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Un homme d’affaires palestinien veut bâtir ‘Silicon Rawabi’ en copiant Israël

"Nous sommes en train de profiter et d'utiliser les progrès et les réalisations d'Israël", a déclaré Bashar Masri, qui a développé Rawabi il y a huit ans

Dov Lieber est le correspondant aux Affaires arabes du Times of Israël

Sari Taha, gestionnaire de programme pour l'espace de travail collaboratif "Connect" de Rawabi, donne des conférences aux visiteurs. (Courtesy)
Sari Taha, gestionnaire de programme pour l'espace de travail collaboratif "Connect" de Rawabi, donne des conférences aux visiteurs. (Courtesy)

RAWABI, Cisjordanie – Dans la première ville palestinienne pré-planifiée, une grande mosquée et un hôpital sont encore en construction, le bâtiment de la municipalité n’a qu’une pierre de fondation et les deux tiers des élèves fréquentant l’école locale viennent de l’extérieur.

Pourtant, au cœur de Rawabi, huit ans après sa création, un centre d’affaires axé sur la technologie a récemment ouvert ses portes. Ses concepteurs espèrent qu’il pourra servir de noyau à la Silicon Valley d’un futur état palestinien.

L’homme d’affaires palestinien Bashar Masri, qui a fondé et développé Rawabi, espère pouvoir remplir le centre d’affaires – qui comprend un espace de travail collaboratif et un incubateur de start-ups – avec des entreprises de technologies de l’information et de la communication pouvant fournir des milliers d’emplois.

Mais tout comme la ville de Rawabi – gigantesque projet de 1,4 milliard de dollars, en partie financé par le Qatar – le centre technologique est extrêmement ambitieux et bien financé, mais son avenir est encore incertain.

Le hub, qui a ouvert il y a neuf mois, comprend toujours exclusivement les propres sociétés de Masri ou des entreprises qu’il soutient financièrement à travers des fonds de capital-risque. Il en est de même pour l’incubateur de start-ups, qui a ouvert ses portes en novembre.

L’entrepreneur palestinien Bashar al-Masri posant devant son projet immobilier à Rawabi le 23 février 2014 (Crédit : Hadas Parush/Flash 90)

La haute technologie palestinienne en est encore à ses balbutiements et seules quelques start-ups ont réussi. Aucune n’a été rachetée par de grandes sociétés internationales.

Pourtant, comme dans de nombreux pays où les ressources naturelles sont rares, la haute technologie est le grand espoir de télécommunication de l’économie palestinienne, où le chômage atteint 27 %.

Masri et son équipe espèrent que le centre technologique de Rawabi devienne un épicentre de la haute technologie palestinienne, un petit groupe concentré qui se développera lentement dans un environnement technologique animé. Mais il est encore tôt.

Si vous le construisez, viendront-ils ?

Le nouvel espace de travail collaboratif et incubateur, nommé « Connect », donne une bonne première impression. Le centre a un design élégant et new-age semblable à un espace WeWork, avec une grande salle et de vastes bureaux pour le co-working.

Les membres Connect ont accès à l’infrastructure interne de l’ensemble du hub technologique, ce qui signifie trois lignes Internet – deux palestiniennes et une israélienne – plus un VPN sécurisé et l’accès à un centre de stockage de données ultra-moderne.

L’adhésion à Connect est seulement de 50 dolalrs par mois, comparativement à 175 $ par mois pour WeWork à Tel Aviv. Selon Sari Taha, directeur de programme du centre, le prix des bureaux est « au cas par cas », et une firme vue comme ayant beaucoup de potentiel mais peu d’argent bénéficiera d’une faveur sur le loyer.

Les visiteurs découvrent l’entrepôt de données ultramoderne du centre technologique de Rawabi. (Courtesy)

M. Taha a indiqué que Connect est prêt à aider les entrepreneurs palestiniens à pénétrer les marchés européens et asiatiques.

Il existe également un fonds d’investissement sur site, baptisé Bader, spécifiquement destiné aux start-ups de TIC, et un institut de formation qui accorde des « mini-MBA » aux entrepreneurs de technologie.

Peut-être plus important encore, le centre est situé dans le centre commercial huppé de Rawabi, le seul endroit où les Palestiniens peuvent acheter les plus grandes marques de mode du monde et consommer dans l’un des nombreux cafés.

Mais est-ce suffisant pour attirer les clients ?

Selon Taha, Connect héberge actuellement quatre sociétés : WebTeb, une version arabe de WebMD; Studio 83, qui effectue la visualisation 3D pour les sociétés immobilières; une personne qui travaille pour une start-up allemande d’auto-partage appelée GETAWAY; et Imagry, qui développe des logiciels pour la conduite automatisée.

WebTeb, le client vedette de Connect, a reçu une subvention de 1,9 million de dollars du fonds de capital-risque Siraj de Masri, selon le site Web Crunchbase, qui publie des données sur les entreprises. WebTeb a été fondée à Haïfa, en Israël. Le PDG actuel, cependant, est maintenant basé à Dubaï. Imagry a également été fondée et basée à Haïfa.

Les quatre sociétés de Connect bénéficient d’un financement de l’un des fonds de capital-risque de Masri (Siraj et Bader), a indiqué M. Taha.

