Un responsable de la sécurité de Dubaï s’oppose à un Etat palestinien
Sur Twitter, Dhahi Khalfan Tamim a insisté pour que les juifs ne soient pas traités comme des ennemis
Dov Lieber est le correspondant aux Affaires arabes du Times of Israël
S’écartant de manière frappante avec les politiques traditionnelles dans le monde arabe, un leader de premier plan dans les Emirats arabes unis a appelé les Etats arabes à se joindre dans une coalition sécuritaire avec Israël et a ajouté qu’il ne soutenait pas la création d’un Etat palestinien indépendant.
Le lieutenant général Dhahi Khalfan Tamim, le chef adjoint de la police de Dubaï et de la sécurité générale, a fait ces déclarations sur Twitter cette semaine, au mépris du tabou de longue date qui empêche le monde arabe de parler positivement d’Israël et d’accepter un éventuel échec d’un Etat palestinien indépendant.
Il a exhorté ses partisans à ne pas « traiter les Juifs comme des ennemis » mais lorsqu’il a ensuite posé une série de questions sur les Juifs à ses 1,3 million d’abonnés sur Twitter, leurs réponses ont été extrêmement négatives indiquant que la plupart ne partagent pas ses sentiments.
« L’Amérique tente de se rapprocher d’Israël… le monde entier le fait… Le rapprochement va résoudre les problèmes. Pourquoi devrions-nous pas avoir une coalition avec les Juifs contre les ennemis du Moyen-Orient », a écrit Tamim à ses abonnés sur Twitter.

Bien qu’il n’ait pas précisé de qui il parlait lorsqu’il a évoqué les « ennemis du Moyen-Orient », il faisait probablement référence à l’Iran.
Dans un autre tweet, Tamim a accusé le dirigeant iranien, l’ayatollah Ali Khamenei de faire du « commerce avec la cause palestinienne ».
La rhétorique de Tamim sur le rapprochement survient alors qu’Israël et les Etats arabes sunnites découvrent de plus en plus leurs intérêts alors qu’ils s’opposent à l’influence régionale croissante de l’Iran après l’accord nucléaire, bien que les dirigeants des Etats arabes ont généralement essayé de garder leurs contacts avec l’Etat juif secrets.
Les dirigeants israéliens, pour leur part, ont été plus ouverts en affirmant que le temps était venu de renforcer les liens diplomatiques entre les Etats arabes et l’Etat juif.
Aussi bien le chef de l’opposition, Isaac Herzog, et le vice-président américain, Joe Biden, a parlé de l’augmentation des intérêts mutuels entre Israël et le monde arabe dans leurs discours à la conférence de l’AIPAC à Washington cette semaine.
Et le mois dernier, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a appelé les Etats arabes à révéler leurs relations avec l’Etat juif. Le ministre de la Défense, Moshe Yaalon, a suivi les instructions du Premier ministre en disant qu’Israël a des « liens secrets » avec les pays arabes, en précisant qu’il ne parlait pas seuleument de la Jordanie et de l’Egypte, avec lesquels Israël a conclu des traités de paix mais également les Etats du Golfe et les Etats d’Afrique du Nord également.
Tzipi Hotovely a récemment déclaré à la Knesset qu’Israël entretenait des relations secrètes avec l’Indonésie.
Bien que Tamim ait appelé à l’ouverture envers Israël, il est entré en conflit avec l’Etat juif dans le passé.
L’ancien chef de la police de Dubaï aurait été celui qui a découvert et publié l’identité des agents du Mossad qui seraient derrière l’assassinat du chef du Hamas Mahmoud al-Mabhouh en 2010 à Dubaï.
Ecrivant en mai dernier dans le al Araby al Jaded, un important site d’actualité en arabe à Londres, Alain Gresh, a déclaré que « Tamim ne craint pas la controverse et évite le double discours ».
