Un survivant juif de Pearl Harbor se souvient du chaos et de la résilience de ce jour fatidique
Le matin du 7 décembre 1941, Aaron Chabin était en train de se détendre dans son lit sur la base de Schofield Barracks lorsque l’enfer est descendu sur terre.

JTA — Entendant le bourdonnement des avions japonais dans le ciel, le soldat de Première classe Aaron Chabin s’était précipité pour rejoindre son poste à Pearl Harbor où son commandant lui avait tendu une arme à feu chargée, lui demandant de garder la dernière balle.
“Il m’a donné mon arme et m’a dit : “Ne sois pas fait prisonnier’”, raconte Chabin, âgé aujourd’hui de 94 ans lors d’un entretien téléphonique accordé mercredi à l’occasion du 75e anniversaire de l’attaque qui avait fait 2 400 morts et plongé les Etats Unis au coeur de la Seconde Guerre mondiale.
A 7:30, en ce début de matinée du 7 décembre 1941, Chabin se prélassait dans son lit sur la base militaire de Schofield Barracks, lisant le Honolulu Advertiser lorsque les soldats ont entendu une explosion. Habitué à une atmosphère « très désinvolte » » sur une belle île, Chabin explique que les militaires ont été choqués par l’attaque et nullement préparés à y faire face.
« Quelqu’un a couru sur le balcon du baraquement et il a dit : « Ce sont les Japonais ! » se souvient-il. « Et quelqu’un d’autre a dit : ‘Tu es fou ?’ J’ai couru pour prendre mon arme et je me suis précipité vers mon poste qui était au centre des communications”.
Chabin a passé le reste de la journée à relayer des messages téléphoniques entre les officiers, regardant Pearl Harbor sous la fumée et les flammes. La nuit venue, il s’est rendu à la base pour monter la garde – une activité qu’il n’avait jamais eu à faire.
Avant ce jour, personne ne s’était attendu à ce que la base soit la cible d’une attaque. « C’était le chaos », dit-il.
Né dans une famille juive de Detroit ayant rapidement déménagé à New York, Chabin s’était enrôlé dans l’armée à l’âge de 18 ans.
C’était un temps de paix et il espérait connaître un peu l’aventure, et peut-être faire carrière. Face au choix de stationner aux Etats Unis, sur le continent, aux Philippines, à Panama ou à Hawaii, il s’était décidé pour Hawaii.
L’un des soldats, dans son baraquement, était James Jones, auteur du roman sur la Seconde Guerre mondiale « Tant qu’il y aura des hommes », établi à Schofield Barracks.
Chabin venait juste de terminer son entraînement de base lorsque l’attaque est survenue.
“Tout a été confus au commencement”, dit-il. « Plus tard, nous nous sommes calmés en réalisant que les Japonais n’allaient pas envahir l’île. S’ils l’avaient envahie, la guerre aurait encore duré deux ans parce que depuis les îles d’Hawaï, ils auraient pu attaquer la côte ouest ».
Considéré comme trop léger pour entrer dans les unités d’infanterie, Chabin a passé le reste de la guerre dans le Corps des signaleurs de l’armée américaine à Pearl Harbor jusqu’à devenir le chef des personnels de communication là-bas. Il explique que ce poste n’a été « qu’une histoire de chance ». Mais son épouse Hélène livre une analyse différente : J’ai le sentiment que ça a été plus que de la chance”, dit-elle. « Je suis plus religieuse ».
Après la guerre, Chabin est revenue à New York et a brièvement tenté d’entamer une carrière professionnelle dans le chant. Il a plus tard trouvé sa voie dans la gestion de magasins d’alcool à travers la ville, dont un situé à proximité du Yankee Stadium. Lui et Hélène se sont mariés en 1954 et ont eu deux enfants, cinq petits-enfants et quatre arrières petits-enfants.
Chabin n’a plus aucun ami de ce moment fatidique à Hawaï, mais reste encore en contact avec d’autres survivants de l’attaque. Avant de s’exprimer auprès de JTA, il s’est rendu à une commémoration organisée à bord de l’U.S.S. Intrepid, le porte-avion amarré à Manhattan qui fait dorénavant office de musée.
L’un de ses souvenirs les plus poignants remonte en 1991, lorsqu’il est retourné à Pearl Harbor à l’occasion du 50ème anniversaire de l’attaque.
Là-bas, il a découvert son nom sur le tableau de service de l’époque et visité les mêmes baraquements que ceux dans lesquels il avait vécu lorsque les avions japonais s’étaient présentés.
“Ils n’avaient pas changé”’ dit-il.