Un groupe orthodoxe US de premier plan reproche aux élus US de peser sur la refonte
Alors que Netanyahu donne un grand nombre d’interviews à la presse étrangère, Agudath Israel of America rappelle à l'Administration Biden entre autres de ne pas s'immiscer
Luke Tress est le vidéojournaliste et spécialiste des technologies du Times of Israël
Agudath Israel of America, l’un des principaux groupes orthodoxes américains, a reproché mercredi aux législateurs américains de s’être prononcés sur la refonte judiciaire du gouvernement israélien.
L’Administration Biden, les membres du Congrès américain et toute une série de groupes juifs américains ont critiqué l’initiative unilatérale de la coalition Netanyahu visant à remanier le système judiciaire.
L’Agudath n’avait pas fait de commentaires auparavant.
« Les législateurs américains et les autres représentants du gouvernement, bien qu’ils aient droit à leurs opinions, ne devraient pas chercher à utiliser leur position de pouvoir pour s’immiscer dans les affaires intérieures d’un autre État démocratique souverain », a déclaré Agudath dans un communiqué.
« La forme que devrait prendre, le cas échéant, la refonte judiciaire en Israël est une question qu’il appartient aux Israéliens de déterminer, par le biais du processus démocratique dynamique d’Israël. »
« Les États-Unis s’opposeraient à juste titre aux tentatives d’une autre nation d’influencer leurs propres affaires politiques internes. Les membres du Congrès et d’autres responsables américains devraient y réfléchir et laisser les questions israéliennes aux Israéliens. »
Le groupe a déclaré ne pas prendre position sur la législation.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a rejeté les critiques internationales selon lesquelles sa refonte judiciaire sapait les fondements de la démocratie, a déclaré lundi qu’il ne se laisserait pas influencer par des pressions extérieures.
S’adressant dimanche à Mark Levin, de Fox News, Netanyahu a déclaré, manifestement à l’intention de l’Administration Biden et d’autres, que les pays étrangers n’avaient pas à se mêler des questions internes à Israël.
Il a dit de ses 16 années de pouvoir : « Je n’ai jamais commenté les questions internes des autres démocraties », ajoutant : « Tout le monde a une opinion sur Israël, mais pas sur les émeutes en France ou les manifestations, les débats ici et là. »
Il a ajouté que les États-Unis avaient « un débat majeur entre la Cour suprême et l’exécutif en ce moment-même et je ne m’en mêle pas ».
L’Administration Biden a exprimé à plusieurs reprises son opposition à la réforme, demandant au gouvernement de ne pas voter les lois avant d’être parvenu à un consensus.
Netanyahu a assuré qu’il ne se laisserait pas influencer par les pressions internationales.
« Nous prendrons nos propres décisions. Dans les démocraties, les États souverains, les démocraties souveraines, les élus du peuple prennent les décisions et c’est ainsi que cela se passera en Israël. »
En dépit des manifestations de masse répétées, de l’opposition véhémente de hauts responsables du monde de la justice, de la sécurité, de l’économie et des pouvoirs publics, des mises en garde des alliés, au premier rang desquels les États-Unis et des milliers de réservistes menaçant de ne plus répondre à l’appel, les députés ont adopté la semaine dernière, par 64 voix pour – celles de la coalition -, la loi privant le pouvoir judiciaire de la faculté d’invalider les décisions du pouvoir exécutif jugées « déraisonnables ». L’ensemble de l’opposition, forte de 56 membres, a boycotté le scrutin.
Netanyahu a déclaré à Fox News qu’il tentait de parvenir à un accord sur la refonte judiciaire, imputant à l’opposition la responsabilité de l’échec des pourparlers.
Il a ajouté que les trois mois de négociations avaient été infructueux parce que « l’opposition était l’otage d’une minorité extrémiste à la manoeuvre pour l’organisation des manifestations ».
« Je fais toujours le maximum pour obtenir un consensus parce qu’il est préférable pour la démocratie que ces changements judiciaires se fassent avec le plus large consensus possible », a-t-il ajouté.
L’opposition, de son côté, accuse Netanyahu.
Le chef de l’opposition Yaïr Lapid a exigé dimanche un gel de 18 mois des projets de loi de refonte judiciaire comme condition sine qua non d’une participation de son parti Yesh Atid aux négociations avec la coalition.
Yesh Atid et Kakhol lavan, l’autre grand parti d’opposition, se sont retirés des pourparlers en juin, au motif que la coalition avait agi de mauvaise foi sur une question connexe, à savoir ses manoeuvres pour ne pas nommer de personnel ni convoquer la commission de sélection des juges, sans doute dans l’attente que la composition du panel soit modifiée dans un sens plus favorable à l’actuel gouvernement.
Dans son interview à Fox News, Netanyahu a redit que sa refonte aurait pour effet de renforcer la démocratie israélienne en rétablissant l’équilibre entre les pouvoirs, qualifiant la Cour suprême d’Israël de « tribunal judiciaire le plus activiste de toute la planète ».
Il a ajouté qu’aucun pays en dehors d’Israël n’avait de « critère raisonnable » et que le système judiciaire avait encore de nombreux moyens d’action pour garantir un équilibre efficace.
« Nos adversaires en parlent comme de la fin apocalyptique de la démocratie. Si c’est le cas, alors il n’y a aucune démocratie sur Terre. »
Il a par ailleurs répété que le véritable danger pour la démocratie israélienne venait de la menace de ne plus servir des réservistes.
Ces derniers jours, Netanyahu a donné un grand nombre d’interviews à la presse étrangère alors qu’il boycotte les grands médias israéliens.
Il a expliqué à l’antenne de Fox News que la presse israélienne déformait le débat sur la refonte.
« La réalité n’a rien à voir avec ce que vous pouvez lire, ou entendre de la bouche des médias. Ils ont tort », a-t-il assuré.
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.