« Faut-il le croire ? », s’est interrogé Gresh. « En tout cas, personne ne semble être en mesure de l’empêcher de dire ce qu’il pense. Franchement, c »est une qualité rare dans une région où les dirigeants ne se confient pas habituellement dans les médias ».
« Il ne devrait pas y avoir d’Etat palestinien »
Tamim a ouvert sa longue série de tweets sur les relations israélo-arabe cette semaine en appelant à mettre fin à l’idée d’un Etat palestinien indépendant.
« Je suggère qu’il ne devrait pas y avoir un Etat palestinien et que l’on devrait être satisfait d’un Etat israélien qui englobe les Arabes et les Juifs », a écrit Tamim.
Mais il ne prévoyait pas une gouvernance perpétuelle sur les Palestiniens par les citoyens juifs de l’État binational. Tamim a fait valoir qu’au contraire, dans 70 ans, les Arabes représenteraient 75 % de la population. Cela permettrait aux Arabes, à terme, de prendre le relais du gouvernement en tant que majorité comme ce qui est arrivé en Afrique du Sud, a-t-il écrit.
Cependant, a-t-il indiqué, l’avenir démographique qu’il prédit n’est pas un moyen de miner Israël, mais une chance réelle pour la coexistence. « Voici comment nous allons vivre dans une paix durable avec les Juifs », a-t-il écrit.
Tamim a demandé ses abonnés sur Twitter « de ne pas traiter les Juifs comme des ennemis mais plutôt comme des cousins en conflit sur un héritage foncier ». L’éventuel Etat binational qui sera au final gouverné par les Palestiniens, a écrit Tamim, serait en mesure de se joindre à la Ligue arabe.

En mélangeant les Juifs et les Arabes en un Etat, a fait valoir Tamim, la perspective d’un autre Etat arabe qui échoue pourrait être évité.
« Si la direction de l’Etat palestinien est gérée par les Arabes, ce sera un autre état d’échec », a-t-il mis en garde.
Le chef de la sécurité émirati a également semblé suggérer que la combinaison avec les Juifs serait une sage décision en raison des prouesses économiques des Juifs.
« Sans les Juifs », a-t-il écrit, « vous [les Arabes] ne sauriez pas comment déposer votre argent à la banque », a-t-il tweeté, ajoutant que « les Juifs sont l’épine dorsale de l’économie mondiale d’aujourd’hui ».
Tout en appelant à des liens plus ouverts avec Israël, Tamim s’en est également pris à l’insincérité des Arabes pour leur soutien à la cause palestinienne.
« Nous en avons assez du discours qui stipule que la question de la Palestine est la cause numéro un ; c’est devenu la dernière cause. Certaines personnes ont oublié qui est Abu Ammar », a-t-il écrit, se référant à l’ancien dirigeant palestinien Yasser Arafat par son surnom.
Les sondages sur Twitter montrent que les partisans sont hostiles aux Juifs
Au cours de sa vaste campagne de tweet sur le conflit israélo-arabe, qui a commencé lundi et a continué jusqu’à mercredi, Tamim a publié un certain nombre de sondages à l’intention de ses nombreux abonnés, avec des réponses largement négatives en ce qui concerne les Juifs.
Dans sa première question, Tamim a demandé : « les Juifs ont vécu pendant de nombreuses années en terre arabe. Est-il permis pour eux de vivre en tant que citoyens dans nos pays et pour nous de vivre dans leur pays en tant que citoyens? ».
Après 19 628 votes, 22 % ont déclaré que cela est permis, 17 % ont déclaré que ce n’est pas permis et 61 % ont déclaré que les juifs « n’ont pas de place avec nous ».
Dans un autre sondage, avec 10 518 réponses, Tamim a demandé à ses abonnés ce qu’ils envisagaient pour l’avenir en ce qui concernait les Juifs. La grande majorité (67 %) ont voté « nous allons les jeter à la mer », 19 % ont dit qu’ils pourraient envisager deux Etats et 14 % ont voté pour « nous allons vivre avec eux dans un Etat ».