Un étudiant de Harvard interviewe les Juifs qui changent le monde
Dans son podcast "Voices of Impact", Isaac Ohrenstein parle avec les personnalités juives les plus influentes. Au micro, il évoque cette fois son expérience

NEW YORK – Isaac Ohrenstein se souvient s’être senti un peu étonné lorsqu’il s’est assis pour interviewer la docteure Einat Wilf dans son appartement de Tel Aviv en janvier dernier. Il n’arrivait pas à croire qu’Einat Wilf, ancienne membre de la Knesset et auteure de renom, était la première invitée de son podcast « Voices of Impact ».
Aujourd’hui, plus de 60 épisodes plus tard, l’étudiant en troisième année à l’université de Harvard et membre du Congrès juif mondial-Lauder a déclaré qu’il est encore parfois surpris par les différentes personnes qu’il a pu interviewer.
Lancé en janvier, sous les auspices du Congrès juif mondial, le podcast « Voices of Impact » propose des conversations avec des leaders et des acteurs du changement dans le monde juif, dans des domaines tels que les affaires, la politique, l’université et la philanthropie. Ohrenstein a ainsi rencontré le docteur Yossi Beilin, principal négociateur des accords d’Oslo, Mendy Chitrik, président de l’Alliance des rabbins des États islamiques, et Jane Weitzman, ancienne vice-présidente exécutive de la société de chaussures Stuart Weitzman.
« Mes invités préférés sont ceux qui sont capables d’aborder tous ces domaines. J’aime pouvoir partager l’histoire de ces leaders juifs et j’ai toujours été fasciné par les personnes qui font un travail à fort impact », a déclaré Ohrenstein lors d’un entretien vidéo avec le Times of Israel depuis son appartement situé en périphérie de Tel-Aviv.
Ohrenstein, qui étudie à l’université de Tel-Aviv cette année, a déclaré qu’il était heureux de retourner dans la région. Il continue à faire des recherches pour la Mohammed bin Rashid School of Government à Dubaï et, l’été dernier, il a travaillé pour la Chambre de commerce de Dubaï. Auparavant, il avait travaillé pour Fontainebleau Development à Miami, un groupe spécialisé dans l’immobilier et l’hôtellerie.
Né à Washington, DC, et élevé à St. Louis, dans le Missouri, Ohrenstein s’est installé à New York alors qu’il était en classe de seconde. Après avoir obtenu son diplôme de fins d’études à la SAR Academy, il a pris une année sabbatique pour étudier dans une yeshiva à Jérusalem.
C’est au cours de cette année que Ohrenstein a attrapé la fièvre du voyage. Cependant, plutôt que de rechercher la vue ou le repas le plus ‘instagrammable’, il a utilisé ses expéditions essentiellement comme un moyen de trouver un terrain d’entente entre les Juifs et les Arabes.
Au cours de ses voyages en Asie, en Afrique, en Europe et au Moyen-Orient, il a été surpris par ce qu’il a décrit comme une réceptivité à Israël, au peuple juif et à la culture juive. Bien qu’il ait été surpris de trouver « de la nourriture casher en abondance » dans les Émirats arabes unis, il a déclaré que le centre Habad était « une bouée de sauvetage » dans ce pays car il assurait un approvisionnement régulier en nourriture casher et une communauté.
« Aussi cliché que cela puisse paraître, j’ai beaucoup appris sur moi-même en voyageant et j’essaie d’intégrer ces expériences dans mes conversations », a déclaré Ohrenstein.
L’entretien qui suit a été édité par souci de concision et de clarté.
The Times of Israel : Mis à part le premier épisode avec Einat Wilf, quels sont les autres invités du podcast qui vous ont donné l’impression d’être en présence d’une star ?
Isaac Ohrenstein : Quelqu’un comme le rabbin David Wolpe. Moi et d’autres étudiants avons discuté avec lui dans un groupe pro-israélien à Harvard juste après le 7 octobre. Mais c’était remarquable de parler avec lui en tête-à-tête et d’écouter ses idées en direct. Il est tellement réfléchi.
Le simple fait de pouvoir parler, 45 minutes ou une heure durant, avec ces formidables dirigeants juifs qui ont fait des choses extraordinaires est réellement fabuleux. Je suis très reconnaissant d’avoir pu partager ce que j’ai vécu.
Quels sont les épisodes qui vous ont le plus marqué ?
L’épisode avec l’ambassadeur Gordon Sondland était très intéressant, ainsi que celui avec le rabbin Mendy Chitrik, qui a parlé de ses entretiens avec l’ambassade de Turquie pour trouver le moyen de faire venir en Israël en toute sécurité le dernier juif d’Afghanistan [Zebulon Simantov].
Vous avez dit qu’en voyage, vous vous sentiez plus en sécurité, en tant que Juif, dans certains pays arabes qu’en Europe. Pouvez-vous nous en dire plus là-dessus ?
J’ai passé beaucoup de temps au Moyen-Orient. Chaque voyage a constitué un moment intense, que ce soit pour aller à la rencontre de personnes dotées d’une perspective commerciale et politique particulière ou parler avec les gens de la rue. On apprend énormément sur une culture ou une société en parlant, par exemple, avec celui qui vend des fruits au coin de la rue et qui voit des gens passer tous les jours. J’ai en quelque sorte grandi dans le monde d’après les accords d’Abraham : c’est un moment rêvé pour étudier, voir le monde et en découvrir les opportunités. Je n’arrête pas de penser à ce qui va se passer, à quoi ressemblera la normalisation.