La place commerciale et d’affaires de Rawabi connu sous le nom de Q Center. (Autorisation)

Il y a aussi plusieurs pigistes travaillant à Connect et plusieurs restaurants dans le centre commercial qui sont indépendants et gérés par des hommes d’affaires locaux.

Comme dans Connect, toutes les entreprises basées dans le centre d’affaires de Rawabi sont également détenues exclusivement par Masri ou financées par l’une de ses sociétés. Il s’agit notamment du développeur de logiciels Asal Technologies, de la société palestinienne de crédit-bail Pallease et d’une nouvelle banque palestinienne appelée Banque nationale, qui est financée par l’un des fonds de capital-risque de Masri.

Le géant technologique israélien Mellanox – qui fabrique des technologies reliant les ordinateurs, les bases de données et les serveurs – et le siège social de Microsoft en Israël sous-traitent à Asal et ont donc des employés qui travaillent à Rawabi.

Selon Masri, il y a des dizaines d’entreprises qui envisagent activement de déménager à Rawabi. « Ils sont encore en train de tâter le terrain », a-t-il dit.

L’homme d’affaires chevronné ne cache pas le fait que la ville qu’il a construite est peuplée de ses propres entreprises.

« Asal est venu ici parce que je l’ai voulu. Si je ne montre pas que mes entreprises sont là, je ne peux pas attendre que d’autres viennent », a-t-il déclaré.

« Nous n’avons pas encore réussi », a-t-il ajouté, notant que son centre technologique n’est qu’à « 25 % » de son potentiel.

Obstacles au succès

Sam Bahour, un homme d’affaires palestinien-américain bien connu et un conseiller de politique de Al-Shabaka, un groupe de réflexion palestinien, a dit « il est trop tôt » pour juger si le hub de technologie de Rawabi réussira.

« Trois mois ne sont pas suffisants pour essayer de recruter des contrats internationaux. Ils ont seulement récemment terminé l’infrastructure », a-t-il déclaré à propos de Connect.

Un bureau dans l’espace de travail collaboratif de Rawabi « Connect. » (Courtesy)

Bahour, cependant, pensait que Rawabi aurait obtenu des entreprises pour l’ouverture des bureaux dans le plus grand centre d’affaires, ouvert il y a environ neuf mois.

« L’espace de construction est largement commercialisé. Ils essaient de recruter des entreprises autres que les leurs. Si cela ne s’est pas encore produit, cela veut dire sinon un feu rouge, du moins une lumière jaune signifiant que quelque chose ne va pas », a-t-il dit.

Bahour, qui est un critique virulent du régime militaire israélien en Cisjordanie, a déclaré que l’instabilité créée par les conflits politiques est probablement un facteur clé qui empêche les entreprises locales et internationales de s’installer à Rawabi.

« Il est situé dans une zone éloignée du centre-ville de Ramallah et du centre-ville de Naplouse. Et compte tenu de la fragmentation dans laquelle nous vivons, cela peut être un obstacle pour les gens » qui ont peur que quelque chose se produise et bloque leur accès à Rawabi.

Il a souligné qu’Israël continue de restreindre l’accès à Rawabi en empêchant la ville de construire une route d’accès plus large. La route d’accès actuelle est située dans la zone C de la Cisjordanie, où Israël exerce un contrôle militaire total.

Une photo prise le 27 juin 2017 montre une vue d’ensemble du chantier de construction de la nouvelle ville palestinienne de Rawabi en Cisjordanie. (AFP Photo/Abbas Momani)

Bahour a également soutenu que le contrôle d’Israël sur l’approvisionnement en eau de Rawabi augmente les craintes d’instabilité.

Rawabi était prêt à accueillir des résidents en 2014, mais il a fallu à Israël, qui contrôle le flux d’eau dans les villes palestiniennes, plus de deux ans pour accepter de connecter la nouvelle ville au réseau.

Actuellement, Israël fournit assez d’eau pour les quelque 4 000 habitants de Rawabi, dont beaucoup n’y vivent qu’à temps partiel. Masri craint que lorsque plus de gens emménageront, Israël pourrait de nouveau traîner les pieds à augmenter l’approvisionnement en eau.

Dans le sillon d’Israël

Alors que la bureaucratie israélienne a causé un certain nombre de déboires à Rawabi, Masri admet que la proximité de la « nation start-up » est le plus grand avantage du hub technologique.

« Qu’il n’y ait pas de secret : notre cible est au travers Israël. Nous sommes en train de profiter et d’utiliser les progrès et les réalisations d’Israël », a déclaré Masri.

On espère que les grandes multinationales ayant leur siège en Israël, comme Google ou Intel, ouvriront des bureaux d’externalisation à Rawabi. Un autre espoir est que les entreprises israéliennes elles-mêmes sous-traiteront à leurs voisins palestiniens.

Un bureau dans le centre d’affaires technologique de Rawabi. (Courtesy)

Masri a précisé que bien que la Jordanie et l’Egypte puissent offrir des ressources humaines moins chères, elles ne peuvent pas créer de relations avec des sociétés israéliennes comme le peuvent les Palestiniens.

« Nous ne cherchons pas à rivaliser en ayant les prix les plus bas. Nous cherchons à rivaliser avec un package, et le package implique le super high-tech qui est à côté de nous », at-il dit.

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