des changements.
Cette coalition « est beaucoup plus difficile que les précédentes », selon le président du Likud de la Knesset Yariv Levin, qui a fait savoir que le passage des 19 sièges du Likud à 18 [avec le retrait de Gideon Saar] rendrait difficile la possibilité de gouverner.
« Il y a un petit parti au pouvoir, les relations entre les chefs de partis de la coalition sont pleines d’acrimonie, et il y a d’énormes écarts entre les partis » sur un éventail de questions, a-t-il confié.
Saar quittera la Knesset lundi, et avec son départ de Yesh Atid, le parti de Lapid deviendra la plus grande formation avec 19 sièges tandis qu’Yisrael Beitenou gagnera un treizième député, Leon Litinetsky.
Dans un tel contexte, les projets de loi visant à réformer radicalement les politiques publiques de conversion, la maternité de substitution, et d’autres questions dans lesquelles les législateurs religieux, susceptibles d’entrer en conflit avec des députés davantage attachés aux libertés, peuvent faire exploser une coalition déjà chancelante.
Nul besoin de chercher très loin pour trouver des terrains minés. Netanyahu a cette semaine informé ses partenaires de la coalition qu’il retirait son soutien au projet de loi de conversion du député Elazar Stern (Hatnua) et ne permettrait pas qu’il devienne une loi, a rapporté lundi la Deuxième chaîne.
Le projet de loi permettrait aux Israéliens de se convertir au judaïsme par un rabbinat municipal, permettant aux convertis potentiels, en particulier chez les russophones qui ont immigré de l’ancienne Union soviétique, de contourner les rabbins étatiques qui refuseraient de les convertir et de mettre en place un rabbinat qui permettrait ces conversions.
Comme avec Lapid et son « plan de logement à zéro TVA », la ministre de la Justice, Tzipi Livni, qui dirige Hatnua, a menacé de quitter la coalition si le projet de loi n’était pas adopté.
Mais Netanyahu estime maintenant que Livni joue une partie de bluff – et espère que, même si elle quitte effectivement le gouvernement, l’entrave à cette grande réforme religieuse permettra de reconquérir les partis ultra-orthodoxes malgré la décision, l’année dernière, d’établir un gouvernement sans eux.
Netanyahu peut également être tenté de parer à une crise non pas avec Livni – qui n’a « que » 6 sièges à la Knesset qu’il peut se permettre de perdre dans sa coalition de 68 sièges – mais avec Habayit Hayehudi, dont il ne peut pas perdre les 12 sièges sans risquer sa majorité parlementaire.
On peut s’attendre à ce que le parti de Naftali Bennett résiste à d’importantes réformes religieuses, allant jusqu’à l’abandon de la coalition, qui provoquerait cette fois de nouvelles élections.
Mais un nouveau rapport lundi a révélé que le Premier ministre a peut-être réussi à pacifier le parti et les députés de droite en approuvant
2 000 nouveaux logements en Cisjordanie et dans la capitale, ainsi que de nouvelles infrastructures.
Le rapport a suscité la critique de Lapid, de Livni et d’autres.
Lundi, le bureau du Premier ministre Netanyahu a annoncé un plan d’accord pour quelque 1 000 nouveaux logements à Jérusalem Est.