En quoi cela a-t-il contribué à vous forger un point de vue ?
J’ai toujours pensé qu’il fallait établir des relations et partenariats en s’appuyant sur ce que nous avons en commun, à l’intérieur comme en dehors du monde juif. Tout le monde veut vivre sa vie tranquillement et prendre soin de ses proches. Le fait de me montrer, en ma qualité de Juif américain, d’étudiant, de personne qu’intéressent les affaires communautaires juives, contribue à créer du lien.
Trop souvent, nous lisons des histoires terribles dans les médias, notamment tout ce qui s’est passé sur les campus. Les gens lisent aussi un tas de choses sur la situation au Moyen-Orient mais il y a une grande partie du monde qui est réellement très difficile à comprendre si on n’y est jamais allé. En ce qui me concerne, je fais en sorte de me construire ma propre manière de penser en fonction de mon expérience.
Je lis beaucoup l’actualité des pays arabes, que ce soit via Al Jazeera ou Al Arabiya. Il y a des points sur lesquels nous sommes en. désaccord, mais je crois qu’il est important de les lire.
Vous avez dit aimer vous rendre dans les librairies, lors de vos voyages, pour voir ce que les gens lisent. Certaines choses vous ont-elles surpris ?
J’ai travaillé à Dubaï, l’été dernier, pour la Chambre de commerce. J’ai été très surpris de voir à l’aéroport un livre sur la Shoah. Je ne me souviens pas du titre, mais j’ai été très surpris de le voir là.
Pour en revenir à l’idée du terrain d’entente, vous avez parlé avec Halie Soifer, présidente du Conseil démocratique juif d’Amérique, et aussi Matthew Brooks, président de la Coalition juive républicaine. Ils sont diamétralement opposés sur le plan politique mais pensez-vous qu’ils pourraient trouver un terrain d’entente ?
Leur passion pour ce qu’ils font. Ce sont des gens qui croient fondamentalement qu’ils servent les intérêts de l’Amérique, des Américains, d’Israël dans certains cas, et aussi de la société juive. Ils sont une vraie source d’inspiration, comme nombre de Juifs qui ont de l’influence au sein de leurs cercles respectifs, qu’ils soient républicains ou démocrates.

Harvard a connu une forte augmentation des actes antisémites et de l’activisme anti-Israël. Comment l’avez-vous vécu sur le plan personnel ?
Je n’y suis pas, en ce moment et mon activité au sein de l’université a connu des hauts et des bas. L’année dernière a été difficile.
J’ai relevé quelque chose d’intéressant en faisant ce podcast : le nombre d’invités affiliés à Harvard. Dans les années 80 et 90, il y avait une vie juive à Harvard d’une grande richesse ; les gens disent que les salles de réunion de Hillel étaient pleines d’effervescence. Je crois que la vie juive sur le campus est moins active, de nos jours. Il y a aussi moins de Juifs sur le campus, et l’antisémitisme, qui affecte les personnes.
J’espère vraiment que l’université va prendre conscience de la gravité de la situation et faire en sorte que les étudiants juifs se sentent bien sur le campus. Je ne crois pas à la disparition de Harvard ou de l’enseignement supérieur américain. Je pense que c’est une grande université qui vit en ce moment des temps difficiles.
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